Après une préparation convaincante, les Fidji s'avancent avec beaucoup d'ambitions dans cette Coupe du monde.Confrontés aux Gallois, ce dimanche (21h) en clôture de la première journée de la phase de poules, les insulaires s'appuient sur une forte colonie de joueurs évoluant en France.
Attention, surprise potentielle. Forts d'une préparation estivale particulièrement réussie, les Fidjiens s'avancent plus ambitieux que jamais au moment d'entamer la dixième Coupe du monde de rugby de l'histoire. Ils restent sur quatre victoires lors des cinq derniers matchs, avec des succès convaincants contre des équipes qualifiées pour le Mondial (36-20 contre les Tonga, 33-19 contre les Samoa, 35-12 contre le Japon). Surtout, les insulaires ont remporté la première victoire de leur histoire contre l'Angleterre, signant un retentissant 30-22 sur la pelouse de Twickenham. Seule l'équipe de France a su trouver la clé cet été contre cette adversaire imprévisible (34-17).
L'équipe a un potentiel énorme
Pierre-Henry Broncan
En progression constante depuis plusieurs années, les Flying Fijians font office d'outsider sérieux au grand rendez-vous de l'Ovalie. D'autant plus dans une partie de tableau abordable, où ils sont assurés de ne pas croiser la France, l'Irlande, la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud (ou l'Écosse) avant les demi-finales. "Il va falloir se méfier des Fidji. L'équipe a un potentiel énorme", confie à TF1info Pierre-Henry Broncan, l'un des adjoints d'Eddie Jones dans le staff de l'Australie, également placée dans la poule C. C'est donc une opposition de choix qui se dresse sur le chemin des Gallois, qui sont eux embourbés dans une dynamique particulièrement inquiétante (deux succès en huit matchs en 2023, avec plusieurs larges défaites à la clé).
La montée en puissance de cette sélection du Pacifique s'explique en partie par la présence de deux franchises, les Fijian Drua et les Moana Pasifika, dans le Super Rugby, le championnat de l'hémisphère sud rassemblant des formations australiennes, sud-africaines et néo-zélandaises. Mais la forte colonie fidjienne dans l'Hexagone n'est pas non plus étrangère à ce succès, une part non négligeable de la sélection évoluant en Top 14 et en Pro D2, deux championnats dont le niveau relevé est unanimement reconnu. Ce ne sont pas moins de 10 "Français" (sur les 33 joueurs sélectionnés, soit près d'un tiers de l'équipe) qui ont été appelés par le sélectionneur Simon Raiwalui pour la Coupe du monde.
Radradra et Waisea en fer de lance
Contre le XV du Poireau, cinq de ces joueurs sont alignés d'entrée. Devant, le pilier Luke Tagi (Bayonne, 26 ans) et le troisième ligne Lekima Tagitagivalu (Pau, 27 ans) apportent leur rugosité et leur dimension physique. Mais ce sont surtout trois autres noms qui retiennent toute l'attention. Désormais très familier des joutes du championnat français, l'expérimenté capitaine Waisea Nayacalevu (33 ans, 25 sélections) est aussi électrique sur ses appuis que capable de faire la différence par une passe tranchante. Il est accompagné au centre du terrain par Semi Radradra (31 ans, 15 sélections), passé par Toulon et Bordeaux Bègles, et qui évoluera à Lyon la saison prochaine. Dan Biggar et les siens devront se méfier de sa capacité à casser les placages et à faire vivre le ballon, même en tombant.
Moins connu du grand public, l'ailier Vinaya Habosi (Racing 92) est également de la partie. Et il sait, lui aussi, se montrer redoutable, notamment à la finition. Depuis le début de sa carrière, la flèche de 23 ans tourne à un essai tous les deux matchs, toutes compétitions confondues, que ce soit avec les Fijian Drua (5 essais en 11 rencontres), le Racing 92 (4 essais en 7 matchs), qu'il a rejoint en début d'année, ou sa sélection nationale (4 essais en 8 sélections).
Avec Botia et Tuisova, un banc XXL
En parallèle, le banc fidjien ressemble à un véritable bâton de dynamite, capable de faire sauter n'importe quelle fin de rencontre. L'arrière de Bayonne Sireli Maqala (Bayonne) et le deuxième ligne lyonnais Temo Mayanavanua (LOU) sont les noms les moins connus mais apportent énergie et vivacité. À leurs côtés, rien de moins que Josua Tuisova (parti de Lyon vers le Racing 92 cet été) et Levani Botia. Le premier, ailier de métier, dispose d'une pointe de vitesse extrêmement importante malgré un physique imposant (1,81 m, 113 kg). Il est passé maître dans l'art de casser les défenses et de distiller des passes après contact. Aussi doté d'une très bonne qualité à la conclusion des actions, il n'est pas rare de voir le joueur de 29 ans tenter des plongeons acrobatiques pour éviter de passer en touche au moment de marquer un essai.
L'apport du second, très expérimenté (34 ans), n'est plus à démontrer. Longtemps aligné au centre, il s'est reconverti avec succès en troisième ligne. Ses placages dévastateurs et son activité incessante, que ce soit dans les tâches de l'ombre ou dans ses courses, font merveille à ce poste. Techniquement, "Leps", devenu une véritable légende du côté de La Rochelle où il évolue depuis 2014, se montre, par ailleurs, très juste. Sans parler de sa présence dans les rucks, où il constitue un véritable poison.
Ils sont beaucoup plus structurés dans leur expression collective qu'ils ne l'étaient par le passé
Warren Gatland
Autant d'armes susceptibles de faire la différence contre un pays de Galles à des années lumières du niveau qui l'avait mené au Grand Chelem lors du Tournoi des Six Nations 2019. "Il y a de grands athlètes parmi eux, ils sont probablement beaucoup plus structurés dans leur expression collective qu'ils ne l'étaient par le passé, notamment à la relance dans leurs 22 mètres et dans le jeu au pied", reconnaît d'ailleurs Warren Gatland, revenu au chevet d'une équipe nationale en pleine crise. "Il faut juste bien défendre. Nous savons qu'ils vont franchir ou faire des off-loads, il faudra réagir rapidement", a encore indiqué le technicien.
Heureusement pour ses protégés, le forfait, juste avant le début de la compétition, de l'ouvreur Caleb Muntz pourrait désorganiser les Fidjiens et rebattre les cartes.