ON ADORE - Satire de la lutte des classes à la fois sombre et jouissive, "Parasite" a impressionné parmi les rangs toujours plus nombreux des admirateurs du réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho. A l’approche de la fin du 72e Festival de Cannes, Terrence Malick, Ken Loach et Quentin Tarantino ont peut-être du souci à se faire…
Si le "Once Upon a Time in Hollywood" de Quentin Tarantino a attiré tous les regards ce mardi avec son casting de stars, un autre film, plus discret mais pas moins réussi, a fait sensation auprès des festivaliers. Parasite, le dernier bijou du cinéaste sud-coréen Bong Joon-Ho, livre un regard acerbe sur la lutte des classes, un thème omniprésent dans la sélection de ce 72e Festival de Cannes.
A Séoul, le jeune Ki-Woo vit avec sa sœur et ses parents dans un infâme gourbis en sous-sol, où il faut grimper sur la cuvette des WC pour capter le Wi-fi. Lorsqu’il décroche un job de prof particulier auprès de la fille du riche Mr. Park, cette famille entrevoit la possibilité de se hisser sur l’échelle sociale. Jusqu’où, comment et à quel prix, c’est tout le sel de ce savoureux film de genre dont la dimension sociétale, omniprésente dans l’œuvre de l’auteur de "The Host" et "Okja", n’a jamais paru plus appropriée.
On vit dans une société où le fossé entre les riches et les pauvres devient sans cesse plus prononcé
Bong Joon-ho
"En l’écrivant, j’éprouvais moins de la colère que de la tristesse", nous confie Bong Joon-ho depuis le rooftop d’un hôtel cannois branché qui contraste avec la tonalité très sombre de son film. "On vit dans une société où le fossé entre les riches et les pauvres devient sans cesse plus prononcé. Et ce qui me rend le plus triste, c’est qu’il s’agit d’un problème qui ne sera jamais résolu de mon vivant", avoue ce bientôt quinquagénaire.
Enfant de la classe moyenne, Bong Joon-jo a étudié la sociologie avant de réaliser ses premiers court-métrages, au milieu des années 1990. "Si sur une échelle de 1 à 10, la maison des pauvres équivaut à 1, et celle des riches à 10, alors j’ai grandi dans une maison entre 5 et 6", raconte-t-il. "En revanche j’avais des amis qui appartenaient à chacune des deux." Ce qui explique sans doute pourquoi il croque les uns et les autres avec le même regard mordant, en équilibre entre l’ironie et la compassion.
Le titre, "Parasite", est une métaphore que le cinéaste déploie tout au long du film de manière astucieuse et parfois radicale, avec un plaisir de mise en scène de tous les instants. "Dès la première scène, où la famille est aspergée de gaz pour tuer les cafards, je joue avec cette image qui s’étend ensuite à l’idée d’une famille qui s’insinue peu à peu chez une autre", raconte Bong Joon-Ho.
"Mais les riches aussi sont des parasites puisque ce sont des gens qui sont incapables de s’en sortir seuls au quotidien. Ils ont besoin qu’on conduise leur voiture, qu’on leur prépare à manger, qu’on donne des cours privés à leurs enfants. Ce sont eux les assistés !", ironise-t-il. Lorsqu’on lui demande s’il choisi son camp, le cinéaste explose de rire : "Non mais attention, j’aime bien les riches moi. J’ai besoin d’eux pour faire des films !".
En salles en France le 5 juin prochain, "Parasite" est un solide candidat au palmarès – un prix du scénario a minima – même si son auteur se montre prudent. "J’ai déjà fait partie d’un jury, à San Sébastien et à Berlin, et je sais que le processus pour élire le meilleur film est quelque chose de vraiment très compliqué et même un peu bizarre. Sans parler du facteur chance qui joue énormément. On verra… Qui sait ?".
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