Mardi 9 mai, un professeur contractuel du lycée professionnel Maria Deraismes, dans le 17e arrondissement, a brûlé 63 copies d'anglais devant l'établissement.Son objectif : dénoncer le faible niveau des élèves et "annuler l'épreuve" pour qu'ils n'aient pas une note catastrophique.Interpellé et placé en garde à vue, il en est ressorti sous contrôle judiciaire et sera jugé le 27 octobre.
Son geste n'est pas passé inaperçu. Mardi 9 mai au matin, jour de la rentrée scolaire dans la capitale, un professeur contractuel du lycée professionnel Maria Deraismes, situé dans le 17e arrondissement de Paris, a brûlé devant l'établissement et sous les yeux de plusieurs élèves 63 copies d'anglais du bac professionnel.
"Moi, le premier objectif de ce geste, c'est d'annuler l'épreuve de manière à ce qu'ils (les élèves, ndlr) n'aient pas une note catastrophique liée à leur épreuve du bac. Et en même temps, c'est pour vraiment dire que le bac, c'est dépassé. Il faut passer à autre chose. C'est ça qui verrouille tout système d'innovation dans le secondaire", explique ainsi Victor Immordino au Parisien, convoqué pour filmer la scène. Interpellé par la police, le professeur a été placé en garde à vue dans la foulée.
Il avait donné le sujet à ses élèves avant l'épreuve
Avant l’examen, le 18 avril dernier, le professeur avait déjà fait une action coup de poing en choisissant "de divulguer le sujet" d'anglais à ses élèves et "de le préparer avec eux". "Mon raisonnement était le suivant : ces élèves de terminale arrivent au terme de leur enseignement dans le secondaire (...) Aucun d’entre eux ne sait parler anglais. C’est donc que les cours qu’ils ont suivis durant les sept dernières années sont un échec", a déclaré l’enseignant à nos confrères. "Étant en partie responsable de cet échec, je me suis dit que la moindre des choses que je puisse faire était de les aider à obtenir une bonne note à l’examen, augmentant ainsi leur chance d’avoir leur bac et partir tenter leur chance au-delà du secondaire avec ce sésame entre les mains plutôt que rien", a-t-il poursuivi.
Le sujet avait finalement été changé in extremis, et les devoirs rendus "catastrophiques", selon l'enseignant. Ainsi, sur les 63 copies rendues le 18 avril dernier, "sept étaient passables au standard du bac pro", sans aucune ponctuation, sans conjugaison, "rien qui ne puisse être considéré comme une maîtrise d'anglais". "Pour les 56 qui restent, déjà dans un tiers des cas, il y a copie blanche, pour les deux autres tiers il y a une ligne, il n'y a rien, c'est nul. Mais c'est pas de leur faute, c'est normal", dit-il, désemparé.
Et de citer l'une des copies "classiques" de ses élèves : "My first date she want go to restaurant before she want to go to cinema before she want to go Foire du Trône". "Le principe, c'est que voilà, ils en ont rien à faire. Alors tant qu'on n'aura pas trouvé le moyen de retrouver une intensité dans les apprentissages, quelque chose qui les motive pour de bon et pas juste des artifices en essayant de mettre des cours sur les ordinateurs ou des trucs comme ça, tant qu'on aura pas trouvé quelque chose qui les motive ça marchera pas", assure le professeur.
Certains élèves ont compris la démarche
Une élève interrogée par nos confrères explique qu'elle et d'autres camarades ont compris la démarche de l'enseignant et ont eux dénoncé aussi le manque d'efforts de l'Éducation nationale à l'égard des lycéens et plus particulièrement de ceux des lycées professionnels.
Contacté par TF1info ce mercredi, le rectorat de Paris nous indique que le professeur avait été récemment recruté et affecté temporairement dans ce lycée du 17e arrondissement. "Il s'est mis en défaut, à l'occasion d'une épreuve d'examen (celui du 18 avril ndlr) organisé par l'établissement et comptant pour le baccalauréat professionnel (CCF). L'intéressé a reconnu les faits. Les règles de déontologie en matière d'examen lui ont été rappelées par le proviseur et par l'inspectrice en charge de la discipline", rappelle le rectorat.
Selon le rectorat, l'enseignant souhaitait mardi dernier reprendre son service, accompagné de deux journalistes. "Après s'être vu refuser une reprise de service, l'enseignant a brûlé ostensiblement un paquet de copies devant l'entrée du lycée", précise le rectorat.
"Les élèves ont été choqués par l’attitude de cet enseignant et les équipes pédagogiques ont été tout autant scandalisées. Personne ne s'est donc solidarisé avec cet enseignant qui a fini par quitter les lieux avant d'être interpelé par la police, quelques minutes plus tard. Ce professeur a été immédiatement suspendu de ses fonctions et il est mis fin à son contrat.L’accès à l’établissement lui est interdit ainsi que l’accès aux outils de communication interne (ENT)", ajoute-t-il.
Le rectorat a déposé plainte. Toutes les dispositions ont d'ores et déjà été prises pour que les élèves ne soient pas pénalisés dans le cadre de leur examen du baccalauréat. "Dans le cadre du Contrôle en Cours de Formation qui régit l’évaluation de l’Anglais en Bac professionnel, un nouveau sujet sera élaboré par l’équipe pédagogique du lycée, ce qui permettra une nouvelle évaluation des élèves, avec un souci d’objectivité et de bienveillance", conclut le rectorat.
Il sera jugé le 27 octobre
Ce mercredi soir, le parquet de Paris confirme que cet enseignant né en 1993 a été placé en garde à vue le 9 mai pour avoir brûlé 63 copies du baccalauréat d’anglais dans une poubelle au sein de la cour d’un lycée, en guise de protestation contre les méthodes de l’Éducation nationale et le niveau des élèves. Il avait revendiqué son geste devant l’établissement et des journalistes.
"Il a été déféré le 10 mai au parquet de Paris, placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d’exercer la profession d’enseignant et de paraître aux abords du lycée. Il sera jugé le 27 octobre 2023 pour destruction du bien d’autrui par moyen dangereux pour les personnes, délit faisant encourir 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende", précise à notre rédaction le parquet.
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