Disponible sur Netflix, "On se connaît… ou pas" est le remake en langue arabe du succès italien "Perfetti Sconosciutti".Lors d’un dîner, un groupe d’amis se prête à un jeu qui dévoile des secrets gênants.En Égypte, des voix s’élèvent contre un film qui serait contraire aux valeurs familiales.
Avec 19 remakes, le film italien Perfetti Sconosciutti sorti en 2016 est entré au Guinness World Records. La version française, Le Jeu, réalisée par Fred Cavayé avec Stéphane Groodt et Bérénice Bejo, a connu un joli succès en salles deux ans plus tard. La dernière en date, intitulée Ashab wala Aaz, est un petit événement puisqu’il s’agit de la première production Netflix en langue arabe. Réunissant un casting d’acteurs égyptiens et libanais, le film de Wissam Smayra reprend le principe de l’original. Lors d’un dîner, trois couples mettent leurs téléphones portables au milieu de la table afin de partager leurs derniers messages respectifs. Mesquineries, adultères, homosexualité cachée… ce qu’ils vont découvrir va légèrement crisper l’atmosphère.
Trois jours après sa sortie, le film baptisé On se connaît… ou pas en VF figure parmi les programmes les plus regardés de Netflix dans le monde arabe. Mais tout le monde n’apprécie le petit vent d’impertinence de cette comédie de mœurs. Ainsi en Égypte un avocat a déjà saisi le ministère de la Culture et le service de la censure pour faire "interdire" un film qui, dit-il, "vise à briser les valeurs familiales". De son côté, le député Moustafa Bakri a réclamé une session extraordinaire du Parlement pour se pencher sur la question.
D’après ce dernier, il y aurait "plus de vingt scènes pornographiques" dans le film notamment interprété par la comédienne et réalisatrice libanaise Nadine Labaki (Caramel, Capharnaüm). Des propos un brin excessifs puisqu’aucune scène érotique ne figure dans le film, pas même un baiser. Et si Netflix l’a interdit au moins de 16 ans dans les pays arabes. En France, aucune mention n’en précède la diffusion. Mais alors de quoi parle-t-on ?
Accusé de faire la promotion de l'homosexualité
Moustafa Bakri, qui s'érige régulièrement en gardien des mœurs, est allé sur tous les plateaux des talk-shows les plus suivis du pays de 102 millions d'habitants pour réclamer rien moins que l'interdiction pure et simple de Netflix en Égypte. Le tort du film, selon lui, est de montrer un père discuter avec sa fille de sa première relation sexuelle après la découverte de préservatifs dans son sac par sa mère et de "défendre l'homosexualité alors que nous sommes une société orientale", accuse-t-il.
"Il y a une différence entre ne pas dénoncer un phénomène et l'encourager", répond le critique de cinéma Tarek al-Chennaoui dans un pays où l'homosexualité n'est pas expressément prohibée mais où la répression des personnes LGBTQ+ s'est accrue depuis l'élection du président Abdel Fattah al-Sissi en 2014. Il y a près de 20 ans, le public se ruait dans les salles pour Sahr el-Layali (Nuits blanches en arabe -ndlr), l'histoire de quatre couples qui se déchirent après un dîner entre amis avec, au menu, impuissance masculine, adultère et écarts entre classes sociales.
Mais dans un pays où conservatisme et lecture rigoriste de l'islam n'ont cessé de progresser, une femme concentre toutes les critiques : l'unique actrice égyptienne du film, Mona Zaki. À l'écran, elle joue une femme prise entre une belle-mère qui la déteste et un mari qui ne la touche plus. À la ville, les internautes réduisent l'actrice - qui jouait justement dans Sahr al-Layali aux côtés de son mari Ahmed Helmi à leurs débuts - à son seul statut d'épouse.
Plutôt que de s'adresser à elle, ils interpellent directement ce dernier. "Comment a-t-il pu autoriser sa femme à jouer ce rôle ?", écrit l'un d’eux tandis que d'autres vont plus loin encore et lui demandent de la répudier immédiatement. "C'est un film courageux et original", rétorque sur Facebook Khaled Ali, grande figure de la gauche égyptienne. "Tout ce dont il parle existe bel et bien dans nos sociétés, n'en déplaise à ceux qui préfèrent l'ignorer, se taire ou attaquer".
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