Interdit aux moins de 18 ans : "Antichrist", "Baise-moi", "Nymphomaniac"... ces films que les mineurs ne peuvent pas voir

Publié le 9 février 2017 à 22h52
Interdit aux moins de 18 ans : "Antichrist", "Baise-moi", "Nymphomaniac"... ces films que les mineurs ne peuvent pas voir

ENQUÊTE - Les films contenant des scènes de "sexe non simulé" ne seront plus automatiquement interdits aux moins de 18 ans, selon un décret modifiant les critères de classification des films publié jeudi au Journal Officiel. Une piqûre de rappel s'impose sur ces films que les mineurs ne peuvent pas voir.

Ce décret entend adapter les textes après une série de procédures en justice engagées par l'association Promouvoir, proche des catholiques traditionalistes, afin de relever l'âge autorisé pour voir des films. Il modifie un article du code du cinéma qui entraîne aujourd'hui une interdiction automatique d'un film aux mineurs lorsque celui-ci "comporte des scènes de sexe non simulées ou de très grande violence".
  

Cette mention sera désormais supprimée, afin de redonner plus de liberté d'appréciation à la commission de classification des films du Centre national du cinéma (CNC), chargée de donner des avis.

Depuis Baise-moi, sorti en 2000, l'interdiction aux moins de 18 ans a fait son retour en France. La preuve dernièrement avec Antichrist de Lars Von Trier. Voici la liste des films que les mineurs ne peuvent pas voir dans une salle de cinéma.

BAISE-MOI (Virginie Despentes & Coralie Trinh Thi, 2000)

Histoire: Nadine et Manu sont deux filles dingues, appliquées au possible, voire perfectionnistes. Elles ont plusieurs points communs : le sexe extrême, la drogue, la bière et la gachette. Elles arrangent les problèmes à coups de flingue et gare à ceux qui se mettent sur leur passage...

Pourquoi ? Baise-moi a été un cas inédit, instigateur de la désormais célèbre "interdiction aux mineurs". Avant l'interdiction aux moins de 18 ans, le décret en vigueur était celui de 1990 qui ne prévoyait aucune mesure entre l'interdiction aux moins de 16 ans (au besoin avec avertissement) et le X. Dès avant la proclamation de ce décret 2001, le Syndicat Français de la Critique de cinéma et bien d’autres organisations de professionnels du cinéma étaient contre sa rédaction. Historiquement, ce décret a été promulgué pour sortir d’une impasse vis-à-vis de la refonte du Code Pénal de 1994 interdisant de laisser la moindre message pornographique à portée des mineurs de moins de 18 ans. Ce qui était le cas de Baise-moi avec ses scènes de sexe ne relevant toutefois pas du X. 

Pour Baise-moi, la Commission avait préféré le 16 + avertissement au X et la Ministre avait suivi. Le problème était survenu ensuite de l’association Promouvoir qui, au nom de la défense de la Famille, avait réclamé un strict respect du Code Pénal et une interdiction aux mineurs de moins de 18 ans sur ce film. Comment faire puisque un X aurait correspondu là encore dans les faits à une interdiction en salle ? Une année plus tard, un nouveau décret (en 2001 donc) promulguait le 18 ans en vigueur aujourd’hui. 

KEN PARK (Larry Clark & Edward Lachman, 2003) 

Histoire: Un tableau provocant d'adolescents américains de classe moyenne qui trompent leur ennui avec du sexe, de la violence et de la perversion à Visalia, une petite ville de Californie. Leurs parents sont pour la plupart médiocres, aveugles, méprisants et alcooliques.

Pourquoi ? Le Conseil d’État avait décidé que le film de Larry Clark devait être interdit aux moins de 18 ans, et non aux moins de 16 ans comme l’avait estimé le Ministère de la Culture en délivrant le visa d’exploitation du film lors de sa sortie. Considérant que "le ministre avait fait une inexacte application" des dispositions relatives à la protection des mineurs, le Conseil d’état notait que Ken Park contenait une "scène de sexe non simulée, qui revêtait un caractère particulièrement cru et explicite" ainsi que d’autres scènes "mêlant sexe et violence" et jugeait que le film devait être classé dans la liste des films pornographiques – sur ce point, elle n’a pas été suivie. 

9 SONGS (Michael Winterbottom, 2005)

Histoire: Londres, automne 2003. Lisa, une étudiante américaine, rencontre l'anglais Matt lors d'un concert de Black Rebel Motorcycle Club à la Brixton Academy. C'est le coup de foudre immédiat, le point de départ d'une histoire d'amour sensuelle et charnelle.

Pourquoi ? Dans ce film à la fois impudique et romantique, Michael Winterbottom brosse le tableau d'une relation amoureuse d'un érotisme torride, depuis ses prémices jusqu'à son inéluctable conclusion. Les scènes de sexe filmées sans faux-semblants alternent avec les images inédites des concerts des Von Bondies, de Franz Ferdinand, de Black Rebel Motorcycle Club, des Dandy Warhols, d'Elbow, de Primal Scream et des Super Furry Animals ainsi que des musiques instrumentales néoclassiques signées Michael Nyman. 9 songs est interdit aux moins de 18 ans en raison de scènes de sexe non simulées.

