SEXE, TEXTO ET VIDÉO - Le "sexting", contraction de "sexe" et de "texto" désignant les SMS à connotation sexuelle, engendrerait des comportements à risque, selon une étude canadienne, révélant incidemment une banalisation de cette pratique chez les ados.
Croyez-le ou non : un jeune sur quatre* serait un(e) excité(e) du clavier, et donc un(e) client(e) du "sexting", cette contraction de "sexe" et de "texting" (envoi de SMS au contenu sexuellement explicite) consistant à envoyer des photos coquines à son/sa partenaire ou aux plans d'un soir. Une technique sans filtre, pour draguer ou maintenir le désir, qui affecterait les plus jeunes, pas réellement rompus à la pratique, ni forcément conscients de leurs actes.
Selon une méta-analyse canadienne publiée dans la revue JAMA Pediatrics, s’appuyant sur 23 études préalablement réalisées et basée sur plus de 41.000 participants âgés de 12 à 17 ans, le "sexting" exposerait non seulement aux comportements sexuels à risque (soit une incitation à avoir plusieurs partenaires sexuels) mais aussi aux troubles mentaux - les adolescents "sextant" auraient ainsi tendance à être plus sujets à l'anxiété et à la dépression que ceux qui n'envoient pas de "sexto". Par-dessus tout, selon les résultats parus dans JAMA Pediatrics, les adeptes du sexting seraient également moins susceptibles d'utiliser un moyen de contraception.
"Le sexting est devenu une pratique presque courante, normale, chez les jeunes actuels", constate le sexologue Samuel Comblez dans son livre "La sexualité de vos ados" (Solar éditions), paru en 2018. "C’est le signe que le partenaire est totalement dévoué au désir de l’autre, qu’il accepte de se montrer nu même quand l’envie n’y est pas. C’est devenu un marqueur de l’implication dans la relation. Rien ne doit être caché, tout est visible, public, même le corps. Les adolescents se mettent en scène, pensent naïvement que photos et vidéos resteront cachées, et oublient qu’une photo, même envoyée en mode privé, peut être facilement conservée sur un disque dur d’ordinateur et repartagée à l’infini."
Risque élevé chez les très jeunes adolescents
Toujours selon l'étude, les adolescents plus âgés sont moins vulnérables aux risques du sexting car ils peuvent être plus matures sur les plans émotionnel et cognitif que les adolescents plus jeunes. De quoi alerter les parents ? Non, il s'agit là d'un "aspect normatif de l'exploration sexuelle des adolescents", selon Camille Mori, chercheuse en psychologie à l'université de Calgary. Ce que confirme le sexologue Samuel Comblez dans son livre : "Les réseaux sociaux, Internet et les outils numériques en général sont largement utilisés par les adolescents. Ils sont devenus des experts, bien meilleurs que leurs parents. Il est alors bien difficile de les mettre en garde contre des pratiques auxquelles vous ne connaissez rien !"
En tant que parent, tâchez de freiner cette tentation de visibilité à tout prix.
Samuel Comblez, psychologue
Cela n'empêche pas les messages de prévention plus que jamais essentiels : "Parmi les relations virtuelles, aujourd’hui largement répandues, nombre d’entre elles sont douloureuses, et parfois dramatiques, écrit Samuel Comblez. En tant que parent, tâchez de freiner cette tentation de visibilité à tout prix." D'où la nécessité absolue d'un dialogue franc et décomplexé pour rappeler aux ados précoces l'importance du consentement, le respect mutuel et de prévenir des dangers du "revenge porn".
En revanche, entre adultes consentants, les sextos peuvent s'avérer source d'excitation, comme nous le révélait il y a quelques mois dans un article le sexologue Patrick Papazian : "Comme un rituel amoureux, le sexto peut être une belle invitation qui permet à chacun de se préparer dans sa tête, d’imaginer de nouvelles manières de prendre et donner du plaisir, de laisser des messages équivoques pour faire monter la température et se mettre en condition pour prendre du plaisir le jour J."
* Selon une étude parue en avril 2018 dans la revue JAMA Prediatrics