MALAISE – Les scénaristes de The Crown ont-ils pris trop de libertés avec les faits relatés dans la saison 4, en ligne depuis la mi-novembre ? Outre-Manche, le débat fait rage, à tel point que certains suggèrent que Netflix prévienne ses abonnés qu’il s’agit d’une fiction. Explications.
Si vous faites partie des millions d’accros à la série Netflix The Crown, vous êtes sans doute déjà allés faire un tour sur l’une des nombreuses pages consacrées à la famille royale britannique, histoire de parfaire vos connaissances historiques. Ce phénomène, décortiqué dans un article passionnant du Washington Post, publié en 2018, s’est sans doute amplifié depuis le lancement le 15 novembre dernier de la très attendue saison 4. Couvrant la période allant de 1977 à 1990, elle relate notamment l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher et le mariage de raison entre le Prince Charles et Diana Spencer.
Est-ce parce que certains protagonistes sont encore en vie ? Ou que de nombreux spectateurs ont directement vécu cette période, de près ou de loin ? Toujours est-il qu’aussitôt "binge-watché", les 10 épisodes se sont attirés de vives critiques outre-Manche. Le créateur de la série Peter Morgan aurait-il pris de trop nombreuses libertés avec la réalité ? "La fausse histoire de The Crown est aussi corrosive que les fake news", résume dans The Guardian Sir Simon Jenkins, un journaliste qui a couvert les événements relatés à l’écran. Et qui accuse la fiction de déformer les faits, ou de les inventer purement et simplement.
Un avertissement avant chaque épisode ?
Un exemple flagrant est la lettre que Louis Mountbatten, le grand-oncle du Prince Charles, aurait écrit à ce dernier, peu avant d’être assassiné par l’IRA, pour lui intimer de mettre un terme à sa relation avec Camilla et de trouver une jeune épouse qui lui donnera un héritier. Dans le podcast officiel de la série, Peter Morgan reconnaît lui-même que cette missive au cœur du premier épisode n’a jamais existé. "Je l’ai inventée. Que ça soit bien ou mal, ce que nous savons c’est que Mountbatten voulait amener Charles à se rendre qu’il fallait arrêter de s’amuser", explique-t-il.
Pour l’historien Hugo Vicker, spécialiste de la couronne britannique, cette méthode d’écriture est purement scandaleuse. "Les gens croient ce qu’ils voient dans cette série parce qu’elle est bien filmée et jouée par de bons acteurs. Vous ne pouvez pas la disqualifier comme les saloperies qu’on trouve dans les tabloïds", observe-t-il dans un entretien accordé à CNN. "Le problème, c’est que dans cette saison en particulier chaque membre de la famille royale est décrit, selon moi, de manière négative. C’est totalement à sens unique et totalement contre le Prince Charles."
Si depuis la première saison, Buckingham Palace refuse de s’immiscer dans la fabrication de la série, l’affaire est remontée en haut lieu. Dans une interview accordée le week-end dernier au Mail on Sunday, le ministre de la Culture Oliver Dowden estime que The Crown "est une œuvre de fiction magnifiquement produite. Mais qu’à l’image d’autres productions télévisées, Netflix devrait clairement dire que ce n’est pas plus que ça". Craignant "qu'une génération de téléspectateurs, qui n'a pas vécu ces événements, puisse prendre la fiction pour des faits", il dit vouloir écrire à la plateforme pour lui suggérer d’inclure un avertissement au début de chaque épisode.
L’idée peut paraître saugrenue. Mais Olivier Dowden a reçu un soutien inattendu ce mardi en la personne de la comédienne Helena Bonham Carter. Dans le nouvel épisode du podcast officiel de la série, celle qui interprète la princesse Margaret dans les saisons 3 et 4 estime que The Crown a la "responsabilité morale" de dire à ses spectateurs qu’il ne s’agit "pas d’un docu-drama". Tout ou louant le travail de recherches de Peter Morgan, elle estime qu'il faut faire la distinction entre "notre version" et "la vraie version". Vous suivez ?
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