Miossec: "Aujourd'hui un verre de vin me fait autant de dégâts qu’une nuit d’ivresse"

Publié le 25 mai 2016 à 16h05
Miossec: "Aujourd'hui un verre de vin me fait autant de dégâts qu’une nuit d’ivresse"

INTERVIEW - À 51 ans, Christophe Miossec revient avec un nouvel album, "Mammifères". Un disque à l’écriture nue, composé sur la route. Le chanteur Brestois a reçu metronews au bistrot pour un entretien à coeur ouvert où il évoque pêle-mêle ses nouvelles chansons, l’alcool, les attentats. Et règle au passage quelques comptes avec Jean-Louis Murat ou François Hollande.

Pourquoi avoir baptisé l’album "Mammifères" ?
Parce que je me suis rendu compte que je ne parle que de ça : de l’évolution, de Darwin, comment l’homme s’est frayé un chemin jusqu’en 2016 sans un coup de main du Bon Dieu. C’est ma haine de la religion qui parle et elle n’est pas neuve. Comme tous les Brestois, j’ai été à l’école catholique. En Bretagne, on a des églises et des croix à chaque coin de rue, c’est très pénible.

Sur disque, on entend beaucoup d’accordéon, un instrument patrimonial par excellence. Vous n’aviez pas peur de sonner comme Yvette Horner ?
J’ai horreur du guinguette mais j’aimais l’idée de sortir un album avec un quatuor violons/accordéon en 2016. Même si ça aurait sûrement rassuré la maison de disque que je travaille avec des programmations. Quand j’ai commencé la musique, il y avait toute une scène alternative qui s’était emparée de l’accordéon mais ça n’a jamais été ma tasse de thé. Mais aujourd’hui le son s’est tellement internationalisé: le moindre groupe d’Orléans sonne comme un groupe de Brooklyn !

Vous les avez vus filer ces 21 ans de carrière ?
C’est passé trop vite ! Tout n’est pas parfait. Tu fais un disque et sur le moment tu te dis : "c'est vraiment bien !" et quand tu le réécoutes, tu te dis : "Oh putain!" Je n’aime pas me retrouver dans la peau du VRP qui défend son produit mais pour ce disque, je suis content de moi. J’aime qu’il soit né sur la route. Ça fait 2 ans et demi que je tourne. J’ai joué dans des villages dont je ne connaissais même pas le nom !

Une de vos nouvelles chansons s’intitule "Après le bonheur". En tant que parolier, cherche-t-on le malheur dans la vie pour avoir des choses à raconter en chansons ?
Les premières années, ça a été mon cas. Puis j’ai eu ma dose. Apprendre à être heureux m’a pris un temps fou. Depuis deux trois albums, ça va mieux. Mais cette chanson est plus pernicieuse que ça. Je l’ai écrite après les attentats du 7 janvier. Elle parle de ce qu’on ressent quand on est soufflé par un tel événement. Je savais qu’en tant que parolier, je n’y couperai pas. C’était impossible de sortir un disque amnésique qui n’évoquerait pas les attentats.

Vous êtes un auteur très demandé. Récemment Jean-Louis Murat, nous confiait qu’il avait un profond mépris pour ceux qui écrivent pour les autres…
La différence entre Murat et moi, c’est qu’il croit que son écriture est sacrée, pas la mienne. Quand tu écris pour Greco ou Hallyday, tu n’utilises pas les mêmes mots, les mêmes dictionnaires. Il faut se remettre en question. Peut-être que Murat n’en a pas envie…

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Vous avez souvent écrit sur le temps passe : "30 ans", "En Quarantaine"… Cette fois, avec le titre "Les Mouches", vous évoquez directement la mort. C’est une angoisse ?
Ben oui. Il y a eu tellement de disparitions dernièrement: celle de mon pote Rémy Kolpa Kopoul (journaliste à Nova), celle de Bashung… Savoir qu’il ne sortira plus d’albums, ça me tue. J’aurais voulu savoir sur quel pied il danserait aujourd’hui. C’est terrible, on est là à fumer des clopes et puis un jour on disparait à cause d’elles… (il se roule une autre cigarette)

L’alcool aussi. On se souvient de concerts où vous arriviez sur scène fortement imbibé…
Ça, c’est terminé. Je n’aurais jamais du boire un seul verre d’alcool de ma vie. Je n’ai pas le cerveau pour. Aujourd’hui, je ne bois plus une goutte. Un verre de vin me fait autant de dégâts qu’une nuit d’ivresse. Quelle ironie pour un mec dont le premier disque s’appelait "Boire" ! Mais je n’aurais jamais pu monter sur scène sans boire avant. J’étais tétanisé par la timidité.

Sur votre deuxième album, vous chantiez "On était tellement de gauche". Vous vous sentez encore de gauche aujourd’hui ?
J’appartiens à une gauche qui n’existe pas et qui aujourd’hui n’est représentée par personne. Mais je ne suis pas le seul à être paumé… Le pire dans le Hollandisme, c’est que ça n’est même pas du pragmatisme. C’est fascinant de voir qu’une fois arrivé à l’Elysée, même un mec comme Hollande, qui avait le sens du peuple, décroche. Comme les autres. Faut en finir avec l’élection présidentielle et cette position de monarque. En vieillissant, j’ai dépassé le stade de la colère. C’est pour ça que c’était bien de voir des gens pas résignés avec Nuit Debout. La résignation, c’est ce qu’il y a de pire.

Vous auriez pu aller jouer Place de la République comme Nekfeu ?
Si on m’avait demandé, oui. J’ai été jouer contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes avec Sanseverino. Mais on ne peut pas dire qu’on a changé la donne…

>> "Mammifères " de Miossec, sort le 27 mai chez Columbia/Sony (sortie le 27 mai). Le chanteur est en tournée dans toute la France. www.christophemiossec.com
 


La rédaction de TF1info

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