Garance Marillier : "On connaît tous Zidane, mais c'est honteux qu’on ne connaisse pas tous Marinette Pichon !"

Garance Marillier est en train de nous raconter son bonheur d’incarner Marinette Pichon à l’écran lorsque cette dernière débarque à l’improviste pour la saluer. "Je n’ai même pas eu besoin de la coacher tellement elle est époustouflante !", nous confie l’ancienne championne au sujet de la jeune comédienne qui s’est donnée corps et âme pour être crédible devant la caméra de la réalisatrice Virginie Verrier.

En salles ce mercredi 7 juin, Marinette est l’adaptation de Ne jamais rien lâcher, l’autobiographie de cette légende du sport français, parue en 2018. Première joueuse professionnelle de l’histoire de son sport, la première aussi à signer aux États-Unis, elle a longtemps détenu le record de buts marqués en équipe de France, seulement détrônée par Eugénie Le Sommer en 2020.

L’histoire de Marinette Pichon, c’est aussi une enfance douloureuse, avec un père alcoolique et violent, le ballon rond lui servant d’exutoire puis de porte de sortie vers un destin heureux, lui permettant d'assumer et de vivre pleinement son homosexualité. Devenue mère avec sa compagne grâce à la PMA, elle est aujourd’hui coach au Québec, après avoir officié comme consultante télé.

"Je la connaissais de nom grâce à son record de buts. Mais je ne connaissais pas du tout son parcours personnel", avoue Garance Marillier. "Malheureusement, les femmes dans le sport sont encore trop invisibilisées, même lorsqu’elles ont un destin de vie spectaculaire. On connait tous Zinédine Zidane, mais c’est assez honteux qu’on ne connaisse pas tous Marinette !".

Nommée au César en 2018 pour sa performance stupéfiante dans Grave de Julia Ducournau, Garance Marillier avait toute l’intensité requise pour interpréter cette championne hors norme. Ce dont on ne se doutait pas, c’est de sa passion de longue date pour le ballon rond. Fan du PSG féminin de Marie-Antoinette Katoto, "un peu moins des mecs qui commencent à me fatiguer", elle fait partie depuis deux ans du Gadji FC, une équipe amateure de la capitale. 

"J’ai grandi avec un frère fan de foot qui m’a appris à jouer sinon il n’avait personne avec qui taper dans le ballon", raconte-t-elle en souriant. "Comme dans le film, j’ai vécu ce truc dans la cour d’école, où les garçons ne te choisissent jamais. Et puis quand ils comprennent que tu es un peu forte, ils t’intègrent à l’équipe. Mais bien sûr je n’ai jamais poussé le délire aussi loin que Marinette."

Pour donner le change à l’écran, Garance Marillier s’est astreinte à un entraînement quotidien, très en amont du tournage. "C'était essentiel de soigner les détails. Les appuis, les changements de position, évidemment la frappe. Les appels et tout le jeu sans ballon", souligne-t-elle. "J’ai aussi fait un renforcement musculaire par ce que je n’avais pas la condition physique de base. Pendant six mois, je ne pouvais ni boire ni sortir le soir, au risque de le payer cher le lendemain matin !".

Pour la comédienne, réduire le film à sa dimension sportive serait bien évidemment réducteur. "Marinette a été messagère de plein de combats précurseurs dans la société et c’est important de continuer à les défendre", insiste-t-elle. "On a l’impression que les choses ont changé ? En réalité, pas tant que ça. Regardez les chiffres des violences faites aux femmes. La lutte contre l’homophobie aussi. Les gens continuent de souffrir et un film comme celui-là leur offre une représentation positive".

Garance Marillier révèle que depuis le début de la promo de Marinette, la nouvelle direction de la Fédération française de football a contacté l’équipe du film, qui dénonce l'inégalité de statut entre les hommes et femmes. Et pour cause : ces dernières ne bénéficient toujours pas du statut professionnel leur permettant de vivre pleinement de leur passion. À l'initiative de Philippe Diallo, le successeur du controversé Noël Le Graët, une ligue professionnelle doit enfin voir le jour à l'été 2024, avec des dotations en hausse. Mais elle s'est fait attendre selon l'actrice. 

"Aujourd'hui, c’est quand même affligeant de se dire que la dernière finale de Coupe de France féminine s'est disputée dans un stade de 6000 places à Orléans alors que la finale masculine se jouait Stade de France devant Macron !", déplore-t-elle. "Avant, on se cachait derrière l’argument selon lequel le foot féminin n’intéressait pas. Mais en Espagne, le Camp Nou est rempli pour des matches de Liga. Pareil à Wembley en Angleterre. La France n’a plus d’excuses. C’est une histoire de volonté, c’est politique !".

>> Marinette de Virginie Verrier. Avec Garance Marillier, Emilie Dequenne, Alban Lenoir. 1h36. En salles mercredi.