INTERVIEW - La commission interbancaire de retrait, appliquée lorsqu'un client utilise un distributeur de billets d'une autre enseigne que sa banque, a fortement augmenté en janvier, selon Les Echos. Un spécialiste, contacté par LCI, explique que c'est un coup dur pour les banques en ligne, mais qu’elles ne devraient pas répercuter ces frais sur leurs clients.
Retirer des billets dans un distributeur va-t-il bientôt coûter plus cher ? Selon Les Echos de ce mercredi 12 février, la commission interbancaire de retrait, qui s'applique lorsqu'un client retire de l'argent dans un autre réseau que celui de sa banque, vient d'augmenter de 56%. Elle est ainsi passée de 57 centimes à 89 centimes au 1er janvier. Cette hausse, qui cible tout particulièrement les banques en ligne, peut-elle être reportée sur les clients ? Sollicité à ce sujet par LCI, Maxime Chipoy, directeur du site spécialisé dans les questions budgétaires et la finance personnelle MoneyVox (ex-Cbanque), fait le point.
LCI : À quoi correspond cette commission interbancaire de retrait qui passe de 57 à 89 centimes ?
Maxime Chipoy, directeur de MoneyVox : Cette commission est un dispositif mis en place entre les banques dans le but que celles possédant plus de distributeurs de billets ne paient pas leur installation et leur gestion pour celles qui en ont moins. Il s'agit donc d'un mécanisme de compensation consistant à faire payer les enseignes qui n'ont pas fait l'effort d'installer assez de distributeurs lorsque leurs clients utilisent les machines des autres.
Au global, pour l'ensemble de la communauté bancaire, ce système crée un jeu à somme nulle. Mais au cas par cas, les établissements traditionnels dotés d'un important parc de distributeurs sont généralement gagnants alors que d'autres, surtout les banques en ligne, sont perdants. Proportionnellement, celles-ci comptent en effet davantage de clients effectuant des retraits que de distributeurs installés par leurs soins.
Cette augmentation vise-t-elle donc en particulier les banques en ligne ?
Oui, il est clair que ce changement est le fruit d'un long lobbying des banques traditionnelles pour faire en sorte que les banques en ligne paient davantage. Car, pour caricaturer, les banques en ligne peuvent être considérées comme des parasites utilisant le réseau des banques traditionnelles sans compenser suffisamment.
Globalement, les banques en ligne paieront bien davantage en raison de cette augmentation. À quelques exceptions près : par exemple Hellobank, l'offre de banque en ligne de BNP Paribas, ne devrait pas être affectée car elle est assimilée à la maison mère dans le système actuel. En revanche, les autres, qui possèdent leur propre licence bancaire, vont payer plus cher pour les retraits de leurs clients.
Se mettre à facturer les retraits ferait une sacrée mauvaise publicité à certaines banques en ligne
Maxime Chipoy, directeur de MoneyVox
Ces commissions sont-elles déjà répercutées aux clients ?
Oui, en règle générale, les clients des banques traditionnelles doivent payer en moyenne de 80 centimes à 1,20 euro par retrait effectué en dehors de leur réseau lorsqu'ils dépassent le palier de "retraits déplacés" gratuitement autorisés. Dans la plupart des enseignes, ce forfait gratuit comprend deux ou trois retraits par mois. Dans la pratique, cela correspond à la moyenne des retraits effectués par les Français, mais il convient de préciser que le nombre peut être largement dépassé à certaines occasions comme les soldes, les achats de Noël ou les vacances.
En revanche, la plupart des clients des banques en ligne ne sont actuellement pas mis à contribution pour leurs retraits : il peuvent ainsi tirer de l'argent dans les distributeurs des différentes banques autant de fois qu'ils le souhaitent gratuitement. À noter que certaines offres d'entrée de gamme comprennent toutefois des plafonds.
Peut-on en déduire que les clients des banques en ligne vont être mis à contribution ?
Il est peu probable que l'ensemble des banques en ligne fassent payer cette hausse des commissions interbancaires de retrait à leurs clients. Car certaines de ces banques, à commencer par Boursorama, ont fait toute leur réputation sur leurs tarifs faibles voire nuls. Se mettre à facturer les retraits leur ferait une sacrée mauvaise publicité, même si cela va représenter un coût supplémentaire de 32 centimes pour chacun d'eux.
On peut ainsi imaginer qu'elles vont assumer le surcoût et se diriger vers un bon compromis consistant à inciter leurs clients à limiter les retraits au profit des paiements par carte bancaire. Cette solution serait d'autant plus intéressante pour les banques qu'elles appliquent une commission sur ces paiements par carte. Enfin, il n'est pas exclu qu'elles achètent ou louent pour leurs compte des distributeurs afin de s'éviter des frais de commission interbancaire. Il y a fort à parier que, dans les années à venir, nous verrons dans les centres commerciaux des distributeurs aux couleurs des banques en ligne.
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