Pour "Coup de chance", son premier film en français, Woody Allen s’est offert la crème du cinéma français.Une comédie policière mordante dans la veine de "Match Point", en salles ce mercredi.Fans du cinéaste, Valérie Lemercier et Melvil Poupaud ont raconté leur expérience à ses côtés à TF1info.
Dans Coup de Chance, le nouveau film de Woody Allen, ils sont comme chien et chat. Melvil Poupaud incarne Jean Fournier, un homme d’affaires trompé par sa jeune épouse tandis que Valérie Lemercier joue sa belle-mère, passionnée de romans policiers. Et qui a bien raison de se méfier de son gendre… TF1info est allé à la rencontre des deux comédiens, ravis de faire partie de son premier film dans la langue de Molière.
Franchement, vous rêviez de jouer un jour dans un film de Woody Allen ?
Melvil Poupaud : Non, c’est vraiment un concours de circonstances. Lui qui vient faire un film en France, le fait que notre rencontre se passe bien, que le scénario nous plaise et que nos partenaires soient aussi enthousiastes que nous. C’est l’exemple même d’un coup de bol.
Valérie Lemercier : Moi ce n’est même pas que je n’en rêvais pas… Je me contentais de voir ses films en me disant que ça ne pourrait jamais arriver puisqu’ils se passent quasiment tous à New York, avec des acteurs américains. Je voulais juste être invitée à les regarder ! Alors tout à coup en faire partie… C’est sa malchance à lui qui fait qu’on a eu un coup de chance de le faire.
C’est-à-dire ?
Valérie Lemercier : Comme il ne peut plus tourner aux États-Unis, il a fait ce film ici ! C’est quelqu’un qui est tellement obsédé par le travail, c’est tellement toute sa vie que de divertir les gens. Il ne prend jamais de vacances, s’il fait de la gym c’est pour être en forme sur les tournages… Malgré tout ce qui lui est arrivé, il a réussi à tourner son cinquantième film chez nous. Parce qu’il connait suffisamment notre langue, Paris, la France…
Melvil Poupaud : Dès le début il nous a dit qu’il était reconnaissant parce que la France était l’un des premiers pays qui avait soutenu son travail, les critiques français ont toujours considéré que c’était un génie alors qu’aux Etats-Unis, il n’a pas la même aura. Pour lui, c’est un hommage de faire son cinquantième et dernier film ici. Pour remercier la France et les grands cinéastes français qui l’ont inspiré.
Vous dites dernier film. Il n’est pas si catégorique que ça, non ?
Melvil Poupaud : J'ai pensé ça au début, parce que lui-même l’avait dit dans des interviews. Au début du tournage, il était un petit peu fatigué, on sentait que ça faisait quelques années qu’il n’avait pas tourné, notamment à cause du Covid, alors que d’habitude il avait un projet par an. Et puis petit à petit il se redressait, il demandait plus de prises, plus d’indications. Plus de plaisir, plus de joie, plus de sourires. Et à la fin du tournage, j’ai l’impression qu’il était prêt à repartir directement sur un autre film.
Comment vous a-t-il approchée ? Est-ce qu’il connaissait votre travail ?
Valérie Lemercier : En ce qui me concerne, je pense qu’il ne me connaissait pas du tout. Il a vu des petits trucs, il a demandé si je n’étais pas trop comique. Il a eu peur de ça. Il m’a écrit une lettre en disant "si le rôle ne vous convient pas, j’espère qu’on aura l’occasion de retravailler ensemble, mais j’ai 86 ans". Ça m’a fait rire ! En fait, je crois - je ne parle pas pour moi mais pour les trois jeunes – qu’il voulait filmer des gens beaux.
Melvil Poupaud : J’imagine que c’est un scénario qui aurait très bien pu se passer à New York, dans la haute bourgeoise, avec le même genre d’écrivain bohème que joue Niels Schneider. Et puis en venant ici il a fait confiance à son équipe casting mais aussi au hasard et à la chance. Il répète souvent que même s’il travaille beaucoup, ses meilleures idées sont liées à la chance. Un acteur devait jouer un rôle, il est remplacé par un autre, etc. À l’image de la philosophie de son film, c’est quelqu’un qui se repose un peu sur le hasard en se disant que ça amènera des choses bien.
Dès les premières répliques, on reconnaît tout de suite sa patte. C’est du pur Woody Allen, non ?
Melvil Poupaud : C’est du pur Woody Allen, mais avec une couche supplémentaire qui vient de sa dernière période, plus sombre, plus noire, avec plus d’ironie. Il n’est pas désabusé parce qu’il aime s’amuser comme l’a dit Valérie. Mais c’est plus une vision de la vie, à la merci de quoi on est. Qu’est-ce qui fait qu’une vie est réussie, une autre ratée ? C’est un petit traité philosophique sous une apparence de vaudeville et de farce.
Est-ce qu’il y a un truc qui vous a franchement surpris en travaillant avec lui ?
Valérie Lemercier : Sa famille ! Moi, je ne savais pas qu’il avait sa sœur avec lui tout le temps, mais aussi une nièce, ses filles, sa femme… Je ne savais pas qu’il était aussi entouré. Sa sœur, elle est là tout le temps. Elle a un peu la tête de Woody, mais sans le bob !
Melvil Poupaud : Moi, j’ai découvert quelqu’un qui n’est pas dans le système, très indépendant dans sa façon d’être, dans sa façon de vivre. J’ai vu un artiste très concentré sur son travail, avec beaucoup d’humilité...
Valérie Lemercier : Et qui est capable de manger des entrées en même temps que le dessert. Dans la même bouche. Et ça c’est rare.
Ah bon ?
Valérie Lemercier : Ben oui il fait ce qu’il veut. Qu’est-ce qu’on va l’emmerder, il a 87 ans ! S’il a envie d’avoir un peu d’entrée avec un peu de dessert… Moi ma mère, elle mélange les huitres et les framboises. Parce qu’elle est très gourmande. Ben voilà.
Vous aimeriez être comme lui à 87 ans ?
Melvil Poupaud : Moi, je ne suis pas sûr d’arriver jusqu’à 87 ans… Sinon oui. Il travaille, il est entouré, il est plein d’humour, il a du recul sur la vie. Même si c’est un paranoïaque comme on voit dans ses films, j’ai découvert un type qui a passé sa vie à prendre des risques. Ce n’est pas une vie d’aventurier, mais presque.
Valérie Lemercier : C’est la vie de quelqu’un pour qui la meilleure chose, c’est toujours le travail. Mieux que les vacances, mieux que tout le reste. Dans sa biographie, j’ai adoré ce passage où il raconte qu’il écrivait des gags pour des gens dans un dîner. Ils venaient le voir, ils lui achetaient deux vannes, 50 dollars le gag, pour avoir l’air drôle en société. Je trouve ça génial.
>> Coup de chance de Woody Allen. Avec Lou de Laâge, Melvil Poupaud, Niels Schneider, Valérie Lemercier. En salles mercredi 27 spetembre