Comment la CIA a failli tuer un innocent avec la chanson d'un boys band

Publié le 16 octobre 2015 à 13h27
Comment la CIA a failli tuer un innocent avec la chanson d'un boys band

CAUCHEMARDESQUE – Un rapport d'une ONG américaine révèle que la CIA utilisait une chanson d'amour du boys band irlandais Westlife pour torturer l'un de ses prisonniers, au début des années 2000. Un pêcheur tanzanien, qui tentera de mettre fin à ses jours, avant d'être libéré huit ans plus tard. Innocenté mais victime de troubles irréversibles...

Longtemps niés, les actes de torture exercés par les services de renseignements américains, dans leur guerre contre le terrorisme, sont aujourd'hui révélés au grand jour. Dans un rapport intitulé "Out of the Darkness" , l'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), une ONG qui défend les droits individuels, garantis dans la constitution des Etats-Unis, décrit comment la CIA a presque poussé à bout un prisonnier suspecté d'être une menace pour l'Amérique. Les faits remontent à 2003. Suleiman Abdullah, un pêcheur tanzanien, est livré à la CIA par un seigneur de guerre somalien. Et plus précisément à James Michell et Bruce Jessen, deux anciens psychologues de l'US Army qui ont mis au point une méthode d'interrogatoire pour le moins "musclée".

Un mélange radical avec du heavy metal

Plongé dans l'eau froide, pendu à un crochet et tabassé, Suleiman Abdullah se voit infligé l'écoute, à plein volume, d'un cocktail musical surprenant : entre les assauts de guitare de plusieurs groupe de heavy metal, les tortionnaires intercalent des extraits de "My Love", la chanson du boys band Westlife. "Suleiman avait épousé Magida, sa compagne, deux semaines avant d'être arrêté en Somalie où il avait établi ses activités de pêche", peut-on lire dans le rappeur. "Lorsqu'elle lui faisait écouter ce morceau, la CIA lui expliquait qu'il ne la reverrait jamais." 

Pendant de longs mois, le prisonnier va être privé de nourriture et de sommeil, et enfermé dans de petites boites afin qu'il explique les raisons de sa présence en Somalie. A bout, il va tenter de se suicider avant que ses gardes le transfèrent, cagoulé et menotté vers une prison de la CIA. Deux ans et demi plus tard, il sera transféré dans une prison de l'armée américaine en Afghanistan. Jusqu'en 2008 où il obtiendra sa libération et son retour au pays, en échange d'une lettre assurant qu'il ne représente aucune menace pour l'Amérique.

Il n'a jamais retrouvé sa femme

Sa famille, en revanche, a été tuée pendant sa captivité. Et sa femme Magida n'a jamais été retrouvée. Incapable de se nourrir normalement depuis, victime de graves troubles psychologiques, Suleiman Abdullah est aujourd'hui soutenu par l'Union américaine pour les libertés civiles qui l'a aidé à déposer plainte, avec deux autres anciens prisonniers de la CIA, contre ses tortionnaires, qui devraient être jugés à Washington avant la fin de l'année.

Interrogé sur la radio irlandaise RTE2fm, Kian Egan, l'un des anciens membres de Westlife a réagi au rapport de l'ONG. Qu'il a lu avec attention. Et un certain effroi : "Notre chanson lui était jouée en boucle et il finissait par craquer au bout de deux heures" , assure celui qui officie désormais en tant que coach dans l'édition irlandaise de "The Voice". Lui-même "fan de Metallica qu'il "écoute en boucle", il avoue que "le heavy metal et les boys band sont deux genres musicaux extrêmes. Je peux comprendre pourquoi ils étaient utilisés (par la CIA – ndlr)." 

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Jérôme VERMELIN

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