Muguette Fabris, Miss France 1963 : "À l'époque, on n'avait pas les mêmes opportunités"

Propos recueillis par Rania Hoballah
Publié le 17 décembre 2020 à 17h42, mis à jour le 18 décembre 2020 à 18h14

Source : Sujet TF1 Info

INTERVIEW - Alors professeur de mathématiques, Muguette Fabris a été élue Miss France 1963. Tout en continuant à assurer ses cours, elle a vécu une année mémorable, comme nous le confie l'ex-reine de beauté qui fera partie du jury de l'édition 2021.

Elle a 80 ans, et elle est en pleine forme. Muguette Fabris, Miss France 1963, fera partie du jury de l'élection de Miss France 2021 qui se tient ce samedi 19 décembre au Puy du Fou. Ancienne professeur de mathématiques, elle est parvenue l'année de son règne à respecter ses engagements tout en continuant à enseigner à ses élèves, qui étaient très fiers d'avoir une Miss rien que pour eux. Un destin hors du commun sur lequel elle a accepté de revenir pour nous avec beaucoup de joie. 

Vous avez été élue Miss France 1963. Pourquoi vous étiez vous présentée à l'époque ? 

J'avais fait un peu de mannequinat et j'aimais bien la mode. J'avais envie de revenir vers ce milieu, donc je me suis présentée. L'élection se déroulait au grand théâtre de Bordeaux, un lieu somptueux. Nous avions passé la soirée entourées de Louis et Geneviève de Fontenay, pour qui j'ai toujours eu beaucoup de respect. 

Vous avez tenu à rester professeur de mathématique au lycée d'Angoulême. Pourquoi ? 

Vous savez, à l'époque, les Miss France n'avaient pas les même opportunités qu'aujourd'hui. On ne pouvait pas se tourner vers la radio ni la télé. À l'époque, c'était l'ORTF en noir et blanc ! Et puis j'aimais l'enseignement, donc j'ai voulu poursuivre dans cette voix. Louis et Geneviève m'ont d'ailleurs toujours soutenue. 

Ça devait être sportif !

Oui mais je suis parvenue à gérer les deux, j'étais bien organisée. Le jeudi, je n'avais pas de cours, donc je pouvais faire des interviews ou des photos. Je corrigeais mes copies dans le train ! Le week-end ou durant les vacances scolaires, je partais avec Louis et Geneviève de Fontenay pour respecter mes engagements avec le comité Miss France. 

Quelle a été la réaction des élèves et de leurs parents quand ils ont appris que vous aviez été élue ? 

Ça a été la surprise car je n'avais dit à personne que j'allais me présenter ! Mes élèves étaient très contents et tous les parents ont été bienveillants car je faisais bien travailler leurs enfants. En revanche, la directrice du lycée m'avait convoquée pour me faire la leçon. Elle m'a dit : "Vous n'avez pas le prix Nobel, donc ça n'est pas glorieux". Moi je lui ai répondu que je respecterai mes engagements avec l'Éducation nationale et que je ne manquerai pas un cours de l'année. Et c'est ce qui s'est passé. J'ai d'ailleurs quelques fois pris l'avion de manière assez scabreuse pour ne pas louper un cours ! 

À quoi ressemblait le concours à l'époque ? 

Aujourd'hui, il y a toute une organisation qui prend en charge les jeunes filles durant un mois pour leur apprendre comment se maquiller, marcher, bien se tenir. À l'époque il n'y avait pas tout ça. C'était Geneviève qui nous prenait en main. Moi, je venais d'un milieu très simple mais avec une très bonne éducation, donc je me sentais à l'aise partout où j'allais. Et puis tout se faisait très vite, en trois jours c'était bouclé. 

Les filles aujourd'hui ont beaucoup d'avantages que nous n'avions pas
Muguette Fabris

Le concours était-il aussi populaire ? 

Non. C'est grâce à la télévision que le concours est devenu populaire et médiatique. Aujourd'hui, il suffit d'aller sur Internet pour avoir toutes les jeunes filles en photo, à l'époque non. C'était après l'élection, grâce à la presse, que nous étions connues.

On a une image d'une France plus conservatrice, avec moins de libertés pour les femmes. Etait-ce le cas ? 

Non, on se fait une fausse idée car en 1963, je me sentais comme une jeune femme moderne et libre. 

Vous seriez-vous présentée si vous aviez 20 ans aujourd'hui ? 

Oui, pourquoi pas ! Ça m'aurait plu. Les filles aujourd'hui ont beaucoup d'avantages que nous n'avions pas. Et je trouve que ce concours est une réussite. Moi je me suis mariée l'année suivante, donc j'ai perdu de vue le milieu des Miss. Mais j'ai toujours suivi toutes les élections après la mienne. Et je dois dire que j'avais un bon flair pour trouver la gagnante ! 

Je n'aime pas toutes ces polémiques où Geneviève de Fontenay et Sylvie Tellier sont en cause
Muguette Fabris

Quel est le souvenir le plus marquant de votre règne ? 

Il y en a eu beaucoup. J'ai rencontré Maurice Herzog à Méribel, l'ancien secrétaire d'État, c'était assez exceptionnel. J'ai aussi fait de beaux voyages comme au Canada, j'ai passé une audition dans les studios Cinecittà à Rome. Mais quand je suis arrivée, ça n'a pas fonctionné car on m'a dit que je ressemblais trop à Sophia Loren ! C'était glorieux qu'on me dise ça, mais en réalité je pense que je n'étais pas assez douée pour pouvoir la remplacer (Rires). J'ai loupé de nombreuses occasions de faire autre chose que de l'enseignement. J'aurais pu aussi être speakerine à Monaco, mais j'ai refusé. J'avais aussi signé pour faire un disque mais je n'ai jamais pris le temps de le faire. Aujourd'hui, j'aurais sûrement eu d'autres ambitions et j'aurais fait d'autres choix. 

Vous allez faire partie du jury en tant que doyenne des Miss France, la boucle est bouclée ? 

Oui tout à fait, j'ai 80 ans maintenant (Rires). Sylvie Tellier me fait un cadeau magnifique. J'ai déjà une petite idée sur mes favorites car on peut déjà voir leurs photos sur Internet. J'attends à présent de les voir sur scène, leur démarche, comment elles s'expriment. J'aime les filles simples mais qui savent convaincre. 

Geneviève de Fontenay ne sera pas présente pour l'élection. Ça vous peine ? 

Je n'aime pas toutes ces polémiques où Geneviève de Fontenay et Sylvie Tellier sont en cause. J'ai toujours eu de bonnes relations avec Geneviève, même si ça fait 50 ans qu'on ne s'est pas revues. Si j'ai bien compris, Sylvie lui a proposé de venir, et nous aurions été tous très heureux de la revoir. Mais Geneviève n'a pas accepté de se réunir avec nous toutes. C'est vrai que
Sylvie a pris sa place dans le comité Miss France, mais il ne faut pas oublier que le comité Miss France avait été revendu. 


Propos recueillis par Rania Hoballah

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