Le 2 octobre 2003, à cinq jours de l'élection au poste de gouverneur de Californie, le "Los Angeles Times" publie une enquête accablante contre Arnold Schwarzenegger.Favori des sondages, l'acteur est accusé de harcèlement par une demi-douzaine de femmes, des faits qu'il va d'abord reconnaître, avant de les nier.Cet épisode surprenant, qui ne l'empêchera pas d'être élu, est raconté par l'intéressé lui-même dans la série documentaire "Arnold", sur Netflix.
Sur le papier, c'était le rôle le plus improbable de sa carrière. Le 7 octobre 2003, Arnold Schwarzenegger était élu gouverneur de Californie, l’épilogue de l’une des élections les plus surréalistes de l’Histoire. C’est avec un étonnant mélange de franchise et de malice que la star autrichienne évoque cette période de sa vie dans le troisième épisode de la minisérie Arnold, disponible ce jeudi sur Netflix.
Avant de se lancer dans la bataille, le Terminator a été conseiller à l’éducation physique de George Bush Sr dans les années 1990. Mai s’il a épousé la journaliste Maria Shriver, la nièce de JFK, lui imaginer un destin à la Ronald Reagan relève de la pure fiction à un niveau national. Étant né en Autriche, il ne peut prétendre accéder un jour à la Maison Blanche. Sur le plan local, en revanche…
Plus on me dit que je ne peux pas, ou que quelque chose est impossible, plus ça m’excite !
Arnold Schwarzenegger
L’hypothèse d’une candidature au poste de gouverneur de Californie germe dans la tête de Schwarzy fin 2022 qui consulte des amis producteurs en quête de soutiens. Les finances publiques au plus mal, l’État traverse l’une des pires crises de son histoire qui va déboucher que sur une procédure de destitution du sortant, le démocrate Gray Davis. Par référendum, les électeurs seront appelés à décider de son maintien et du nom… mais aussi de l’identité de son éventuel successeur.
"Les mêmes agents, managers et cadres des studios qui m’avaient recalé dans les années 1970 en me disant que je n'arriverais jamais à être acteur m’ont tous dit que j’étais fou", se rappelle Arnold Schwarzenegger qui gagne à l’époque plus de 20 millions de dollars par film. "Mais moi, plus on me dit que je ne peux pas, ou que quelque chose est impossible, plus ça m’excite !".
Après avoir entretenu le suspense, Arnold Schwarzenegger annonce sa candidature le 6 août sur le plateau du talk show de Jay Leno. "J’étais stupéfait ! Pourquoi la plus grande star de cinéma au monde ferait ça ?", raconte aujourd’hui l’animateur. "J’étais abasourdie et choquée", avoue Linda Hamilton, sa partenaire dans Terminator. "Qui aurait cru que pendant tout ce temps il se préparait pour son plus grand rôle ?", renchérit le réalisateur James Cameron.
À l’époque, la nouvelle fait l’effet d’une bombe. Elle fait la une des médias du monde entier et durant tout l’été, la star joue sur du velours. Face à ses rivaux, il mise sur son incroyable popularité et joue la carte de la proximité, multipliant les embrassades avec les électeurs sur les conseils de Maria Shriver qui après avoir tenté de le dissuader de se présenter, devient sa meilleure conseillère.
Brillant communicant, Arnold Schwarznegger va jusqu’à engager des humoristes pour lui écrire des blagues afin de ridiculiser ses rivaux durant les débats. La riche candidate indépendante Ariane Huffington suggère de faire la chasse aux grandes entreprises qui ne payent pas leurs taxes ? "La plus grande faille fiscale de cet état, c’est votre impôt sur le revenu", lui rétorque-t-il. "Elle est tellement large que je pourrais y faire passer mon Hummer !".
À l’approche du scrutin à l’automne, Schwarzy fait la course en tête dans les sondages. Tout le monde le voit déjà s’installer à Sacramento lorsque le matin du 2 octobre, le Los Angeles Times publie les témoignages accablants d’une demi-douzaine de femmes. Certaines accusent la star de leur avoir touché les seins, d’avoir tenus des propos sexuels obscènes. L’une d’elles explique qu’il a essayé de lui enlever son maillot de bain dans un ascenseur : "Est-ce qu’il m’a violée ? Non. Est-ce qu’il m’a humiliée ? Oui."
Un mea culpa surréaliste
Interrogée 30 ans plus tard, la reporter Carla Hall explique qu’à l’annonce de la candidature de l’acteur, les équipes du quotidien ont épluché "toutes les histoires qu’on entendait sur lui depuis des années. Sauf que personne n’avait jamais enquêté dessus. On avait 6 semaines et on a commencé à chercher ces femmes pour les faire parler. Et on les a trouvées grâce à des contacts à Hollywood."
Le jour-même, le colosse prend la parole lors d’un meeting. Il commence par accuser ses adversaires de vouloir le détruire… avant de se lancer dans un mea culpa surréaliste. "Beaucoup de ces histoires sont fausses. Mais comme je dis toujours, Il n’y a pas de fumée sans feu", reconnaît-il. "Oui, je me suis parfois mal comporté. J’ai commis des erreurs, je trouvais ça amusant (…) À ces personnes, je tiens à dire que je suis profondément désolé. Je m’excuse, ce n’est pas l’homme que j’aspire à être."
Je n’ai jamais peloté personne. Remonter leur haut pour les peloter ? Ce n’est pas moi !
Arnold Schwarzenegger
Sur le moment, ce mea culpa est un désastre. "On a reçu tellement de tuyaux qu’on a dû assigner plus de journalistes sur l’affaire !", se souvient Carla Hall. Durant les jours qui suivent, les révélations se multiplient, portant à 15 le nombre des accusatrices. Au fil des jours, l’acteur se raidit. Et effectue même un virage à 180 degrés. "C’est en grande partie inventé", explique-t-il à un reporter depuis son bus de campagne. "Je n’ai jamais peloté personne. Remonter leur haut pour les peloter ? Ce n’est pas moi !".
Dans le staff du candidat, l’inquiétude est à son maximum… Et pourtant. À la surprise générale, l’opinion se montre imperméable au scandale. Mieux encore : il est perçu comme une tentative de déstabilisation d’un outsider qui vient bousculer le jeu politique. "On nous a accusés d’avoir mis les articles de côté pour les sortir 5 jours avant l’élection", regrette Carla Hall. "Mais si c’est sorti le 2 octobre, c’est parce que c’est le temps que ça nous a pris pour mener l’enquête !"
Le 7 octobre, Arnold Schwarzenegger sera finalement élu sous la bannière républicaine avec 48,6% des suffrages, contre 31,5% au démocrate Cruz Bustamente. Un premier mandat avec des hauts comme sa politique en faveur de la limitation des gaz à effets de serre, saluée par les organisations écologistes. Et des bas avec son refus d’instituer le mariage gay ou de gracier des condamnés à la peine de mort, deux sujets embarrassants qui ne sont pas abordés dans le documentaire.
Après un second mandat, de 2007 à 2011, il met fin à sa carrière politique. Quelques mois plus tard, le couple Schwarzenegger annonce sa séparation et dans la foulée, le gouverneur redevenu acteur révèle qu’il a eu un enfant avec une de ses employées de maison. Le 1er juillet, Maria Shriver demande le divorce après être restée à ses côtés durant les tempêtes. "C’était mal !", reconnaît-il aujourd’hui au sujet de ses agissements envers les femmes. "C’étaient des conneries. Oubliez toutes les excuses, c’était mal."
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