SAW 3 (Darren Lynn Bousmann, 2006)

Histoire: Le Tueur au puzzle a mystérieusement échappé à ceux qui pensaient le tenir. Pendant que la police se démène pour tenter de remettre la main dessus, le génie criminel a décidé de reprendre son jeu terrifiant avec l'aide de sa protégée, Amanda... Le docteur Lynn Denlon et Jeff ne le savent pas encore, mais ils sont les nouveaux pions de la partie qui va commencer...

Pourquoi ? Le ministre français de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres avait décidé de suivre l’avis de la commission de classification des œuvres cinématographiques qui avait recommandé d’interdire le film aux mineurs. L’interdiction aux moins de 18 ans d’un film autre qu’à caractère pornographique, était une décision exceptionnelle. Ce sera la même décision pour Saw 3D. Dans un avis, le Conseil d'état affirmait avoir constaté que ce film comportait, en effet, "un grand nombre de scènes filmées avec un grand réalisme, montrant des actes répétés de torture et de barbarie et représentant de manière particulièrement complaisante les souffrances atroces, tant physiques de psychologiques, des victimes prises dans des pièges (…) De telles scènes sont de nature à heurter la sensibilité des mineurs et justifient ainsi une interdiction de ce film aux mineurs de 18 ans." 

IL N'Y A PAS DE RAPPORT SEXUEL (Raphael Siboni, 2011)

Histoire: Un portrait de HPG, acteur, réalisateur et producteur de films pornographiques, entièrement conçu à partir des milliers d’heures de making-of enregistrées lors de ses tournages. Plus qu’une simple archive sur les coulisses du X, ce film documentaire s’interroge sur la pornographie et la passion pour le réel qui la caractérise.

Pourquoi ? Jamais un documentaire n’avait touché de si près l’obscénité au sens premier (sur le devant de la scène). Il n’y a pas de rapport sexuel est aussi et surtout un film libre, à la fois hilarant et pathétique, triste et embarrassant, totalement dépourvu de jugement ou de théorie vaseuse. Ce que le spectateur y voit est ouvert à toutes les interprétations, même et a fortiori aux plus équivoques. A une heure où le cinéma ne tolère que le politiquement correct et où Internet autorise une liberté totale en termes de sexualité (la pornographie s’est propagée sur les écrans d’ordinateur en dix ans comme un virus), le résultat ressemble à une Bible sur le gonzo, très contemporain dans ce qu’il révèle sur la consommation démocratisée et virtuelle de la chair. 

NYPHOMANIAC - Volume 2 (Lars Von Trier, 2014)

Histoire: La folle et poétique histoire du parcours érotique d'une femme, de sa naissance jusqu'à l'âge de 50 ans, racontée par le personnage principal, Joe, qui s'est autodiagnostiquée nymphomane. Par une froide soirée d’hiver, le vieux et charmant célibataire Seligman découvre Joe dans une ruelle, rouée de coups. Après l'avoir ramenée chez lui, il soigne ses blessures et l’interroge sur sa vie. Seligman écoute intensément Joe lui raconter en huit chapitres successifs le récit de sa vie aux multiples ramifications et facettes, riche en associations et en incidents de parcours.

Pourquoi ? Shoot d’adrénaline à une époque sous Tranxène cernée par le neutre, le diptyque Nymphomaniac envisage l’odyssée sexuelle comme une odyssée spatiale, s’évade de notre présent, renoue avec la saveur des œuvres impures des années 70 – une décennie où l’on pouvait se permettre d’être impoli au cinéma et de choquer en toute sécurité – en même temps qu’il nous projette vers un cinéma du futur très proche où des acteurs venus du traditionnel pourront être doublés lors de scènes de sexe explicites, où par la grâce d’effets spéciaux bluffants nous n’y verrions que du feu. On peut donc désormais faire TOUT jouer à n’importe quelle star. De quoi questionner notre rapport aux images, à toutes les images. 

LOVE (Gaspar Noé, 2015)

Histoire: Un 1er janvier au matin, le téléphone sonne. Murphy, 25 ans, se réveille entouré de sa jeune femme et de son enfant de deux ans. Il écoute son répondeur. Sur le message, la mère d'Electra lui demande, très inquiète, s'il n'a pas eu de nouvelle de sa fille disparue depuis longtemps. Elle craint qu'il lui soit arrivé un accident grave. Au cours d'une longue journée pluvieuse, Murphy va se retrouver seul dans son appartement à se remémorer sa plus grande histoire d'amour, deux ans avec Electra. Une passion contenant toutes sortes de promesses, de jeux, d'excès et d'erreurs...

Pourquoi ? Après la décision de la Commission de Classification de n'interdire Love qu'aux moins de 16 ans (avec avertissement), l'association Promouvoir saisit le tribunal admistratif et obtient, le 3 août 2015, la suspension du visa d'exploitation du film et son interdiction aux moins de 18 ans. 


Romain LE VERN

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