Swann Arlaud à l'affiche d'"Exfiltrés" : "Ce film questionne la façon dont on s’engage pour donner un sens à sa vie"

Propos recueillis par Jérôme Vermelin
Publié le 5 mars 2019 à 12h47

Source : Sujet TF1 Info

INTERVIEW - Swann Arlaud et Finnegan Oldfield sont les héros d’"Exfiltrés", le premier film d’Emmanuel Hamon, en salles mercredi. LCI a rencontré les deux acteurs pour les interroger sur ce thriller politique et humaniste en prise directe avec l’actualité.

"Exfiltrés", c’est l’histoire de Sylvain (Swann Arlaud), un Français dont l’épouse quitte la France pour la Syrie avec leur petit garçon, avant de se rendre compte qu’elle est tombée aux mains des terroristes de Daech. Désemparé, il va trouver de l’aide auprès de Gabriel (Finnegan Oldfield), un jeune humanitaire qui va prendre tous les risques pour les réunir.

Inspiré d’une histoire vraie, qui s’est déroulée au printemps 2015, le premier film d’Emmanuel Hamon, en salles mercredi, réunit deux comédiens qui s’étaient déjà rencontrés par le passé sur "Ni le ciel ni la terre" de Clément Cogitore, en 2015, et sur "Une vie de Stéphane Brizé", en 2016. Interview croisée.

"Exfiltrés" s’inspire d’une histoire vraie méconnue du grand public. Avez-vous été surpris, voire sidérés en lisant le scénario ?

Swann Arlaud : Sidéré, non. Parce que ce sont quand même des thèmes dont on est proches. Ça fait partie du monde tel qu’il est aujourd’hui, je crois. Après, on lit toujours un scénario par le prisme du personnage qu’on nous propose et moi, ce qui m’a touché, c’est l’histoire de ce mec totalement démuni qui se demande comment il va pouvoir récupérer son fils. Sa femme peut-être, mais d’abord son fils. C’est ça qui m’a attrapé tout de suite. Au-delà, il y a cette fresque assez large sur une jeunesse de différents pays, avec différents parcours, qui interroge la question de l’engagement.

J'avais envie de jouer quelqu’un qui se bouge, qui n’est pas assis dans son canapé ou derrière une table à refaire le monde
Finnegan Oldfield

Finnegan Oldfield : C’est ce qui est raconté à travers mon personnage qui tente de changer les choses, quitte à se mettre en danger. Il va sur le terrain, il apprend l’arabe, il veut vraiment aider les gens. C’est quelque chose qui vraiment m’intéressait. Jouer quelqu’un qui se bouge, qui n’est pas assis dans son canapé ou derrière une table à refaire le monde. Même si je ne jette pas la pierre aux gens qui ne sont pas comme ça.

Swann Arlaud : Cette envie d’être utile à quelque chose est d’ailleurs à l’origine du départ du personnage de Faustine (Jisca Kalvanda). Elle n’a pas trouvé sa place en France et elle pense qu’en partant travailler en Syrie, elle va donner un sens à sa vie. Tous ces personnages questionnent la façon dont on s’engage pour donner du sens à sa vie.

Avez-vous eu besoin de rencontrer des acteurs, des témoins de cette histoire pour nourrir votre interprétation ? 

Finnegan Oldfield : Ce qui est super, c’est qu’on a tourné avec un jeune acteur syrien, Kassem Al Khoja, qui a grandi là-bas, qui a vécu là-bas et qui est réfugié en France depuis 2015. Il a été essentiel dès le début, dès les premières répétitions. Emmanuel Hamon connaissait bien ce sujet. Mais travailler avec ce mec qui t’explique plein de choses entre les prises sur la situation politique dans son pays, c’était très enrichissant. Et puis c’est aussi un film qui parle de la rencontre entre des jeunes de la même génération. Quand on entend "réfugié syrien", on a tendance à dramatiser le truc. Et dans la réalité, c’est juste quelqu’un qui est comme nous, même s’il a vécu plus de choses. Je pense qu’on retrouve ça à l’écran.

VIDÉO – Exfiltrés au cinéma : un aller sans retour pour les femmes en SyrieSource : Sujet TF1 Info

Swann Arlaud : Grâce au film, on sort un peu du manichéisme sur ces sujets. Kassem nous a raconté l’histoire de son pays comme on ne nous la raconte pas ici. A mon niveau, en revanche, il n’y avait pas grand-chose à préparer. Je me suis demandé si je devais lire le Coran, mais non puisque mon personnage est complètement surpris par le départ de sa femme. Il a manqué peut-être d’observation. Disons qu’il y a quelque chose qu’il a raté. Je n’ai pas non plus eu envie de rencontrer l’homme auquel c’est arrivé. Parce que le film n’est pas une reconstitution absolue. C’est une fiction basée sur des faits réels.

Avez-vous l'un et l'autre l’impression d’être des comédiens engagés ? 

Swann Arlaud : Pas du tout ! Je n’ai pas l’impression d’être un comédien engagé, ni de faire de la politique quand je fais du cinéma. Je pense que l’engagement c’est beaucoup plus sérieux que ça. Après, si le cinéma fait, lui, de la politique, et peut servir à mettre des sujets sur la table, alors tant mieux.

Le film montre la capacité d’une certaine jeunesse à réinventer des moyens de lutter et de militer
Swann Arlaud

Finnegan Oldfield  : Je pense exactement la même chose ! (sourire). Moi ce que j’aime au cinéma, c’est quand un sujet amène à un autre. Par exemple tu vas voir "Girl" qui parle d’un jeune danseur qui veut changer de peau et ça t’amène à réfléchir au rapport au père. Ce qui est chouette avec "Exfiltrés", c’est qu’on y parle d’engagement, mais ça aborde aussi l’amitié, la jeunesse d’aujourd’hui.

Swann Arlaud : Le film aborde d’ailleurs un choc de générations. Il y a celle qui pense qu’il faut faire appel aux institutions, que la réponse va venir d’au-dessus, alors que non. Et puis celle incarnée par les personnages joués par Finnegan et Kassem, un Français et un Syrien qui vont mettre en place une solution pour sortir cette femme et son enfant. Ça montre la capacité d’une certaine jeunesse à réinventer des moyens de lutter et de militer. Depuis toujours d’ailleurs… 


Propos recueillis par Jérôme Vermelin

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