Comment les éleveurs de porcs accueillent-ils le "plan d'urgence" du gouvernement ?

La rédaction de TF1info | Reportage TF1 Nicolas Hesse et Renan Hellec
Publié le 1 février 2022 à 13h10, mis à jour le 1 février 2022 à 20h06
JT Perso
Comment désactiver votre Adblocker
  • Cliquez sur l'icône de votre Adblocker installé dans votre navigateur. En général elle se trouve dans le coin supérieur droit de votre écran. Si vous utilisez plusieurs adblockers, veillez à bien tous les désactiver pour pouvoir accéder à votre vidéo.
  • Suivez les instructions indiquées par votre Adblocker pour le désactiver. Vous devrez peut-être sélectionner une option dans un menu ou cliquer sur plusieurs boutons.
  • Lorsque votre Adblocker est désactivé, actualisez votre page web.
  • Remarque : Si vous utilisez le navigateur Firefox, assurez-vous de ne pas être en navigation privée.
adblock icone
Un bloqueur de publicité empêche la lecture.
Veuillez le désactiver et réactualiser la page pour démarrer la vidéo.

Source : JT 13h Semaine

D'ici à l'année prochaine, 30% des éleveurs français risquent de disparaitre à cause d'une crise sans précédent.
Face à la hausse des charges et la chute des prix, ils vendent leurs bêtes à perte.
Pour leur venir en aide, le gouvernement a annoncé lundi un "plan d'urgence" de 270 millions d'euros.

"C'est comme si je balançais des billets dans la nature" : dans son exploitation du Maine-et-Loire à Pouancé, Jean-Jacques Guerois, éleveur de porcs, nourrit ses porcelets de trois semaines comme chaque jour, mais ce mardi, il se sent particulièrement désabusé. "Je sais que je dépense plus que ce que je vais récupérer quand je vais vendre mes bêtes", déplore-t-il dans le reportage du 13H de TF1 en tête d'article. 

Chaque année, l'éleveur produit 5000 cochons, mais depuis plusieurs mois, il subit la forte baisse du prix du porc et doit faire face à l'augmentation de ses coûts de production, comme la nourriture qui représente 70% du prix de l'animal. "Il faut à peu près 35 tonnes d'aliments par semaine. L'aliment qui est passé de 220 à 350 euros la tonne donc ça fait une surcharge par rapport à une année normale de presque 5000 euros par semaine", déplore l'éleveur, qui perd ainsi 13.000 euros tous les mois. 

"L'aliment est passé de 250 euros par tonne à 350 euros, les charges explosent. On arrive au bout, il faut une solution très rapide", abonde Baptiste Adam, producteur des Côtes-d'Armor, qui témoigne dans le sujet du 20H de TF1 ci-dessous. À cause de la hausse du prix des céréales, mais aussi de l’énergie et de l’essence, tandis que le cours de la viande chute, élever des cochons n’a jamais coûté aussi cher depuis huit ans, selon l'interprofession nationale porcine Inaporc. 

Eleveurs de porcs : vers une aide exceptionnelle ?Source : JT 20h Semaine

Pour aider cette filière porcine très fragilisée, le gouvernement a annoncé lundi 31 janvier un "plan d'urgence" de 270 millions d'euros pour les 10.000 élevages de porcs français. Ce plan se divise en deux volets, l'un de 75 millions d'euros et un second de 175 millions. Le premier devrait être versé "dans les deux ou trois semaines à venir, aux producteurs les plus fragiles, selon les critères définis par la profession", a précisé le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, auprès du journal Ouest-France. Le second devrait arriver au plus tard début mai, une fois l'aval de l'Union européenne obtenu. Les agriculteurs pourraient aussi profiter de Prêts Garantis par l'État et de 20 millions d'exonérations de cotisations sociales.

"Cette enveloppe ne va pas suffire"

L'objectif de cette enveloppe est de "consolider les trésoreries de nos éleveurs porcins", a assuré le ministre lundi, à l'issue d'une réunion avec les professionnels de la filière. "De mémoire, c'est probablement l'une des crises les plus graves traversées par le secteur porcin depuis maintenant de nombreuses années", a-t-il appuyé. 

