Lucien Jean-Baptiste : "Je veux montrer qu'un comédien noir peut jouer Roméo"

Publié le 9 mars 2016 à 8h00
Lucien Jean-Baptiste : "Je veux montrer qu'un comédien noir peut jouer Roméo"

REBOND - Après "Ma première étoile" et "30° Couleur", l’acteur-réalisateur signe "DieuMerci!", comédie dramatique fortement inspirée de sa vie intime et professionnelle. Metronews l’a rencontré pour parler de ce troisième long-métrage dans lequel les rêves de cinéma d’un quadragénaire noir se confrontent à la réalité d’un milieu parfois embourbé dans ses codes.

Comment est né DieuMerci! ?
Un producteur, Farid Lahouassa, m’avait proposé un rôle de sans-papier africain dans un film. Je l’avais refusé : j’ai plus de facilité à faire un gouailleur parisien qu’un type de Bamako dont je ne connais pas la culture. Mais ce personnage qui s’appelait déjà Dieumerci! et qui remplaçait un jeune homme pour une audition de théâtre résonnait très fort en moi. Ça a redéclenché l’envie d’écrire.

Pourquoi ? Elle s’était envolée ?
Faire 130 000 entrées avec 30° Couleur après en avoir eu 1, 7 million avec Ma première étoile a été d’une violence inouïe. J’étais très mal. Mon premier film a été ma chance et mon boulet : les gens voulaient une suite et m’ont lâché quand j’ai proposé autre chose. Y compris mes compatriotes qui crient pourtant qu’il n’y a pas assez de Noirs sur les écrans. Pourtant, selon moi, se battre pour la diversité, c’est aussi aller voir un film avec des acteurs noirs.

Qu’il soit bon ou mauvais ?
Quand on se dit en situation de lutte, que ce soit pour les Noirs, les femmes ou les homosexuels, il faut utiliser toutes les armes. Quand un film comme 30° Couleur se plante, les producteurs vous disent : "Tu vois, les Noirs au cinéma, personne n’en veut." Ça n’aide pas à faire évoluer les imaginaires des décideurs.

"Je ne croule pas sous les propositions de cinéma"

Revenons-en à DieuMerci!. C’est 100% autobiographique ?
A part la prison qui est une métaphore de mon passé, enfermé dans une cage d’escalier de HLM. Mais, comme DieuMerci, j’ai moi aussi connu la perte d’un enfant et je voulais être comédien malgré tous les signaux qui me disaient que ce n’était pas pour moi.

Le directeur de théâtre raciste, c’est aussi du vécu ?
Oui il représente une partie de l’industrie, ces mecs qui tiennent les cordes et qui veulent des jeunes et des blancs alors qu’il est aussi de leur devoir d’éduquer, de faire tomber les barrières. Je le fais à mon petit niveau avec DieuMerci!, en montrant par exemple qu’un comédien noir peut jouer Roméo, et pas seulement Othello. Mais la prise de conscience doit être plus globale.

Réaliser c’est aussi vous donner les rôles qu’on ne vous propose pas ?
Bien sûr. Je ne suis pas à plaindre car je fais de la télé, du doublage, mes films... Mais je ne croule pas sous les propositions de cinéma. Je n’en veux à personne mais un acteur noir qui n’a pas fait 20 millions d’entrées comme Omar n’entre pas dans les cases. La plupart du temps, quand il n’est pas stipulé dans le scénario que le personnage est noir, on ne m’appelle pas : ce n’est pas du racisme. C’est juste un code de l’industrie.

Vous avez déjà un prochain film en tête ?
Je suis déjà en montage. Ca s’appelle Il a déjà tes yeux et c’est produit par Dominique Farrugia. C’est l’histoire d’un couple de Noirs qui adopte un enfant blanc. Ca va envoyer du bois et exploser tous les codes !

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La rédaction de TF1info

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