Lina Elarabi, la star de "Ne m'abandonne pas" : "Daech rêve que le FN passe en France"

Publié le 4 février 2016 à 11h21
Lina Elarabi, la star de "Ne m'abandonne pas" : "Daech rêve que le FN passe en France"

INTERVIEW – Elle joue une jeune fille tombée dans l'intégrisme le plus radical. A mille lieues du personnage de Chama, l'héroïne de "Ne m'abandonne pas", le téléfilm que France 2 diffuse ce soir, Lina Elarabi est une jeune fille de 20 ans bien dans ses baskets. La jeune étudiante en 2e année de journalisme, nous dit tout sur cette fiction qui devrait faire couler beaucoup d'encre.

Mercredi, plus de 5,1 millions de téléspectateurs (20,5% du public) ont suivi sur France 2 "Ne m'abandonne pas", le téléfilm de Xavier Durringer qui raconte la dérive djihadiste d'une jeune étudiante française. Un rôle fort porté par la révélation Lina Elarabi. metronews l'a rencontré.

Qu'est-ce qui vous a donné envie d'accepter ce rôle très fort ?
C'était un beau défi. Et puis je ne prenais pas trop de risque car c'est une fiction pour France Télévision réalisée par Xavier Durringer dont j'apprécie beaucoup le travail. J'étais en totale confiance. Ne m'abandonne pas est avant tout l'histoire d'une mère et de sa fille. La mère de Chama pourrait vouloir la sauver de la toxicomanie, ou de l'emprise d'une secte, ce serait pareil. Au fond, le djihadisme est un prétexte même si, évidemment, ce n'est pas un sujet anodin.

La radicalisation et l'endoctrinement des jeunes sont des sujets complexes. Comment vous êtes-vous préparée pour être le plus juste possible ?
Comme j'ai eu le rôle une semaine à peine avant le début du tournage, je n'ai pas pu approfondir mes recherches ! Mais même si j'en avais eu l'opportunité, je ne pense pas que je l'aurais fait car, même si je n’ai pas beaucoup d'expérience, j'aime travailler sur l'instant. Le plus gros du travail se fait devant la caméra.

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Vous n'avez pas eu envie de vous documenter ?
Je suis dans une école de journalisme donc, forcément, je m'intéresse à l'actualité. Mais il n'y avait aucun intérêt à faire des recherches pour le film parce que Chama ne sait rien du djihadisme. Si elle était consciente du revers de la médaille, elle ne partirait sûrement pas.

"Je défie quiconque de faire la différence entre moi et une franco-française"

Comment expliquez-vous que certains jeunes puissent basculer ?
C'est une vaste question, et ma réponse n'engage que moi. Mais je pense que c'est une espèce de cercle vicieux. Quand on est jeune et typé, on est très stigmatisé. Et c'est cette stigmatisation qui alimente le discours de Daech. Ils profitent de cette ambiance de rejet de la communauté musulmane pour s'implanter. Ils se nourrissent de ça. Leur rêve serait que le FN passe pour leur donner plus de crédibilité. Mais grâce à ce film, je juge un peu moins les personnes qui partent et encore moins leurs parents.

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Avez-vous été confrontée au racisme ?
Non, jamais directement. J'en ai peut-être été victime sans le savoir. Peut-être que mon CV n'a pas été retenu parce que je m'appelais Elarabi. Mais je suis entourée de personnes qui le vivent tout le temps. Et il y a un moment donné, je vous assure qu'on se demande si on est vraiment aimé de la France alors qu'on en fait partie. Moi, je remarque que je m’appelle Elarabi parce qu'on me le dit ! Je suis née en France et je défie quiconque de faire la différence entre moi et une 'franco-française'. Je ne me sens jamais visée quand j'écoute les discours du Front national ou quand on parle d'islamisme.

Comment votre famille a-t-elle réagi face au téléfilm ?
Ça a été un sujet de discussion au départ car, forcément, mes parents étaient inquiets. Ils avaient peur de toute cette stigmatisation dont on parlait plus tôt. Non seulement, je m’appelle Elarabi et en plus, je joue une djihadiste, il y a mieux pour débuter quand même (rires). Mais ils ont lu le scénario et ils ont compris que le discours était bienveillant. Si ça ne l'avait pas été, je ne l'aurais pas fait. Je ne cours pas après les castings.

Quel est votre rapport à la religion ?
Est-ce que vous me poseriez cette question si j'étais catholique ? Je comprends votre démarche mais ma politique c'est de dire que ma religion je la vis chez moi et qu'à l'extérieur, il n'y a aucune raison que je me présente en disant : "Bonjour, je m'appelle Lina et je suis musulmane !". Je n'aime pas dire que je pratique un islam modéré car c'est un pléonasme.

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Rania HOBALLAH

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