Pour les syndicats, cette annonce représente déjà un bon début. "C'est une aide qui va en partie aider les producteurs, quand on sait que la perte est plutôt de 440 millions d'euros sur un an : vous imaginez bien que cette enveloppe ne va pas suffire", déclare dans le reportage ci-dessus François Valy, président de la Fédération nationale porcine et vice-président d'Inaporc. "Cette aide constitue une bulle d’oxygène pour la filière alors que les fermes sont prises en étau", appuie l'interprofession dans un communiqué, alertant sur le fait que 30% des élevages auraient pu disparaître sans cette aide. Mais "ce soutien financier ne suffira pas, à lui seul, à relever la filière porcine victime d’une crise historique", poursuit-elle.

"C'est beaucoup et peu en même temps", commente quant à lui Jean-Jacques Guerois. "Cela règle l'urgence du problème pour ceux pour lesquels les banques ne veulent plus suivre les financements court terme, qui n'ont plus d'argent pour acheter de l'aliment pour les cochons." Mais pour l'éleveur, il n'y a qu'une seule solution pour soulager le secteur : "Il faut que les prix remontent, ce sera le seul salut pour la production porcine", estime-t-il.

La vente au rabais de la viande aux grandes surfaces, l'angle mort du plan ?

S'il répond à l'urgence, cet argent ne résout donc pas tout, notamment le prix de vente du porc. "Dans les supermarchés, le prix auquel les produits sont vendus est ridicule", fustige une passante dans le bourg de Pouancé, à quelques kilomètres de l'exploitation de Jean-Jacques Guerois. "Il faut qu'ils soient payés à leur juste prix, pour réussir à vivre de leur activité", estime une autre. 

En grande surface, la hausse des coûts de production n'est pas en effet répercutée, si bien que certains groupes bradent même la viande à moins de deux euros le kilo. Un kilo pourtant acheté en moyenne 1,40 euro par les enseignes alors que le producteur débourse 1,69 euro à le produire, soit 29 centimes de pertes pour les producteurs. Selon Inaporc, "un éleveur perd aujourd’hui entre 25 et 30 euros sur chacun de ses porcs vendus"

Au cas par cas, ce chiffre peut encore grimper. Un autre éleveur des côtes d'Armor, Jérémy Labbé, a fait les calculs pour son élevage : "Sur chaque porc, on perd environ 40 euros. Je vends un peu plus de 1000 bêtes par mois, donc je perds 40.000 euros". Sans un geste de la grande distribution, il le sait, sa situation ne pourra pas durer indéfiniment. "On ne devrait jamais vendre à pertes, personne hormis les agriculteurs ne fait ça", s'irrite-t-il. 

"Si demain je m'arrête, comme j'ai des crédits sur le dos, je me retrouverai à la rue. La maison y passe, la famille se retrouve sur le trottoir... Je préfère ne pas y penser, en fait", lance quant à lui Jean-Jacques Guerois, fils d'agriculteur, installé depuis sept ans. 

Lire aussi

Pour tenter d'enrayer le problème, "la loi Égalim2 sera scrupuleusement respectée", a promis auprès d'Ouest-France Julien Denormandie, faisant référence à une loi promulguée en octobre 2021, visant à mieux prendre en compte les coûts de production des agriculteurs dans les prix d'achats de leurs produits. Selon lui, "plus de 250 enquêtes" ont déjà été ouvertes depuis le 1er janvier et qu'il y aura cette année "quatre fois plus d’enquêtes que l’an dernier", a-t-il annoncé. L'Inaporc appelle quant à elle à la "solidarité citoyenne", avec une campagne de communication sera aussi renforcée autour du logo "Le Porc Français".


La rédaction de TF1info | Reportage TF1 Nicolas Hesse et Renan Hellec

Tout
TF1 Info