"Ça me rend service, une France apaisée !" : Omar Sy évoque la mémoire des Tirailleurs sénégalais dans Sept à Huit

Virginie Fauroux - Propos recueillis par Audrey Crespo-Mara
Publié le 1 janvier 2023 à 21h08
Sept à Huit : le portrait d'Omar Sy
Sept à Huit : le portrait d'Omar Sy

Omar Sy est à l'affiche du film "Les Tirailleurs", en salle ce mercredi 4 janvier.
L'occasion pour l'acteur, de passage à Paris, de répondre aux questions d'Audrey Crespo-Mara ce dimanche dans "Sept à Huit".
Une interview dans laquelle il revient sur ce rôle cher à son cœur et rend hommage à son père sénégalais.

Avec son sourire accroché en bandoulière, c'est l'une des personnalités préférées des Français. Et ce n'est pas parce qu'Omar Sy a franchi l'Atlantique il y a dix ans, pour s'établir à Los Angeles avec femme et enfants, qu'il a perdu de sa superbe dans le cœur de ses compatriotes. Aujourd'hui, l'acteur incarne la version française de "l’American Dream", et ça lui va bien. Mais n'allez surtout pas dire qu'il a fui l'Hexagone depuis "Intouchables" et le succès que l’on sait. Lui pense plutôt être allé chercher "une forme de sérénité" au pays des Anges. "La distance géographique me permettait d'avoir un peu de distance avec ce qui m'arrivait. À l'époque, je suis de la télévision, c'est le duo Omar et Fred et puis, il y a ce Omar Sy qui prend une place et qui devient un truc que je ne maîtrise pas trop, qui est totalement neuf", explique-t-il à Audrey Crespo-Mara, dans la vidéo en tête de cet article. "Comment recevoir ces choses-là ? Comment le gérer ? Et surtout, vis-à-vis de mes enfants", précise-t-il.

"La classe et l'élégance"

Une chose est sûre, face aux Américains, la notoriété n'est pas vécue de la même façon, même si le succès de la série Lupin sur Netflix l'a rendu mondialement connu. "Ça a accentué les choses, mais les Américains ont un autre rapport à la notoriété. Ils sont moins dans l'approche, ils reconnaissent un peu de loin, ils s'expriment un peu moins là-dessus. Ils sont plus discrets", affirme Omar Sy, désormais affublé du titre de "Frenchy d’Hollywood". Une position qui a renforcé son chauvinisme. "Je suis défini comme 'le Français' donc forcément, dès qu'il faut défendre la France, je suis là". Être le Frenchy, c'est aussi "la classe et l'élégance", selon la définition de l'acteur. 

Mais Omar Sy ne se résume pas qu'à ça. Il est Français, certes, mais aussi Sénégalais par son père et Mauritanien par sa mère. Des racines dans lesquelles il puise sa force et qu'il a voulu mettre en lumière dans "Les tirailleurs", à l'affiche le 4 janvier. Un film qu'il porte depuis dix ans et qu'il a coproduit. L'histoire d'un père qui s'enrôle dans l'armée française au temps des colonies pour rejoindre son fils, recruté de force, et le protéger de l’horreur des tranchées. À travers eux, est racontée l’histoire de 200.000 Tirailleurs sénégalais, dont 30.000 sont morts lors de la Première Guerre mondiale. C'est l'une des premières fois que leur existence est portée à l'écran.

Quand on vient raconter l'histoire des Tirailleurs, elle ne vient pas effacer la mémoire des Poilus, elle s'additionne, c'est ça notre histoire en fait.
Omar Sy

Des Tirailleurs auxquels Omar Sy entend rendre hommage, estimant qu'on les a oubliés. "On a beaucoup d'images, de ressentis, de textes sur ce qu'ont vécu les Poilus, mais les Tirailleurs, peu, donc c'est juste ça en fait : ramener un peu plus de détails et d'informations sur ces soldats-là qui sont autant méritants", dit-il. Et de poursuivre : "quand on vient raconter l'histoire des Tirailleurs, elle ne vient pas effacer la mémoire des Poilus, elle s'additionne, c'est ça notre histoire en fait, c'est les deux. C'est toutes ces mémoires qu'il faut accepter et reconnaître". 

Un vœu pieu ? Pas si sûr... L'acteur souhaite juste que ces mémoires additionnées permettent d'avoir une France plus apaisée. "Ça me rend service, moi, une France apaisée ! Personne n'aime les embrouilles", lâche-t-il. Et l'acteur sait de quoi il parle, lui qui a fait le choix d'épouser une femme d'une autre couleur que la sienne et dont les enfants sont métis. "Le mélange et l'harmonie, je le vois, je le vis, donc je sais que c'est possible et donc forcément, j'ai peut-être plus d'espérances que les autres", admet-il. 

Une histoire de transmission

Ce film, c'est aussi l'histoire d'une transmission entre un père et son fils. Ce qui n'est pas anodin pour Omar Sy, anecdote à l'appui. L'acteur raconte ainsi le trajet en voiture entrepris plus jeune avec son père depuis la Mauritanie et le Sénégal. "Ça m'a beaucoup apporté. J'ai beaucoup compris sur ce qu'était mon père, sur le trajet qu'il avait fait. Et puis, c'était aussi le moyen de parler de son enfance. Ça m'a vraiment donné quelque chose d'assez costaud, un ancrage", assure-t-il. Un voyage qu'il a réitéré avec ses propres enfants, pour qu'ils puissent comprendre ce que leurs grands-parents ont traversé. Soit le lot de ce que l'on nomme aujourd'hui les migrants.

Même si l'histoire n'est plus tout à fait la même. "C'était moins compliqué pour mes parents. Le pays était dans une autre démarche par rapport à ça. Il y avait aussi un autre lien avec les gens qui venaient de cet endroit-là du monde, des anciennes colonies. Il y avait une utilité dans cette main d'œuvre assumée, ce qui est moins le cas", analyse-t-il, déplorant une situation "beaucoup plus dramatique aujourd'hui puisque des gens meurent en faisant ce trajet". "Ils ne prennent pas des bateaux, mais des embarcations, c'est une aventure quasiment suicidaire. Et une fois arrivés, c'est une aventure encore plus dingue qui les attend. On oublie les vies de ces gens, les vies perdues, les destins brisés, les familles déchirées", énumère-t-il.  

Face à ce constat "regrettable", quel vœu Omar Sy fait-il, en ce 1er janvier, pour l’année à venir ? "Un peu d'apaisement et de discussions. Il y a beaucoup de discours, mais peu de conversations. Donc, je souhaite beaucoup de conversations pour l'année 2023. Parlez-vous, écoutez-vous", conclut-il.


Virginie Fauroux - Propos recueillis par Audrey Crespo-Mara

Tout
TF1 Info