Pour son troisième match de Coupe du monde, la France s'est largement imposée contre une Namibie en grande difficulté (96-0), ce jeudi, à Marseille.Pourtant, l'essentiel est sans doute ailleurs pour les Bleus, dont le capitaine Antoine Dupont est sorti sur blessure et pourrait être indisponible pour la suite de la compétition.Malgré l'immensité de la perte, le staff tricolore dispose d'options solides pour remplacer son demi de mêlée.On fait le point.
"Bittersweet", comme disent nos voisins anglais. Malgré l'ampleur du score et l'impression de facilité tout au long d'une rencontre rentrée dans l'histoire - il s'agit de la plus large victoire du XV de France -, la victoire des Bleus contre la Namibie (96-0) laisse un goût amer. Alors que l'heure devrait être à la fête après 14 essais marqués et une copie collective parfaite, ou presque, c'est surtout l'inquiétude qui prédomine à l'aube des deux semaines de repos dont vont bénéficier les joueurs de Fabien Galthié avant leur match décisif contre l'Italie (6 octobre, 21h, en direct sur TF1, MYTF1 et en live commenté sur TF1Info).
"Fracture maxillo-zygomatique" pour Antoine Dupont
Le capitaine Antoine Dupont, si précieux par son jeu au pied et sa capacité à imprimer le tempo d'une rencontre, est sorti sur blessure. Touché à la tête lors d'un violent choc avec Johan Deysel, le demi de mêlée - encore étincelant au cours des 46 minutes passées sur la pelouse du Vélodrome - a rapidement filé à l'hôpital pour y passer des examens. Et le verdict n'a pas tardé à tomber : il souffre d'une "fracture maxillo-zygomatique". "Un avis chirurgical spécialisé a été demandé pour définir précisément la durée de l’indisponibilité", a précisé la FFR.
Il s'agit d'un immense coup dur pour la tricolore, à la recherche d'un premier titre planétaire et qui perd là son leader de combat, son chef d'orchestre. "Antoine Dupont est l’élément indispensable. Il fait tout dans cette équipe et son jeu au pied est tellement précieux", analysait avant le début de la compétition Pierre-Henry Broncan, responsable des mauls au sein du staff australien.
Dans notre tête, aujourd’hui, il n’a pas encore fini la compétition
Laurent Labit
Si la présence du Toulousain, élu meilleur joueur du monde en 2021, est incertaine pour les matchs couperets, à commencer par le quart de finale, le staff de l'équipe de France ne se ferme aucune porte. "Nous ne tirons pas de plan sur la comète trop tôt. Un chirurgien nous en dira plus sur la disponibilité d’Antoine. On va patienter encore 48 ou 72 heures et on en saura plus", indique Laurent Labit en conférence de presse. "On a encore l’espoir qu’il continue, c’est pour cela que l’on va se laisser ces deux ou trois jours pour avoir l’avis d’une personne compétente qui nous dira ce qu’il en est exactement. Ce sera ensuite à Antoine et au chirurgien de prendre la décision", ajoute l'entraîneur des trois quarts français. "Dans notre tête, aujourd’hui, il n’a pas encore fini la compétition", conclut-il.
L’atout numéro un du XV de France, c’est la profondeur d’effectif
Pierre-Henry Broncan
Il n'en reste pas moins que sa blessure, bien plus grave qu'initialement envisagé lorsqu'il est sorti sur protocole commotion, pourrait l'écarter des terrains pour une longue période, les blessures à la tête ne pardonnant pas en rugby. Et il n'est clairement pas aisé de remplacer au pied levé un joueur d'un tel calibre. Mais s'il y a bien une équipe qui peut accomplir un tel exploit, sans une baisse drastique de sa compétitivité, ce sont les Bleus. "L’atout numéro un du XV de France, c’est la profondeur d’effectif. [...] L’immensité du réservoir est impressionnante", mettait en avant Pierre-Henry Broncan, qui a longtemps entraîné des clubs de l'Hexagone. "On a trois demis de mêlée", rappelle, de son côté, Laurent Labit, "Couilloud a fait une excellente entrée hier. Maxime Lucu est avec nous depuis longtemps".
Maxime Lucu, l'expérimenté gestionnaire
D'un côté, l'expérimenté Maxime Lucu (30 ans, 17 sélections), donc, part avec une longueur d'avance. Doublure attitrée de l'ancien Castrais depuis le début du mandat de Fabien Galthié, il connaît parfaitement les systèmes de l'équipe de France. Il a aussi pour lui sa longueur de jeu au pied et son côté gestionnaire. Cerise sur le gâteau, il possède déjà des automatismes avec Matthieu Jalibert, l'ouvreur titulaire depuis la blessure de Romain Ntamack, puisqu'il le fréquente au quotidien dans son club de l'Union Bordeaux-Bègles. Pas toujours flamboyant, il passe rarement à côté d'un match, même s'il manque de référence dans des rencontres de très haut niveau (matchs de phases finales, chocs au niveau international, etc.).
Entré en cours de jeu contre la Nouvelle-Zélande (27-13), le natif de Saint-Jean-de-Luz avait permis aux siens de parfaitement négocier une fin de match tendue. Propre en défense (un placage, un ballon gratté), il avait aussi parfaitement animé l'attaque, entre jeu au pied d'occupation et bonne présence autour des rucks. Ses 63 minutes contre l'Uruguay (27-12) sont plus contrastées mais il a tout de même été élu homme du match, ne donnant pas sa part au chien en attaque (27 mètres parcourus ballon en main, un franchissement, deux défenseurs battus, six relances à la main).
Baptiste Couilloud, le dynamiteur de défenses
De l'autre côté, le jeune Baptiste Couilloud (26 ans, 15 sélections) apporte sa fougue et son côté électrique balle en main. Si son jeu au pied est parfois plus aléatoire, il se rapproche du profil d'Antoine Dupont dans sa capacité à créer des brèches dans les défenses, sa vitesse et son sens de la finition. Son dynamisme avait beaucoup apporté lors de la fin de match contre les Teros, contribuant notamment à marquer l'essai salvateur de Louis Bielle-Biarrey par ses bons choix en sortie de rucks et sa rapidité pour éjecter le cuir. Contre la Namibie, le Lyonnais a encore fait parler tout son talent en marquant un essai opportuniste... dès son premier ballon. Et, par la suite, la qualité de son animation et la justesse de ses passes ont permis aux Français de creuser encore davantage l'écart contre une défense en perdition.
Logiquement, les deux hommes postulent pour une place de titulaire contre les Transalpins, en clôture de la phase de poules, et potentiellement pour les quarts de finale. "On est tournés vers le match de l’Italie et on ira avec notre meilleure équipe. On va se réunir pour déterminer la meilleure équipe en fonction de la stratégie choisie pour ce match. Baptiste comme Maxime pourront démarrer. On va y réfléchir après avoir regardé l’adversaire", a évacué Laurent Labit devant la presse. Autant dire que, a priori, rien n'est figé dans le marbre. Mais le XV de France possède les armes pour réussir un grand parcours en l'absence de son capitaine. Il n'y a plus qu'à, comme on dit.