ÉDUCATION - La rentrée scolaire n'échappe pas à son lot de nouveautés... Et parmi elles, l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire de 6 à 3 ans. Même si cette mesure ne devrait pas changer grand-chose dans les faits (elle ne concerne que 26.000 enfants non scolarisés), va-t-elle contraindre les plus petits - et donc leurs parents - à davantage d'assiduité ?
C'est l'une des mesures phares de la loi de Jean-Michel Blanquer "pour une école de la confiance" : l'abaissement de six à trois ans de l'âge de l'instruction obligatoire. Une mesure issue des travaux rendus lors des Assises de la maternelle, réunies en mars 2018, qui avaient déterminé que c'est entre 3 et 6 ans qu'il est possible de lutter efficacement contre l'inégalité devant le langage. Mais aussi de susciter le plaisir d'apprendre.
Dans les faits, cela ne concerne que 26.000 enfants qui ne fréquentaient pas l'école jusqu'ici : 97,6 % étaient déjà scolarisés dès cet âge en France. Mais de fortes inégalités territoriales existaient, notamment dans certains territoires d’outre-mer, où ce taux était parfois inférieur à 70%. Pour autant, cette mesure pourrait bien modifier le rapport de confiance entre les familles et les enseignants.
Des "petits arrangements" avec les enseignants
Quel parent n'a en effet jamais gardé son jeune enfant à la maison parce qu'il le trouvait fatigué au lieu de le mettre en collectivité ? Et que dire des familles qui choisissent de partir en vacances hors période scolaire parce que les billets d'avion ou de train sont moins chers ? Jusqu'à maintenant, ces "petits arrangements" se faisaient en bonne intelligence avec les enseignants, mais aujourd'hui cela sera-t-il encore possible ? Rien n'est moins sûr, selon le SNUipp-FSU, le syndicat national des instituteurs.
"Concrètement, l'assiduité à l'école va effectivement être contrôlée, confirme à LCI la secrétaire générale Francette Popineau. Les enseignantes vont devoir noter les absences des enfants et si un certain nombre sont injustifiées, elles doivent désormais en informer l'autorité supérieure, ce qui n'était pas le cas avant pour les élèves de maternelle. Sauf que contraindre à l'assiduité de manière brutale, c'est contraire à tout le travail d'approche que faisaient les maîtresses et les directrices jusqu'à maintenant pour faire comprendre aux parents que l'école ne peut être bénéfique que si le jeune enfant y va régulièrement. A cet âge-là, ce n'est pas juste une garderie", poursuit-elle.
Qu'on se rassure toutefois, les parents désobéissants ne risquent pas de lourdes sanctions. "A priori, il est plus question d'un rappel à l'ordre si les enfants sont trop souvent absents sans motivation. D'ailleurs, plutôt que de réprimer, il vaudrait mieux faire de la prévention et s'interroger pour savoir pourquoi un enfant manque de régularité. Y-a-t-il un souci à l'école ? Quelles sont ses conditions de vie ? Mais pour ça, il faudrait plus de personnels sociaux et médicaux au sein de l'école maternelle. Ce qui pourrait nous aider dans certaines situations", suggère le syndicat.
Derrière l'absentéisme, il n'y a pas que des aménagements de confort, il y a aussi des situations personnelles difficiles.
Francette Popineau, secrétaire générale du SNUipp-FSU
La relation de confiance, qui s'installe pas à pas entre parents et enseignants, pourrait donc bien être en péril. "C'est en effet une crainte que nous avons, martèle Francette Popineau. En appliquant cette loi, on a tendance à stigmatiser les familles qui ne comprennent pas toujours le sens de l'école pour les tout-petits, sauf qu'il n'y a pas que ça. Bien sûr, certains parents ont souvent une méconnaissance des apprentissages qui peuvent être faits en maternelle et de l'importance qu'ils ont pour la scolarité future de l'enfant ; ils se disent que rater quelques jours par ci, par là, ce n'est pas bien grave", explique-t-elle. "Mais derrière l'absentéisme, il n'y a pas que des aménagements de confort, il y a aussi des situations personnelles difficiles. Parfois la séparation n'est pas si évidente, notamment dans certaines cultures, elle doit donc se construire, surtout si l'enfant n'a jamais mis les pieds dans une collectivité auparavant".
Des modifications ont bien été demandés au ministre de l'Education, qui y a répondu favorablement, mais pour le SNUipp-FSU, elles sont trop compliquées à mettre en oeuvre. Ainsi, nous explique Francette Popineau en résumant le décret paru en août 2019 sur les "modalités d'aménagement de l'obligation d'assiduité en petite section d'école maternelle", "ce sont les parents qui doivent demander un aménagement de l'emploi du temps de leur enfant. Par ailleurs, les absences ne peuvent avoir lieu que l'après-midi. Ensuite il faut réunir une équipe éducative, ce qui va jusqu'au médecin scolaire - qu'on ne voit quasiment jamais dans les écoles ! A la suite de quoi, il faut que l'inspecteur donne son avis sous quinze jours... Tout ça manque un peu de spontanéité", souligne la responsable syndicale.
Maintenir le lien de confiance
Alors, pour les instituteurs, un seul mot d'ordre cette année : maintenir coûte que coûte ce lien avec les familles qui jusqu'alors venaient spontanément à l'école. "D'autant qu'on sait que ce sont les deux premières années de maternelle les plus difficiles en terme d'assiduité. Ensuite, il y a très peu d'absentéisme en grande section, indique la secrétaire générale du SNUipp-FSU. Pour ce faire, il ne faut pas minimiser le rôle de l'enseignant qui peut voir mieux que personne si un tout-petit a du mal à rester en collectivité des journées entières. Car l'école a ses contraintes : on ne mange pas quand on veut, on ne dort pas quand on veut. Tout ça, il faut y être prêt", insiste le syndicat, qui compte sur le bon sens des inspecteurs pour s'inspirer aussi de leurs retours.
Cette mesure était-elle vraiment indispensable ? "Pour nous, ce qui est nécessaire, c'est que tous les enfants puissent aller à l'école dès le plus jeune âge. On est favorable à une entrée précoce car on sait que ça réussit d'autant mieux pour les milieux les plus défavorisés, mais il faut l'assortir de bonnes conditions d'accueil", répond Francette Popineau. "Que dire par exemple des dortoirs où les enfants dorment serrés les uns contre les autres ? Du manque d'Atsem (personne qui assiste l'enseignant de maternelle, ndlr) ? Des locaux inadaptés ? Si l'école obligatoire avait conditionné une amélioration, on y serait pleinement favorable. Mais quand, à 3 ans, vous êtes noyés dans une classe de 27 ou 29 élèves et que c'est votre première étape dans la collectivité, on peut comprendre que vous n'ayez pas envie d'y aller ! Quand les contraintes ne sont pas assorties de changements, et bien on tape à côté," conclut-elle.
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