"Il a beaucoup ri !" : Anne Fontaine raconte la projection de "Présidents" avec François Hollande

Propos recueillis par Jérôme Vermelin
Publié le 17 juin 2021 à 18h02
"Il a beaucoup ri !" : Anne Fontaine raconte la projection de "Présidents" avec François Hollande

Source : Universal

INTERVIEW – C’est le 30 juin qu’on pourra découvrir en salles "Présidents", la comédie d’Anne Fontaine ou Jean Dujardin et Grégory Gadebois incarnent Nicolas et François, deux anciens chefs de l’Etat en retrait de la vie politique. La réalisatrice nous a révélé que l’un de ses deux modèles avait déjà vu film. Mais pas l'autre.

C’est dans un hôtel à deux pas de l’Elysée que la réalisatrice Anne Fontaine nous a donné rendez-vous pour parler de Présidents, une comédie détonante en salles le 30 juin. Jean Dujardin y incarne Nicolas, un ancien chef de l’Etat qui face à la situation politique du pays, essaie de convaincre François, son successeur au pouvoir joué par Grégory Gadebois, afin d’envisager une candidature commune pour sauver la France. Toute ressemblance avec des personnages ayant véritablement existé n’est donc pas fortuite. Et la réalisatrice et cinéaste l’assume à 100%.

Le point de départ de Présidents colle furieusement à l’actualité, puisqu’il se déroule à l’approche de l’élection présidentielle où Marine Le Pen semble en mesure de battre Emmanuel Macron. C’est un petit plus qu’une comédie ? 

Ce que je voulais, c’est faire une comédie dans un univers à la fois imaginaire et vraisemblable. Ça parle donc de la situation de France, sans être didactique, ni militant. Il y a deux présidents, qui ont gouverné de la France, à une période proche de nous, deux personnages antinomiques, des rivaux assez virulents. Et l’idée, c’était de les prendre dans l’état particulier d’inaction lié au fait qu’ils ne sont plus aux commandes. J’ai imaginé que l’un des deux, Nicolas, serait dans un état un peu dépressif – il passe l’aspirateur, il va promener le chien, il est sous la coupe d’une femme envahissante qui chante toute la journée à tue-tête des airs d’opéra. Et il a ce déclic de l’ombre portée par l’extrême droite sur l’avenir de la France. C’est ce qui le meut pour inventer l’idée d’un aigle à deux têtes pour sauver le pays, et d’aller voir celui qui coule des jours heureux, en Corrèze, la terre des présidents, et qui a rejeté toute velléité de retour en politique. Donc forcément vous partez de quelque chose de réel. Et en même temps vous inventez un univers parallèle où ces deux êtres vont se rencontrer et entretenir un rapport très enfantin, très drôle, comme un Bourvil et un Louis de Funès, un tandem de comédie. 

Où avez-vous placé le curseur de l’invention ? 

Mais c’est ça écrire ! Il fallait rappeler le modèle et en même temps s'en libérer, parce que sinon ça devient de l’imitation ou un biopic, et ça n’avait pas d’intérêt pour moi. Ce qui m’intéressait, c’est d’explorer une zone dans laquelle on ne va pas d’habitude. Mettre mes présidents sur un tracteur ou sur une bicyclette et construire leur relation à partir de quelque chose de très agressif entre eux. Ce que je voulais, c’est les voir lâcher leur devanture et montrer la fragilité des êtres. On ne les a jamais vus comme on les voit dans le film… et on est content de les voir autrement !  Comme lorsqu’ils se mettent à chanter Francis Cabrel tout à coup. Est-ce que c’est possible ? Ben oui, c'est possible !

Pourquoi avez-vous choisi Jean Dujardin et Grégory Gadebois ? 

Ils ne ressemblent pas à leurs modèles et c’est ça qui m’a paru intéressant dès le début. Je respecte le travail des chansonniers, mais c’est autre chose. Ce que je voulais, c’est deux comédiens qui composent par l’intérieur avec les gestes, la diction, le charme. Ils ne devaient pas en faire trop, ne pas saturer avec l’imitation. On a travaillé ce dosage ensemble. Grégory, par exemple, je lui avais donné comme indication d’être un peu professoral. De prendre les gens un peu de haut. C’était la base à partir de laquelle jouer la comédie. Jean Dujardin, lui, c’est incroyable la subtilité avec laquelle il fait son personnage. Pour moi, on le voit plus Nicolas que s’il avait imité le président.

Avez-vous eu besoin de les recadrer parfois sur le tournage ? 

Heureusement ! Tout n’est pas parfait lorsqu’on arrive sur un plateau. On cherche, on trouve, on fait moins, on rit, on regarde si ça nous amuse nous. On essaie que ce soit joyeux mais en même temps c’est un travail d’orfèvre parce qu’il y a cette responsabilité double d’être le personnage tel qu’il est écrit dans le scénario et d’avoir la source d’inspiration qui est tacitement là, sans être omniprésente.

Je crois que Nicolas S. est intimidé à l'idée de se voir

Anne Fontaine

Les modèles de vos personnages ont-ils vu le film ? 

Je l’ai montré à l’un des présidents, François H. Et pour l’instant c’est le seul qui l’a vu. J’étais dans la salle et il a beaucoup ri. Il est venu m’en parler après et il a trouvé le film très réussi. Je pense qu’il n’a pas été gêné par sa représentation, même si évidemment elle est quand même très libre. Elle est "inspirée de", mais en même temps, c'est autre chose. 

Et Nicolas S. alors ? 

Non, il ne l’a pas encore vu mais il a énormément d’admiration pour Jean Dujardin, a-t-il dit. Et je crois qu’il est plus intimidé à l’idée de se voir. Mais ce n’est pas mon but de le forcer à voir le film. Mais je pense qu’il le fera…

Emmanuel Macron en prend pour son grade dans le film. Allez-vous lui montrer

Je pense qu’il est au courant qu’il y a un film qui s’appelle Présidents, avec s. Et qu’il aura peut-être la curiosité de se demander ce que c’est.

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Lorsque vous regardez les politiques à la télé, vous avez l’impression de regarder des acteurs ? 

Je ne suis pas complètement déconnectée du sens de ce qu’ils disent, mais ça me fascine parce que oui, ce sont des acteurs. Des bons, des mauvais, des tocards. Il y a tout. Des charismatiques, des raseurs, tout. C’est d’autant plus fascinant que la façon de jouer un rôle est souvent déterminante dans la carrière d’un homme politique. 

C’est un film qui peut réconcilier avec la politique ?

J’ai présenté le film il y a quelques jours en province et certains spectateurs m’ont dit : 'On n’a pas rit comme ça depuis une éternité !'. D’autres que 'ça fait du bien'. J’imagine que si ça fait du bien, c’est que ça donne plutôt de l’espoir. Parce que le film raconte l’histoire de deux hommes qui sont plutôt en hostilité intellectuelle et qui parviennent à trouver un chemin d’entente. Je pense que de ce point de vue-là, c’est positif. On aime leur duo et on ne peut pas choisir l’un contre l’autre.

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"Le cinéma, c’est la vie en mieux", c'est le podcast qui va vous donner envie de retourner au ciné. Dans chaque épisode, Jérôme Vermelin part à la rencontre des acteurs, des réalisateurs, des producteurs et de tous ceux qui font l’actualité du Septième art. Ils partagent avec lui leur passion du métier. Les films qui leur ont donné envie de sauter le pas. Et leurs petits secrets de tournage...


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