80 km/h dimanche : marge de tolérance, dépassement, restitution accélérée de point... sept idées reçues sur les PV à la vitesse

Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L. V.)
Publié le 29 juin 2018 à 11h40, mis à jour le 29 juin 2018 à 13h43
Cette vidéo n'est plus disponible

Source : Sujet JT LCI

IDÉES REÇUES - A compter de ce dimanche 1er juillet 2018, les conducteurs français devront s’habituer aux 80km/h sur les routes secondaires. L’occasion de revenir avec Maître Jean-Baptiste le Dall, spécialiste du droit automobile, sur quelques fausses vérités en matière de vitesse.

400 000 km de routes secondaires changent de vitesse maximale autorisée ce dimanche 1er juillet. 

Je peux me permettre de rouler un peu plus vite avec les marges de tolérance

Attention, si l’on parle souvent de marges de tolérance, il s’agit en réalité de marges d’erreur technique. Comme tout appareil de métrologie légale, les radars font l’objet de procédures d’homologation et doivent être vérifiés périodiquement. Pour être déclarés aptes au service, les radars doivent permettre une mesure de la vitesse respectant ces marges. 

Les marges d’erreur peuvent ainsi jouer en faveur des conducteurs mais elles peuvent parfaitement leur être défavorables en retenant une vitesse légèrement supérieure à la réalité. Si le conducteur roule quelques kilomètres/heure au-dessus de la limitation en pensant être à l’abri, la verbalisation devient inévitable. 

80 km/h: Edouard Philippe promet une période de "pédagogie"Source : Sujet JT LCI
Cette vidéo n'est plus disponible

Je peux accélérer pour un bref dépassement de véhicule

Non, l’état de dépassement n’exonère en rien le conducteur qui doit opérer sa manœuvre tout en respectant les limitations de vitesse. C’est d’ailleurs cette problématique de dépassement qui a fait naître de nombreuses critiques à l’encontre de l’abaissement à 80 km/h. 

Avec cette nouvelle limitation, c’est l’ensemble des véhicules empruntant le réseau secondaire qui roulera à la même vitesse : voitures et camions. On peut supposer que nombreux seront les automobilistes à faire grimper le compteur de vitesse pour dépasser un poids lourd circulant au régulateur de vitesse.

Une indulgence pour un km/h de trop ?

Sur le terrain, les agents des forces de l’ordre vont adapter leurs critères de verbalisation en fonction des conditions de circulation et de leurs objectifs. Des agents à bord d’un véhicule d’interception se concentreront plus sur des excès de vitesse significatifs et pourront laisser passer les plus petites infractions dont la constatation les empêcherait peut-être d’attraper un plus gros poisson. 

Mais, dès lors que l’humain cède sa place à l’ordinateur, la verbalisation s'opérera de façon aveugle, que l’infraction soit relevée par une cabine radar automatisée ou par un radar embarqué. Un kilomètre heure de trop sur la vitesse retenue entraînera inévitablement l’envoi d’un avis de contravention. 

Un point en moins ça se récupère vite

Un faible dépassement de la vitesse autorisée (tout du moins en-dessous de 20 km/h au-delà de la vitesse autorisée) n’entraîne qu’un retrait d’un point sur le permis de conduire. Ce point pourra être restitué au conducteur si aucune autre infraction entraînant un retrait de point n’est enregistrée dans les six mois à compter de la décision de retrait de point. 

La commission de plusieurs petits excès de vitesse sur la route des vacances cet été fera ainsi perdre au conducteur le bénéfice du délai de restitution de point abrégé. Le délai applicable sera alors celui "de droit commun" à savoir trois ans. Par ailleurs, le conducteur devra garder à l’esprit que la décision de retrait d’un point peut certes s’effacer au bout de six mois, mais elle demeure une décision de retrait de point qui pourra, par exemple, priver un jeune conducteur de la bonification de points applicable pour un permis probatoire. 

Lire aussi

De même, cette décision de retrait d’un point pourra faire repartir un nouveau délai de trois ans pour les conducteurs qui avaient déjà perdu quelques points auparavant. 

Les agents doivent me montrer le radar

Non, les agents n’ont pas à montrer le radar avec lequel l’excès de vitesse a été mesuré.

Attention à la suspension de permis

Si la plupart des infractions à la vitesse qui seront constatées à partir du 1er juillet 2018 porteront sur des dépassements de moins de 10 km/h au-delà de la vitesse autorisée, mécaniquement, l’abaissement de la vitesse à 80 km/h devrait entraîner une augmentation des constations de grands excès de vitesse. 

Le grand excès de vitesse (contravention de 5e classe) porte sur les excès de vitesse de plus de 50 km/h au-delà de la vitesse autorisée. Dans ce cas, la rétention du permis de conduire est systématique. Arriveront par la suite la mesure de suspension préfectorale et la convocation devant le tribunal de police. 

Lire aussi

Mais attention : d’autres excès de vitesse moins importants peuvent également entraîner le retrait du titre de conduite. De plus en plus souvent, la constatation d’un excès de vitesse entre 40 et 50 km/h au-delà de la vitesse autorisée débouche également sur une rétention du permis de conduire.

Si la commission d’un excès de vitesse ne peut qu’être clairement déconseillée, la mise en garde sera encore plus forte pour tout dépassement de plus de 39 km/h au-delà de la vitesse autorisée. Et il sera rappelé que les marges d’erreur techniques peuvent jouer en défaveur du conducteur.

Pas de radars, pas de PV ?

La baisse de limitation de vitesse pourra éventuellement amener les forces de l’ordre à relever davantage d’infraction à la vitesse sans recours au radar. La verbalisation pour "vitesse excessive eu égard aux circonstances" n’implique pas pour les agents verbalisateurs l’utilisation d’un radar. Et l’infraction peut parfaitement porter sur une vitesse estimée inférieure à la limitation. 

L’excès est apprécié non par rapport à une vitesse maximale autorisée mais compte tenu des conditions de circulation. Avec l’abaissement généralisé de la vitesse, la perception d’une vitesse excessive par rapport notamment au flot de la circulation pourrait se ressentir à des vitesses plus faibles que par le passé.

Maître Jean-Baptiste le Dall, docteur en droit et vice-président de l'Automobile Club des Avocats, intervient sur son blog et sur LCI. 


Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L. V.)

Tout
TF1 Info