La Première ministre Élisabeth Borne a réclamé ce jeudi une baisse des prix des produits alimentaires "d'ici à la fin du mois de juin".La cheffe du gouvernement compte sur les industriels de l'agroalimentaire pour "répercuter les baisses des matières premières".Qu'en pensent les différents acteurs ?
Les prix dans les rayons vont-ils (enfin) être revus à la baisse ? C'est en tout cas ce qu'espère la Première ministre. Interrogée ce jeudi sur France 2, Élisabeth Borne a réclamé aux industriels qu'ils "répercutent" la baisse du prix des matières premières sur le tarif final, ce qui impliquerait "des baisses concrètes, tangibles" des prix dans les rayons "d'ici à la fin du mois de juin". Il faudrait pour cela que de nouvelles négociations s'ouvrent entre distributeurs et industriels.
La baisse des prix souhaitée par la grande distribution...
La grande distribution se montre particulièrement favorable. "Nous ne demandons que cela", indique à TF1info Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD). "Actuellement, le prix du blé est inférieur au niveau auquel il était lors du lancement de la guerre en Ukraine. Pareil pour le prix du café ou celui du transport international."
Pour le consommateur en revanche, les tarifs en rayon sont toujours aussi élevés. D'après l'Insee, les prix de l'alimentaire sont en hausse de 15,9% sur un an, et aucune accalmie n'est prévue dans les prochaines semaines. "Il faut que les industriels nous adressent des tarifs en baisse pour que les discussions s'ouvrent", et ainsi que les Français paient moins cher, martèle Jacques Creyssel.
...mais pas si simple à mettre en place pour les industriels
Mais les industriels avertissent déjà : leurs stocks, qui correspondent aux produits en rayon dans les prochaines semaines, ont été payés au prix fort. "Il peut y avoir des phénomènes baissiers sur un certain nombre de matières premières, mais encore faut-il que cela corresponde à l'état des stocks", souligne auprès de TF1info Jean-Philippe André, président de l'Association nationale des industries alimentaires (Ania).
Selon lui, si les industriels baissent dès à présent les prix, ils iront "droit dans le mur". "Si vous avez acheté des matières premières à un prix élevé, et que vous les avez dans vos stocks pendant un, deux, ou trois mois, vous ne pouvez pas accélérer le phénomène de sortie de vos stocks", insiste-t-il. Et donc de baisse des prix. "Ce serait suicidaire."
Toutefois, le secteur agroalimentaire n'est pas fermé à revenir autour de la table pour revoir certains prix à la baisse. "La loi impose déjà une clause de renégociation", rappelle le président de l'Ania. "S'il y a des phénomènes baissiers au niveau mondial, la grande distribution va reprendre contact avec ses fournisseurs et va avoir un débat ouvert sur l'état des stocks. C'est prévu, réglementé, ce sera du cas par cas et au rythme d'absorption des stocks actuels."
Sans nouvelles discussions, les prix resteront élevés, car la grande distribution "fait déjà le maximum", assure Jacques Creyssel. "Nous fournissons des efforts avec le trimestre anti-inflation. Et les marges de la distribution se situent entre 0 et 2%."
Vers une baisse des prix en rayon, mais quand ?
Grande distribution et industriels s'accordent au moins sur un point : la hausse des prix doit s'estomper. Mais quand ? Élisabeth Borne réclame des effets visibles dès le début de l'été, avec une baisse du ticket de caisse pour les Français. "Emmanuel Macron a lui-même dit : 'je vais être honnête, les prix alimentaires, ça va être dur jusqu'à la fin de l'été'", rétorque Jean-Philippe André.
"Personne n'a intérêt à cette situation d'inflation", poursuit-il. "C'est compliqué pour nous aussi : nos prix augmentent, donc la population se détourne vers les marques de distributeurs. Mais il faut faire les choses dans le bon ordre, au cas par cas, en fonction des situations de chaque entreprise. Si les conditions sont réunies, il y aura une discussion entre le distributeur et son client. Nous espérons, sur la seconde partie de l'année 2023, une inversion de la tendance sur les prix alimentaires."
La grande distribution espère tout de même avancer le temps. "Les volumes des ventes des industriels baissent, les grandes marques doivent d'elles-mêmes diminuer les prix pour vendre un peu plus", plaide Jacques Creyssel. "Elles devraient donc être raisonnables. Il faut être optimiste." Réponse dans les prochaines semaines.