Cannes 2022 : le cinéma ukrainien mis à l’honneur… le Russe Serebrennikov aussi

Publié le 15 avril 2022 à 14h03, mis à jour le 16 mai 2022 à 20h48

Source : Sujet TF1 Info

La 75e édition du Festival de Cannes ne manque pas de faire à écho à la guerre en Ukraine.
Deux cinéastes, dont le vétéran Sergei Loznitsa, y présenteront leurs nouveaux films.
Le Russe Kirill Serebrennikov, ennemi du Kremlin, sera lui aussi présent sur la Croisette du 17 au 28 mai.

C’est un symbole fort. Dans la sélection du 75e Festival de Cannes, dévoilée jeudi, figurent deux réalisateurs ukrainiens, le vétéran Sergei Loznitsa et le jeune Makism Nakonechnyi, mais aussi leur confrère russe Kirill Serebrennikov. Interrogé sur la présence des deux premiers, le délégué général Thierry Frémaux a expliqué à la presse qu’elle relevait d’abord d’un choix "artistique", même si le contexte de la guerre lui donnait un relief particulier.

Sergei Loznitsa, 57 ans, est un habitué de la Croisette où il a présenté de nombreux films comme le documentaire Maïdan (2014), consacré à la révolution ukrainienne, mais aussi la fiction Donbass (2018) où il racontait la guerre avec les séparatistes russes sur un mode à la fois tragique et grotesque. En mars dernier, en réaction à l’invasion de son pays, il n’avait pas hésité à qualifier la Russie d’"héritière officielle de l’URSS", appliquant "les mêmes méthodes envers les Républiques qui l’environnent".

Des "bons films" avant tout

Cette année à Cannes il dévoilera en séance spéciale The Natural History of Destruction, un film basé sur un texte de l'essayiste allemand W.G. Sebald (1944-2001), dans lequel est décrit le phénomène de la destruction massive de la population civile et des villes allemandes par les raids aériens massifs des Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale.

Son compatriote Maksim Nakonechnyi défendra lui en section "Un certain regard" son premier film, Butterly Vision, qui la raconte l’histoire d'une jeune enseignante "qui s'est engagée dans la guerre et a été enlevée". Elle "revient dans le pays au profit d'un échange de prisonniers", a expliqué Thierry Frémaux, insistant qu’il ne l’avait pas retenu "pour rendre hommage à l’Ukraine", mais "parce que c’est un très bon film."

Serebrennikov enfin libre

Celui qu’on n’attendait pas forcément cette année sur la Croisette, c’est le Russe Kirill Serebrennikov. Depuis plusieurs années, ce metteur en scène de théâtre et de cinéma de 52 ans ne pouvait plus sortir de son pays. Accusé de détournement de fonds publics, ce qu’il a toujours nié, il n’avait pas vu venir défendre Leto en 2018 et La fièvre de Petrov l’an dernier.

"Si vous vous sentez libre, vous pouvez l'être, même en état d’arrestation", nous avait-il confié alors qu'il tournait son prochain film. "Votre liberté est dans votre cerveau. On peut avoir des ennuis, des difficultés avec le monde extérieur. Mais pour un artiste, tout ça ce n’est rien. Les vrais problèmes sont dans sa tête."

Finalement condamné à une peine de prison avec sursis symbolique, Kirill Serebrennikov a quitté "légalement" la Russie le mois dernier pour s’installer à Berlin. Déjà invité à faire l’ouverture du Festival d’Avignon cet été avec l’adaptation d’une nouvelle de Tchekhov, il sera en lice à Cannes pour la Palme d'or avec Tchaïkovsky’s Wife, un drame qui raconte, au XIXe siècle, la relation complexe entre le célèbre compositeur et sa jeune épouse, Antonina Miliukova.

En amont de l’annonce de la sélection officielle, le Festival de Cannes avait indiqué qu’aucune délégation officielle russe ne serait acceptée sur les marches. Le cas de Kirill Serebrennikov est évidemment plus particulier puisque s’il n’est pas un opposant déclaré à Vladimir Poutine, ses positions pro-LGBT notamment en font depuis plusieurs années déjà une critique implicite du Kremlin.


Jérôme VERMELIN

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