Festival de Cannes

Cannes 2023 : On a vu "Killers of The Flower Moon" de Martin Scorsese… et c’est immense !

par Jérôme VERMELIN à Cannes
Publié le 21 mai 2023 à 7h16, mis à jour le 21 mai 2023 à 13h55
JT Perso

Source : TF1 Info

Le 76ème Festival de Cannes accueillait samedi soir la première mondiale de "Killers of The Flower Moon" de Martin Scorsese.
Une fresque épique, vénéneuse et très politique sur un pan méconnu de l'Histoire des États-Unis d'Amérique.
L'occasion d'un face-à-face d'anthologie entre Leonardo DiCaprio et Robert de Niro, les deux acteurs fétiches du cinéaste.

C’est une projection de presse archi-bondée à laquelle nous avons assisté ce samedi à Cannes, quelques heures avant que l’équipe de Killers of The Flower Moon monte les marches du Palais des Festivals. Sur la Croisette, le nouveau film de Martin Scorsese est présenté hors-compétition. C’est dommage, car en sortant de cette fresque épique de 3h26, intense, cruelle et très politique, on s’est tout de suite dit qu’une deuxième Palme d’or était à portée de main pour le cinéaste, 47 ans après Taxi Driver, déjà avec Robert De Niro.

Nous sommes au début des années 1920, en Oklahoma, où les Amérindiens de la tribu Osage, chassés de leur terre originelle, ont fait fortune en découvrant d’importants gisements du pétrole. Toutefois, avec la complicité du gouvernement, les autorités locales ont mis en place un système de tutelle qui profite à de vils spéculateurs blancs qui n’hésitent pas à épouser les jeunes filles pour faire main basse sur leur argent.

C’est au moment où plusieurs membres de la tribu sont retrouvés de mort de manière inexpliquée que débarque Ernest Burkhart, un jeune vétéran interprété par Leonardo DiCaprio. Il vient trouver refuge chez son oncle William Hale, un patriarche en apparence bienveillant incarné par Robert De Niro. Sur ses conseils, Ernest épouse la douce Mollie, après lui avoir servi de chauffeur. Jusqu’au jour où l’une de ses sœurs est retrouvée assassinée…

Killers of The Flower Moon est l’adaptation d’une enquête du journaliste David Grann, paru en 2018. Fasciné par ce pan méconnu de l’Histoire des États-Unis, Leonardo DiCaprio en a aussitôt acheté les droits avant de proposer à Martin Scorsese de réaliser le film. On comprend vite pourquoi. Si le maître n’avait jamais tourné de western, on retrouve ici quelques-uns de ses thèmes de prédilection comme le crime organisé, la famille ou encore la frontière qui sépare le bien du mal.

Apple Studios

Profitant d’un confortable budget de plus de 200 millions de dollars, le cinéaste new-yorkais a soigné sa reconstitution, ample et minutieuse. Sur les pas du personnage d’Ernest qui débarque en train, le spectateur explore l’Ouest américain comme s’il avait mis les pieds dans une machine à remonter le temps. Tout sonne vrai, des décors aux costumes en passant par la langue traditionnelle que tous les comédiens ont apprise avec soin.

Passé le test de crédibilité, Killers of The Flower Moon séduit par son implacable mécanique de film noir. Sous l’emprise du charismatique William Hale, que tout le monde surnomme King, le couple formé par Ernest et Mollie se retrouve pris au piège d’un terrible engrenage, ponctué d’explosions de violences, et rythmé par la BO de Robbie Robertson, une partition blues-folk d’une beauté vénéneuse. 

De Niro et DiCaprio face-à-face, quel bonheur !

Et puis il y a le bonheur de retrouver face-à-face deux des plus grands acteurs américains de tous les temps, 30 ans après Blessures Secrètes. Dans l’une de ses meilleures performances depuis des lustres, Robert de Niro s’en donne à cœur de joie en vieux dandy du Far West face à un Leonardo DiCaprio épatant en idiot du village. Et c'est souvent jouissif. Face à ces deux monstres sacrés, la révélation Lily Gladstone, dans le rôle de Mollie, séduit par son mélange de candeur et de gravité. On peut déjà cocher son nom pour les prochains Oscars.

Enfin, ce chef-d'œuvre tardif est sans doute l’un des films les plus engagés de la carrière de Martin Scorsese. Il tend un miroir honteux à l’Amérique, bâtie sur l’expropriation brutale de la terre des Indiens. Dans l’histoire vraie qui nous est racontée, elle se double d'une entreprise raciste sur laquelle les autorités fédérales ont longtemps fermé les yeux, jusqu’à la création du FBI dont on découvre ici l’une des premières enquêtes majeures. 

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Au début de la séance, une poignée d’irréductibles a sifflé le logo d’Apple. On est tenté de leur rappeler que sans le géant de la tech, le dernier bébé de Martin Scorsese n’existerait pas puisqu’aucun studio traditionnel n’a eu le courage, ni les reins financiers suffisants, pour en accompagner la naissance. On est revanche d’accord avec eux pour dire qu’un tel spectacle doit se déguster sur un écran géant. Ils ont été entendus puisqu’après cette avant-première sur la Croisette, il sortira en salles chez nous le 23 octobre prochain, en amont de sa diffusion en streaming.

>> Killers of The Flower Moon de Martin Scorsese. Avec Leonardo DiCaprio, Robert de Niro, Lily Gladstone. 3h26


Jérôme VERMELIN à Cannes

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