"Kursk" : cette tragédie moderne qui ne va pas faire plaisir à Vladimir Poutine

Publié le 7 novembre 2018 à 16h03

Source : JT 13h WE

NOTRE AVIS - En salles ce mercredi, "Kursk" met en scène avec un grand réalisme le naufrage très médiatisé d'un sous-marinnucléaire russe, en 2000. Porté par un casting international de luxe, le film de Thomas Vinterberg n'est pas tendre avec le locataire actuel du Kremlin, même s'il n'apparaît jamais à l'écran.

Le 12 août 2000, le sous-marin nucléaire russe K-141 Koursk fait naufrage en mer de Barents avec 118 marins à son bord, victime de l’explosion accidentelle d’un missile qui a pulvérisé la quasi-totalité du navire. Pendant plusieurs jours, une poignée d’hommes courageux vont attendre qu’on vienne les secourir, en vain, finalement victimes des atermoiements de leur commandement qui a accepté trop tard la main tendue par la communauté internationale.

De nombreux opposants à Vladimir Poutine ont sans doute rêvé de porter à l’écran cet incroyable fiasco militaire dont l’intéressé a reconnu être responsable, du moins en partie. Et que les familles des victimes ne lui ont jamais pardonné. C’est Europacorp, la société de production du Français Luc Besson qui s’est finalement attelée à la tâche, à l’été 2015, en s’appuyant sur un livre du journaliste britannique Robert Moore, un grand spécialiste de l’Union soviétique qui avait couvert l’affaire à l’époque.

Une superproduction à taille humaine

Après avoir proposé le projet au jeune cinéaste danois Martin Zandvliet, repéré en 2015 avec son très beau film de guerre "Les Oubliés", c’est son compatriote plus expérimenté Thomas Vinterberg qui a accepté de relever le défi. Réalisateur éclectique ("Festen", "Submarino", "La Chasse"), il ne s’était toutefois jamais attelé à une production d’une telle ampleur, même si son budget de 40 millions de dollars est à des années-lumière des superproductions hollywoodiennes.

La présence de ce fin directeur d’acteurs explique, en partie, pourquoi "Kursk" a attiré la crème des comédiens européens du moment, le Belge Matthias Schonaerts en tête qu’il avait déjà dirigé dans "Loin de la foule déchaînée", en 2015. La Française Léa Seydoux, le Britannique Colin Firth, le Suédois Max Von Sydow ou encore l’Autrichien Peter Simonischek, la révélation de "Toni Erdmann", complètent un casting très cosmopolite. Précisons que le film a été tourné en langue anglaise, aucun comédien russe ne figurant d’ailleurs au générique pour les raisons qu’on imagine...

De ce patchwork de nationalités est né un drame historique plutôt réussi, Thomas Vinterberg privilégiant le réalisme au grand spectacle, même si les séquences sous-marines – et notamment celles du naufrage – sont plus qu’impressionnantes. Mais là où "Kursk" remporte la mise, c’est dans son auscultation méticuleuse d’un drame géopolitique où les intérêts supérieurs d’une nation passent avant le sauvetage d’une poignée de pères de famille. Si le nom de Vladimir Poutine n’est jamais cité à l’écran, son ombre plane sur le drame inéluctable qui se joue sous nos yeux. Pas sûr qu’il organise une projection au Kremlin de sitôt…

Mais "Kursk" ne tombe jamais dans les clichés antisoviétiques à la James Bond, au contraire. Et heureusement. Par-delà le grand spectacle, le film parvient même à communiquer quelque chose de "l’âme russe", chère aux grands écrivains, à travers le personnage principal, le Capitaine Mikhail Kalekov, incarné avec beaucoup d’élégance par le colosse Matthias Schoenaerts. Mari et père dévoué, il fait face à son destin et celui de ses camarades avec un mélange de noblesse et de fatalité, ne remettant jamais en question l'obstination d'une hiérarchie qui le conduira à sa perte. 


Jérôme VERMELIN

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