"Le Fils de Saul" : l’incroyable histoire du premier film de László Nemes, ce soir sur Arte

Publié le 23 mai 2018 à 16h00, mis à jour le 23 mai 2018 à 17h07
"Le Fils de Saul" : l’incroyable histoire du premier film de László Nemes, ce soir sur Arte

CHOC – Premier film du jeune réalisateur hongrois László Nemes, "Le Fils de Saul" est diffusé ce mercredi soir sur Arte. Une fiction stupéfiante, récompensée à Cannes en 2015, qui plonge le spectateur dans l’enfer du camp d’Auschwitz-Birkenau.

C’est un film pas tout à fait comme les autres. Arte diffuse ce soir "Le Fils de Saul", le premier film du jeune réalisateur hongrois László Nemes, couronné par le Grand prix du jury au Festival de Cannes en 2015. Son personnage principal, c’est Saul Ausländer, un membre des Sonderkommandos, ces prisonniers juifs contraints d’aider les Nazis dans l’élimination des leurs. Un jour, alors qu’il nettoie l’un des crématoriums d’Auschwitz-Birkenau, il découvre le corps d’un garçon dans lequel il croît reconnaître son fils. Et auquel il décide d’offrir une sépulture, au péril de sa propre vie.

Si "Le Fils de Saul" impressionne, c’est en grande partie grâce à sa mise en scène millimétrée, László Nemes filmant à hauteur d’homme, plongeant le spectateur dans l'enfer des camps avec un réalisme étourdissant. Plans serrés, à hauteur d’épaule, l’horreur de la solution finale se déroule pour l’essentiel hors du champ de la caméra, et se devine à travers le regard halluciné du personnage principal, interprété par le poète Géza Röhrig.

Co-scénariste avec l’universitaire française Clara Royer, le cinéaste souhaitait à tout prix éviter les pièges de la fiction hollywoodienne héroïque. "Mon film, c’est l’inverse de La Liste de Schindler", nous confiait-il à l'époque de sa présentation à Cannes. "Parce que Schindler est un film de survie. D’exception. Or, c’est un mensonge. La vérité, la règle des camps, c’était la mort. C’est ça que l’Europe post‑holocauste n’a jamais accepté."

Schindler est un film de survie. D’exception. Or, c’est un mensonge. La vérité, la règle des camps, c’était la mort
László Nemes

En France personne ne voulait le produire

Ancien assistant de son illustre compatriote Béla Tarr, fan d'Andreï Tarkovksi, de Stanley Kubrick et d'Ingmar Bergman, László Nemes a longtemps bataillé pour monter ce film historique aussi intense qu’original. En 2011, il passera plusieurs mois à Paris dans le cadre de la Résidence, un programme du Festival de Cannes destiné à soutenir les jeunes cinéastes émergents dans l'écriture d'un scénario et ses démarches auprès des producteurs.

Au terme de son séjour, il ne trouvera aucun financement en France. Ni auprès du Centre National de la Cinématographie (CNC), ni des chaînes de  télé, dont d'Arte qui, douce ironie du sort, le diffuse ce soir en prime. C’est finalement dans son pays qu’il réunira son modeste budget de 1.5 million d’euros, afin de tourner l’espace d’un mois à peine dans la banlieue de Budapest. Et le résultat est saisissant, à la limite du supportable.

AFP

"Avec notre chef décorateur, on a recréé la logique d’un four crématoire", nous racontera le jeune cinéaste. "Peut-être que telle ou telle pièce n’était pas disposée comme dans le film. Mais on a tout fait pour être fidèles à l’organisation, la hiérarchie, le rôle des uns et des autres. On a fait extrêmement attention, avec l’aide de conseillers historiques très solides, pour savoir quelles libertés on pouvait prendre ou pas."

Adoubé par Claude Lanzmann, le réalisateur de "Shoah", "Le Fils de Saul" va faire le tour du monde après sa présentation et sa récompense à Cannes. Une belle histoire qui se prolonge jusqu’en février 2016, à Hollywood, où le film décroche l’Oscar du meilleur film étranger. Depuis, László Nemes a tourné un deuxième film, "Sunset", drame historique qui se déroule à Budapest en 1913. Pressenti au 71e Festival de Cannes, il n’y a finalement pas été présenté. Il sortira en France le 31 octobre prochain.

 >> "Le Fils de Saul" de László Nemes. Ce soir à 20h55 sur Arte. Avec Géza Röhrig, Levente Molnàr, Urs Rechn. Durée 1h44. Interdit aux moins de 12 ans


Jérôme VERMELIN

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