L’acteur Reda Kateb est à l'affiche du film "Les Promesses" de Thomas Kruithof.Il incarne le directeur de cabinet d'une maire de banlieue jouée par Isabelle Huppert.Un rôle subtil qui lui a fait découvrir l’envers du décor de la politique.
C’est un acteur caméléon, bluffant en toutes circonstances. Un Prophète, Hippocrate, Django, Hors Normes… À chaque fois, Reda Kateb change de registre et d’univers avec la même conviction. Dans Les Promesses, le nouveau film de Thomas Kruithof en salle le 26 janvier, il incarne Yazid, le directeur de cabinet de Clémence, une maire de banlieue interprétée par Isabelle Huppert. Un binôme à l’alchimie complexe qui tente par tous les moyens d’obtenir la rénovation d’une cité insalubre. L’occasion pour l’acteur de découvrir l’envers du décor du monde politique…
Ce film sort au début d’une année très politique, avec la perspective de la présidentielle. C’est un plus, non ?
En tout cas il aborde la politique sur un autre mode que le sempiternel 'Tous pourris !'. Ou cette idée que l’élection d’une personne peut tout changer pour tout le monde, le côté homme providentiel ou femme providentielle d’ailleurs. Dans ce film, on est sur le terrain, avec des gens dévoués qui en même temps sont au cœur d’un jeu, qui a lui-même ses rouages. Et on essaie de les suivre à travers cette histoire qui est un peu comme un thriller de politique locale, quoi !
Comment pourriez-vous décrire Yazid, votre personnage ?
Yazid est un professionnel au service des politiques, mais ce n’est pas lui-même un politique. Il n’a pas été élu. Mais il assure plusieurs missions de conseil auprès de la maire, tout en gérant lui-même des dossiers, en recevant les familles par exemple… Il est protégé par l’ombre dans laquelle il est. Il n’est jamais sur le devant de la scène et les critiques ne lui sont pas adressées directement. Je pense qu’il est en train de construire son futur d’homme politique. C’est du moins comme ça que je l’ai imaginé lorsque commence le film.
Yazid n’est ni naïf, ni cynique. Il joue le jeu du politique, quitte à parfois se salir les mains
Reda Kateb
Comment l’avez-vous nourri en amont du tournage ? Avez-vous rencontré de vrais directeurs de cabinet ?
J’ai notamment rencontré le directeur de cabinet de la ville de Clichy-sous-Bois où nous avons tourné une grande partie des scènes. C’était très intéressant de comprendre son métier rien qu’à travers son planning, du moment où il se lève le matin à celui où il se couche le soir. Je me suis vite rendu compte que ça déborde de partout, que sur son bureau il y avait un nombre de dossiers impressionnant, et que c’est un métier où on donne beaucoup. Au maire pour lequel on travaille, mais aussi aux administrés. Pour Yazid, ce film est en quelque sorte le prologue de sa vie d’homme politique.
Est-ce un peu plus qu'un personnage de cinéma ?
Pour moi, c'est totalement un personnage de cinéma, il intervient dans une histoire qui est stylisée, il y a une recherche de suspense et de tension. Et en même temps il correspond à quelque chose de très contemporain. Des Yazid, je pense que dans les mairies, dans les cabinets ministériels, il commence à y en avoir beaucoup. Des personnes issues de l’immigration qui par leur travail, leurs études, sont parvenues à une forme de réussite sociale et à faire partie des élites. Mais aussi parce qu’ils peuvent être instrumentalisés puisqu’à travers eux, les politiques peuvent parler aux électeurs issus de l’immigration et les ramener vers les urnes. Yazid, dans le film, n’est ni naïf, ni cynique à ce niveau. Il joue le jeu du politique, quitte à parfois se salir les mains. Il sait qu’une promesse non tenue n’est pas un mensonge. Mais il a la conviction qu’on peut changer des choses en faisant ce métier.
Un acteur ne va jamais vous vendre que votre vie va changer si vous mettez un bulletin dans l’urne, quand bien même ce serait celui des César !
Reda Kateb
Est-ce qu’il vous arrive de regarder un politique à la télé et de vous dire "lui, c’est un bon acteur" ?
Je ne me dis jamais ça, non. Les acteurs sont les acteurs et les politiques sont les politiques. Un acteur n’est pas là pour séduire et emballer tout le monde sur son passage. Il est là pour participer à raconter des histoires, à amener de la vérité et en même temps du jeu, du spectacle. Mais il ne va jamais vous vendre que votre vie va changer si vous mettez un bulletin dans l’urne, quand bien même ce serait celui des César ! Le politique est dans un autre jeu. Et je préfère vraiment être acteur.
Mais le politique utilise des trucs de l’acteur, non ?
Si vous parlez de l’éloquence, de la maîtrise de soi, oui. Mais c’est le cas aussi pour un avocat, un professeur, n’importe qui s’adressant à un public. Sauf que pour moi l’acteur, c'est en partie tout le contraire. Ce n’est pas quelqu’un qui a une maîtrise de ses effets, sciemment. Nous les acteurs, nous sommes des interprètes, dans une histoire racontée par un metteur en scène, et ça nécessite de lâcher prise.
Chez le politique, il y a moins de nuances. Alors dans le métier d'acteur, on explore les zones grises, non ?
Oui, même s’il y a des politiques chez qui il y a des nuances. Mais le politique qui ne vous vend que des zones de gris ne sera jamais élu ! C’est un métier qui fonctionne sur ce jeu de dupes que sont les promesses. Avec chaque président, chaque campagne, il y a ce moment d’enthousiasme, suivi par un moment de déception. Et à la fin, on fait les comptes en regardant celui qui a le plus déçu et celui qui a réussi à faire deux ou trois trucs. Mais en général l’écart est grand. Ce qui est bien avec le film, c’est qu’on est vraiment dans la politique locale, au sein d’une ville, et c’est très différent de la politique nationale.
S’il y avait un gouvernement des acteurs, Isabelle Huppert en serait la présidente ?
Oui, ça pourrait être la présidente, la reine, l’impératrice. Comme vous voulez, mais quelque chose qui force le respect. Vraiment. Dans son histoire, dans son parcours. Dans la manière dont elle continue de vivre ce métier avec passion. J’ai fait des journées de tournage entières avec elle et je peux vous dire qu’elle est toujours à fond !
>> Les Promesses de Thomas Kruithof. Avec Isabelle Huppert, Reda Kateb, Naidra Ayadi. En salles le 26 janvier
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