Jean-Pascal Zadi nommé aux César 2021 : "Sortir 'Tout simplement noir', c’était un acte politique !"

Propos recueillis par Jérôme Vermelin
Publié le 10 février 2021 à 15h41, mis à jour le 10 février 2021 à 18h12

Source : Sujet TF1 Info

INTERVIEW – Avec deux nominations à la 46e cérémonie des César, qui se déroulera le 12 mars prochain, la belle histoire de la comédie "Tout simplement noir" continue. Jean-Pascal Zadi, son interprète principal et co-réalisateur, s’est confié à LCI.

C’est l’un de succès inattendus de 2020. Dans Tout simplement noir, co-réalisé par John Wax, Jean-Pascal Zadi se met en scène dans la peau d’un comédien un brin loser qui tente d’organiser une marche des Noirs avec l’aide de ses copains du showbiz. Sorti le 8 juillet dernier, ce vrai-faux documentaire à la fois drôle et politique a réuni plus de 700.000 spectateurs dans un contexte difficile. Nommé au César du meilleur premier film et de la révélation masculine, il a livré sa première réaction à LCI.

Ces deux nominations, ça fait doublement plaisir ?

Ça fait très plaisir, oui. Je le reçois comme un encouragement, un message très positif en tout cas. Quand on se lève du mauvais pied, et qu’on reçoit une nouvelle comme ça, la journée s’annonce beaucoup mieux !

Pourquoi, vous vous étiez levé du mauvais pied ?

Exactement ! Mes deux gosses s’étaient embrouillés et quand j’ai appris les nominations, ça m’a mis de bonne humeur. 

Tout simplement noir est sorti cet été, dans un contexte incertain en raison de la pandémie. Au final il a attiré plus de 700.000 spectateurs. Est-ce qu’on peut dire que c’est un pari réussi ? 

Je dirais même que c’était une bonne chose de sortir à ce moment-là parce que ça a égayé l’été. L’ambiance en France était hyper morbide, les gens ne voulaient pas sortir de chez eux… Je pense même que c’était un acte politique. Dans le sens aussi où il fallait avoir des couilles : on ne savait pas si le public serait au rendez-vous ! C’est fou, mais je dirais même que c’est là que le cinéma prend tout son sens. La société est morose, elle est dans une mauvaise vibe. Et nous on a dit "Bam ! Venez, on sort un film et on rigole tous ensemble !".

Le regard change. Quand on regarde la liste des acteurs et qu’on ne voit que des Blancs, on se dit qu’il y a peut-être un problème
Jean-Pascal Zadi

Vous êtes nommé au César du meilleur espoir masculin à 40 ans passé. Il était temps, non ? 

(Rires). Pour moi ce n’est pas une question d’âge. Révélation, ça veut dire que c’est le moment où tu révèles. On peut se révéler à 50 ans ou à 60 ans ! Moi, il se trouve que c’est arrivé à 40 ans parce que j’ai eu un chemin atypique. 

C’est vrai que vous avez toujours voulu tourner vos propres films, vos propres histoires, à votre manière…

C’est clair. D’ailleurs, cette nomination je ne la prends pas personnellement. Je la prends pour tous les gens qui ont galéré, qui ont même fait des trucs nuls avant. C’est la preuve qu’il faut continuer, qu’il ne faut pas avoir peur de douter parce qu’à un moment donné viendra l’éclair. Ça fait un peu Cabrel ce que je viens de dire, non ? (Rires).

Ces nominations renvoient aussi au discours du film. Avec la jeune Fathia Youssouf dans Mignonnes, vous êtes deux comédiens noirs en lice cette année. C’est encore trop peu ? 

Je ne suis pas dans ce truc de vouloir forcer absolument la représentation. Ce qui est bien, finalement, c’est que nous sommes deux. Ça prouve que le regard change. Quand on regarde la liste des acteurs et qu’on ne voit que des Blancs, on se dit qu’il y a peut-être un problème. Je prends ça comme un bon point de départ. C’est comme #MeToo. Même si on n’est pas un agresseur sexuel, on fait attention à son comportement avec les meufs. De même qu’il y a des blagues qu’on n’ose même plus faire. Pour revenir à ces deux nominations, c’est déjà pas mal. Peut-être qu’il y en aura plus l’année prochaine. Mais moi je me rappelle de l’époque où il y en avait zéro !

En cas de victoire, c’est ce que vous direz dans votre discours ? 

On n’en est pas là ! Non, si je gagne j’essaierais de dire quelque chose qui me ressemble.

Ça va mettre du temps, mais je suis persuadé que les spectateurs reviendront, même si la consommation des films est différente
Jean-Pascal Zadi

Avez-vous un nouveau film en préparation ? 

Je suis en train d’écrire un nouveau film avec mon acolyte de Tout Simplement Noir, John Wax. On devrait tourner dans le courant de l’année. Et j’ai une série qui s’appelle Carrément Craignos qui va arriver sur la plateforme FranceTV au mois de mars. C’est la suite de la série Craignos sortie l’année dernière, avec Eric Judor, Rossy de Palma, que du beau monde !

Les salles de cinéma sont fermées depuis plus de 100 jours consécutifs. Êtes-vous inquiet pour l’avenir ?

Non ! Je ne suis pas du tout inquiet pour l’avenir du cinéma. Je pense qu’il est beaucoup plus grand que la crise sanitaire. Il existe depuis les frères Lumière quand même ! Mais cette crise nous rappelle, à nous les êtres humains, que nous ne sommes pas grand-chose, et nous, qui travaillons dans le cinéma, que notre métier est très précieux. Qu’il faut respecter les spectateurs et les films que l’on fait. Ça va mettre du temps, mais je suis persuadé que les spectateurs reviendront, même si la consommation des films est différente avec les plateformes, etc. Mais l’événement d’aller au cinéma avec ta petite meuf ou ton mec, de manger ensemble du popcorn, ça ne sera jamais démodé. 


Propos recueillis par Jérôme Vermelin

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