INTERVIEW - Cinq mois après sa brutale éviction du talk-show de Canal+, Antoine de Caunes revient ce soir avec "L'émission d'Antoine", un programme gentiment déjanté qui propose de décrypter notre société. L'occasion de prendre des nouvelles de l'animateur et de lui parler de ses récentes mésaventures.
On vous attendait avec "Antoine sans fiche", on vous retrouve dans "L'émission d'Antoine". Que s'est-il passé ?
Il ne vous a pas échappé qu'il y a eu quelques bouleversements cet été. Dans la bousculade générale, une des idées qui est ressortie, c'était que je ne quittais pas la chaîne. Et croyez-moi je n'avais pas la tête à penser à une autre émission. Mais dans les projets qu'on avait vaguement ébauchés avec la chaîne, on avait parlé d'un programme d'improvisation, à l'opposé de ce je faisais au "Grand Journal". L'idée était de partir en free style pendant une heure. C'était très séduisant mais tout à fait contraire à ma nature. Je suis un grand anxieux qui prépare de manière névrotique ses émissions !
Il n'a jamais été question que je présente ce programme.
Dans "L'émission d'Antoine", on vous sent comme un poisson dans l'eau...
C'est pour ça qu'elle s'appelle "L'émission d'Antoine" ! J'avais envie d'un programme qui me ressemble. A travers un thème qui peut aussi bien sembler anodin que la pilosité ou profond, comme l'ennui, je vais vous divertir, vous amuser et vous apprendre quelque chose sur l'état d'esprit de l'époque. J'aime beaucoup la case de diffusion de 22 h 30 car c'est mon créneau naturel et il y a une liberté de ton plus grande. On n'a pas non plus les impératifs des programmes en access ou en prime. Moi je ne fais pas de la télé pour montrer ma tronche mais pour raconter des histoires de la manière dont j'ai envie de le faire.
"Il n'y a rien de dramatique dans toute cette histoire car ce n'est que de la télévision"
Vous débutez l'émission en vous moquant un peu du "Grand Journal" où on "tourne autour du pot". C'était une façon de dédramatiser ?
Je me moque de moi dans le "Grand Journal" ! Oui, bien sûr car il n'y a rien de dramatique dans toute cette histoire car ce n'est que de la télévision. Il y a d'autres sujets plus tragiques. Disons que c'est juste une des nombreuses péripéties télévisuelles qui alimentent la chronique. Pour moi la page du Grand Journal est tournée et j'attaque ma nouvelle émission avec un enthousiasme non feint. J'ai l'impression de retrouver des sensations que je n'avais plus éprouvées il y a longtemps.
L'exercice très cadré du "Grand Journal", ce n'était pas vraiment votre truc au fond, non ?
Ce qui m'amusait dans le "Grand Journal" c'était de faire un exercice que je n'avais jamais pratiqué auparavant. Interroger dans la même émission Florian Philippot et Jimmy Page, c'est assez excitant, même si d'un point de vue personnel je trouvais qu'il y avait trop de politique. Et puis on ne peut pas refuser de présenter "Le Grand Journal" même si on sait qu'on aura une marge de manœuvre étroite.
N'avez-vous pas été tenté de claquer la porte de Canal+ en juillet dernier ?
Si car il y a toujours un moment de découragement, passé le premier choc. Mais je n'étais pas devenu l'homme à abattre. J'ai juste été le paratonnerre qui a pris la foudre. C'était tout un système de gestion de la chaîne et de production qui était visé. J'ai eu une conversation très franche avec Vincent Bolloré dans les jours qui ont suivi et il m'a dit : "Ce n'est pas vous qui êtes en cause et on a envie de continuer à travailler avec vous. Dites-nous ce que vous avez envie de faire et on va voir si on arrive à s'entendre". Et croyez-moi, j'ai une marge de manœuvre incroyable pour faire mon émission. Ce serait mal venu et mesquin de me plaindre.
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Vincent Bolloré est dépeint comme un méchant qui veut la peau de Canal+. Comprenez-vous les changements qu'il a entrepris ?
Je pense que Vincent Bolloré a une vision d'un industriel qui a fait ses preuves dans d'autres domaines. Après on le suit ou pas, mais sur le fond, le fait de réorganiser un groupe pour avoir plus de communication entre toutes ses composantes ça me semble relever d'une logique assez élémentaire. Je me demande pourquoi on ne l'a pas fait avant. J'ai du respect pour l'homme. Sa reprise en mains a été brutale mais laissons les choses se mettre en place et voyons dans quelques mois ce qui ressort de cette histoire une fois que la poussière sera retombée. Ce n'est pas la première fois que Canal+ est soumis à des secousses telluriques de cette amplitude. Il faut arrêter de vivre dans le monde des Bisounours. Canal+ est une chaîne privée qui cherche à défendre ses intérêts.
Avez-vous recommencé à regarder "Le Grand Journal" ?
J'ai regardé la première mais je ne regarde plus. Ça me fait encore bizarre de voir cette émission car c'est trop frais. Je n'ai pas encore la distance nécessaire. Je n'ai aucun commentaire à faire sur l'émission, si ce n’est que je trouve disproportionnées les attaques dont elle fait l’objet.
Ça fait plus de 30 ans que vous êtes chez Canal+. Pensez-vous un jour quitter la chaîne ?
J'ai fêté mes 31 ans hier, le 4 novembre ! Est-ce que Canal me quittera un jour ? Je ne sais pas. Ce n'est pas à l'ordre du jour. Je n'aime pas parler d'avenir. Je vis pour ce que je suis en train de faire et j'espère que ma nouvelle émission plaira aux gens.
"L'émission d'Antoine", ce soir à 22 h 45 sur Canal+.