POINT DE VUE - L’Etat devait-il garantir le prêt de 224 millions d’euros souscrit par la Ligue de football professionnel, l’institution qui gère le championnat de football professionnel et les droits audiovisuels des quelques 42 clubs professionnels français ? L'analyse de Pascal Perri, économiste... et fan de foot.
L’Etat devait-il garantir le prêt de 224 millions d’euros souscrit par la LFP (Ligue de football professionnel), l’institution qui gère le championnat de football professionnel et les droits audiovisuels des quelques 42 clubs professionnels français ? Pour que la réponse soit sincère, je pose tous les éléments sur la table… Je suis un fan de foot depuis que j’ai compris à quoi servait un ballon. J’ai écumé les stades de France, participé à la gestion d’un club, arpenté les terrains des Midlands entre Coventry, Shrewsbury, Milton Keynes, connu le grand frisson du Nord à Liverpool ou Blackpool, fréquenté les divisions anglaises inférieures à Dagenham and Redbridge à Barnet ou Leyton Orient. Bref, je suis dopé au foot et les réponses que j’apporte ne sont pas celle d’un frustré du ballon ou d’un technocrate condescendant à l’égard de ce sport populaire et merveilleux. Mieux, j’ai acquis mes galons de fan dans les travées de Colombes en 1971, derrière le but lyonnais d’Yves Chauveau et sur les gradins du vieux stade de Malakoff où mon père et moi nous supportions l’équipe locale, alors en seconde division. Instruisons donc à charge et à décharge.
Le foot professionnel a bâti sa croissance sur l’endettement. La dépense de "main d’œuvre" est la principale dépense des grands clubs, salaires bruts chargés des joueurs, parfois jusqu’à 40 joueurs pros par club. L’envolée des droits TV a principalement profité aux joueurs et aux agents de joueurs. Les clubs, les employeurs en ont finalement assez peu profité en France. Or, le confinement a mis un terme définitif aux compétitions et singulièrement aux championnats qui alimentent les clubs en droits audiovisuels. Du coup, les diffuseurs ont interrompu les paiements. La panne sèche pour les clubs qui sont aussi des entreprises du spectacle vivant. Ni recettes billetterie, ni droits TV, moins de droits dits marketing et pour certains d’entre eux dont le célèbre Olympique de Marseille voilà que pointe sournoisement le spectre de l’appauvrissement. Peut-être pire encore…
Pour être aimé, le football doit être aimable. Et il ne l’est pas toujours.
Pascal Perri
L’emprunt levé par la Ligue de football professionnel a pour but de pallier l’absence des ressources historiques des clubs. Il est couvert par la garantie de l’Etat. Tout porte à croire que le LFP remboursera ses dettes. Elle a négocié des droits TV au delà du milliard pour les trois saisons qui suivent. L’Etat n’y sera pas de sa poche. Au passage, rappelons que le football est un contributeur fiscal et social précieux pour les finances publiques.
Il n’y a pas un football pro en France mais il y en a au moins trois. Un club occupe le haut de l’affiche. Il forme une catégorie à lui seul. Le PSG, dont la masse salariale est supérieure à presque tous les autres budgets. Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet mais l’argent engagé est privé. Ma réflexion portera plus sur l’attitude de certaines stars du PSG. Louons les bons gestes de Killian Mbappé qui soutient des œuvres caritatives mais que penser des autres stars qui ont refusé de baisser leurs salaires dans des circonstances aussi exceptionnelles ? Pour être aimé, le football doit être aimable. Et il ne l’est pas toujours. Aux cotés du PSG, on trouve de nombreux clubs de L1 et L2 aux moyens beaucoup plus modestes.
C’est la deuxième famille des clubs français. Ils ne sont pas compétitifs à l’échelon européen, là où se disputent les compétitions les plus valorisées. Enfin, une troisième sous famille est celle des clubs de Ligue 2. Leurs moyens sont souvent inférieurs à ceux des clubs professionnels anglais de League One, la troisième division britannique, et sans comparaison avec la Bundesliga 2, la seconde division allemande. Les footballeurs y sont payés le prix d’un cadre intermédiaire, parfois d’un cadre supérieur. J’hésite à parler de la classe ouvrière du foot mais les chiffres s’en rapprochent quand on compare avec les plus fortunés. Le foot n’est pas un service public mais un formidable spectacle populaire. C’est aussi la densité des clubs amateurs qui vivent de bouts de chandelle. Pour sauver l’édifice sportif et éducatif, l’Etat n’était pas de trop.
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