Prix des carburants au plus haut : pourquoi les tarifs continuent d'augmenter ?

Publié le 13 janvier 2022 à 13h43, mis à jour le 13 janvier 2022 à 19h51

Source : JT 20h Semaine

INTERVIEW - Les tarifs à la pompe atteignent depuis le début de l'année de nouveaux records. La conséquence d'une "demande dynamique" de la part des consommateurs qui se heurte à "une offre contrainte", comme nous l'explique Yves Jégourel, directeur du CyclOpe, un institut de recherche européen sur les marchés des matières premières.

L'essence n'a jamais coûté aussi cher. Selon les dernières données publiées par le ministère de la Transition écologique, les prix des carburants ont augmenté de nouveau, début 2022. Le prix moyen du litre de gazole a augmenté de 10 centimes et atteint presque 1,62 euro, un nouveau record historique. Même augmentation pour le sans-plomb 95 E10 : il pointe à 1,68 euro le litre. Comment expliquer cette flambée ? Les explications de Yves Jégourel, directeur de CyclOpe et docteur en économie.

Comment expliquer cette nouvelle hausse ?

Cela s'explique par une demande dynamique face à une offre contrainte. Il y a sur le marché deux aspects : des éléments fondamentaux, et la façon dont ces derniers sont interprétés par les opérateurs. Du côté des fondamentaux, on observe une demande qui reste dynamique et qui, dans un contexte sanitaire redevenu anxiogène, s'avère résiliente. En outre, l'offre reste contrainte. Nous sommes toujours sous les régimes des quotas de production : en mai 2020, l'Opep a réduit de 9,7 millions de barils/jour la production. À partir de juillet, la production a augmenté à nouveau, de 400.000 barils / jour. Mais certains pays, ayant des difficultés sur l'investissement ou les activités de maintenance, ont du mal à contribuer à cette augmentation de 400.000 barils. Ce régime doit disparaitre en septembre 2022. 

À tout cela se rajoute le contexte géopolitique (troubles au Kazakhstan, oléoduc récemment en maintenance en Libye). Et puis un troisième facteur intervient : le dollar s'est déprécié sur les dernières semaines. C'est le schéma assez classique d'un pétrole qui devient moins cher une fois qu'il est libellé dans une monnaie qui n'est pas le dollar.

"Nous sommes sur un chemin de crête concernant la transition environnementale"

Cette hausse des tarifs va-t-elle continuer ?

La volatilité demeure, de par la dimension d'anticipation et la crise sanitaire. Il y a beaucoup de "si" sur le marché. J'insiste sur la problématique de long terme : en matière d'investissement sur les énergies fossiles, on va avoir de fortes contraintes liées à la dimension environnementale. Il va falloir investir et pour investir il faut des investisseurs. On peut comprendre que la demande de produits pétroliers va diminuer. Mais si vous avez une offre qui diminue plus que la demande, il y aura évidemment un effet sur les prix. Certains y verront une occasion d'accélérer la transition environnementale, mais on voit bien que cela a des répercussions sociales importantes.

Le gouvernement a-t-il une marge de manœuvre pour faire baisser les prix à la pompe ?

Nous sommes sur un chemin de crête concernant la transition environnementale. Même s'il faut distinguer les problématiques liées à l'électricité de celles liées au carburant. Si la transition se traduit par une hausse des énergies fossiles, il faudra que cela soit accompagné par des mesures sociales. Soit des aides à la conversion, soit du soutien au pouvoir d'achat. Les gouvernements n'auront pas trop le choix. Il y a un triptyque qui se créé : les matières premières, la géopolitique, et l'aspect social. Les mesures structurelles doivent sans doute être renforcées. 


Thomas GUIEN

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