Cannes 2017 : la polémique Netflix morte et enterrée ? Thierry Frémaux donne son avis

Jérôme Vermelin, à Cannes
Publié le 17 mai 2017 à 7h40, mis à jour le 17 mai 2017 à 8h16
Cannes 2017 : la polémique Netflix morte et enterrée ? Thierry Frémaux donne son avis

DEBAT – Le 70e Festival de Cannes s’ouvre ce mercredi soir sur fond de polémique entre les professionnels du cinéma français et la plateforme digitale américaine Netflix. La raison ? La présence en compétition de deux films financés par cette dernière qui ne sortiront jamais en salles, même en cas de Palme d’or… Explications et réaction du délégué général, Thierry Frémaux.

"Je ne sais pas ce que c’est qu’une polémique… sinon que la presse écrit beaucoup sur un sujet si bien qu’elle dit après que ça devient une polémique", ironise le délégué général du Festival de Cannes Thierry Frémaux au micro de LCI. Depuis l’annonce de la sélection officielle de cette 70e édition, un nom revient sur toutes les lèvres : Netflix. Deux des films en lice pour la Palme d’or, Okja de Bong Joon-Ho et The Meyerowitz Stories de Noah Baumbach sont effet la propriété de la plateforme américaine qui propose, outre des séries, des long-métrages inédits comme Beast of no nation avec Idris Elba ou Tigre et Dragon 2, la suite du film à succès de Ang Lee. 

Si aux Etats-Unis, la sortie des "films Netflix" peut se faire simultanément en ligne et en salles, c’est impossible en France. La raison ? Notre règlementation unique au monde dite de "chronologie des médias" qui vise à préserver les écrans de cinéma et le caractère exclusif de leur programmation. Elle stipule qu’un film ne peut être vendu ou loué en vidéo à la demande que quatre mois après sa sortie en salles. 10 mois après, il peut passer sur une chaîne payante, 22 mois après sur une chaine gratuite… et seulement 36 mois après sur une plateforme de vidéo à la demande par abonnement. Bref il est tout à fait possible que dans quelques jours, un film primé à Cannes, peut-être même la Palme d’or, soit réservé aux abonnés de Netflix.

Pour les puristes du Septième art, mais surtout les professionnels du cinéma français, l’invitation de ce nouvel acteur des médias à rejoindre la compétition serait une forme de déclaration de guerre déguisée. Ce dont se défend Thierry Frémaux. "Tout l’hiver on nous présente des films. Et on nous en a présenté deux qu’on a trouvé très bien et qu’on a retenu pour la compétition", explique l’intéressé.  "Il se trouve que ces films sont financés par Netflix. Donc effectivement les droits appartiennent à Netflix. C’est après qu’on s’est rendu compte que ces films ne sortiraient pas dans certains pays dont la France. Comme les salles de cinéma ont protesté, avec raison, ça a fait ce que vous appelez une polémique", ajoute le délégué général, refusant de rajouter de l’huile sur le feu pour rappeler son attachement aux cinéastes. En 2009, Bong Joon-Ho était déjà venu à Cannes présenter Mother en sélection Un Certain Regard. A l'époque Netflix n'existait pas encore...

Si certains ont appelé à l’exclusion de Okja et The Meyerowitz Stories, le Festival de Cannes a demandé à la direction de Netflix de faire une entorse à la règle. Et de bien vouloir sortir les deux films en salles. En vain : si elle acceptait de le faire, même sur un circuit limité, elle se contraindrait d’elle-même à attendre 3 ans pour les proposer à ses abonnés français. La faute donc à cette sacro-sainte chronologie des médias qui pourrait faire l'objet d'une prochaine réforme. Tout comme les obligations de financement de la création français auxquelles les plateformes comme Netflix ne sont pas tenues, contrairement aux chaînes de télé. Dans un communiqué, diffusé la semaine dernière, la direction du Festival a pris acte du refus de Netflix. Et annoncé qu’à partir de l’an prochain, tout film qui souhaite concourir à la compétition cannoise devra s’engager à être diffusé sur les écrans de cinéma français. Fin de la polémique ?


Jérôme Vermelin, à Cannes

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