Après la polémique sur son dessin consacré à l’inceste, Xavier Gorce claque la porte du "Monde"

Publié le 21 janvier 2021 à 8h38, mis à jour le 26 janvier 2021 à 20h53
Après la polémique sur son dessin consacré à l’inceste, Xavier Gorce claque la porte du "Monde"
Source : AFP

MALAISE - Publié dans la newsletter du journal "Le Monde", un dessin de Xavier Gorce consacré à l’inceste a suscité la colère de nombreux internautes. Désavoué publiquement par la direction du quotidien, le dessinateur de presse a décidé de mettre fin à leur collaboration. S’il regrette une mauvaise compréhension de travail, l’intéressé refuse toutefois de parler de censure.

La décision est "personnelle, unilatérale et définitive". Dans un tweet publié ce mercredi, le dessinateur de presse Xavier Gorce annonce qu’il ne travaillera plus avec Le Monde. C’est l’épilogue d’une polémique née la veille sur les réseaux à la suite de la publication, dans la newsletter du quotidien, d’un de ses dessins illustrant le thème de l’inceste, dans l’actualité depuis la parution du roman de Camille Kouchner, La Familia Grande.  

"Si j'ai été abusé par le demi-frère adoptif de la compagne de mon père transgenre devenu ma mère, est-ce un inceste ?", y demande un petit pingouin à son aîné...

Provocation ? Maladresse ? Mauvais goût ? De nombreux internautes vont s’émouvoir de dessin, reprochant au dessinateur de se moquer des victimes, voire de faire preuve de transphobie. Le week-end dernier, ils ont été nombreux à raconter leur histoire personnelle sur les réseaux avec le hashtag #MeTooInceste

Xavier Gorce s'explique

Interpellée par certains, la direction du Monde a réagi dans l’après-midi en présentant publiquement ses excuses sur son site internet. "Ce dessin peut en effet être lu comme une relativisation de la gravité des faits d’inceste, en des termes déplacés vis-à-vis des victimes et des personnes transgenres", a ainsi a directrice du Monde, Caroline Monnot, estimant que le dessin en question n’aurait pas dû être publié. 

Ce sont ces propos qui ont poussé ce jeudi Xavier Gorce à mettre un terme à un terme à une collaboration de 18 ans. Dans un entretien accordé au site de l’hebdomadaire Le Point, il revient sur le fond de l’affaire. "Ce dessin a été mal compris, il est pourtant clair", estime-t-il. "Je rappelle, à travers ce dessin, que si les structures familiales contemporaines peuvent, certes, brouiller la notion d'inceste, les violences sexuelles et la pédocriminalité restent indiscutablement un crime. C'est un contresens total que d'imaginer que mon dessin serait une quelconque légitimation de ces crimes."

Si on ne doit plus rire des situations douloureuses, je ne vois pas de quoi on va pouvoir rire dans les dessins de presse des années à venir !
Xavier Gorce, dans Le Point

Xavier Gorce refuse de parler de "censure" à son encontre, soulignant que le dessin est question est toujours visible sur son blog, hébergé sur le site du Monde. "Je vois surtout que la susceptibilité des réseaux sociaux a encore frappé !", observe-t-il. "Oui, il y a des communautés qui s'identifient comme victimes de la société, à tort ou à raison, et les communautés transgenres font partie de tous ceux qui n'acceptent pas que l'on fasse de l'humour sur des situations vécues douloureusement… Mais si on ne doit plus rire des situations douloureuses, je ne vois pas de quoi on va pouvoir rire dans les dessins de presse des années à venir !".

Mercredi soir, le dessinateur a publié une ultime contribution sur son blog hébergé par Le Monde. On y voit un pingouin interrogeant l'un de ses congénères : "Vous avez votre passeport sanitaire d'humour ?". 

"Je n'ai aucun compte à régler", a tweeté le dessinateur tard dans la nuit. "Je dis ce que je pense juste, je prends la liberté de le dire, sans entraves, sans contrainte. Et si contrainte, il y a, je vais dessiner ailleurs. Sans haine. Tout est très simple. Je suis dessinateur indépendant".

Au fil de la journée, Xavier Gorce avait également reçu le soutien de plusieurs personnalités comme l'intellectuelle Caroline Fourest, la journaliste Natacha Polony, l'acteur François Morel ou encore le réalisateur Nicolas Bedos. "Non à la censure idéologique, quelle que soit sa couleur. On n’est plus Charlie ?", s'est interrogé ce dernier sur Instagram.


Jérôme VERMELIN

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