RIEN QUE LA VÉRITÉ - Selon une très sérieuse étude, les enfants à qui les parents ont fréquemment menti au cours de l'enfance auraient tendance à être plus manipulateurs à l'âge adulte.
Mentir à ses enfants aurait des répercussions sur le mental et des conséquences notables sur leur comportement une fois adulte. C'est ce que révèle une étude réalisée par des chercheurs de l’Université nationale de Singapour en collaboration avec les universités de Toronto (Canada), de San Diego (États-Unis) et du Zhejiang (Chine), publiée récemment dans la revue The Journal of Experimental Child Psychology.
Le principe de cette étude est simple : interroger 379 jeunes adultes âgés de 21 ans en moyenne en les soumettant à quatre questionnaires avec des angles précis. Dans le premier, on leur a demandé d'indiquer la fréquence à laquelle ils estimaient que leurs parents leur avaient menti lorsqu’ils étaient enfants, avec des répliques du genre "si tu ne viens pas avec moi maintenant, je te laisserai ici tout seul" ou "Je n'ai pas pris mon portefeuille sur moi, nous reviendrons un autre jour". Dans un second, la fréquence à laquelle les participants mentent aujourd'hui à leurs parents. Avant les deux derniers questionnaires consacrés aux comportements prosociaux des sondés, soit leur propension à mentir et/ou à se comporter de façon égoïste et impulsive en société.
En analysant les résultats, les chercheurs se sont rendus compte que les jeunes adultes dont les parents se sont comportés comme de fieffés menteurs pendant leur tendre enfance étaient largement plus susceptibles d'adopter socialement un comportement intrusif et manipulateur.
Quand le mensonge devient menace affective
Pour Peipei Setoh, professeure assistante à l'École des sciences sociales de l'université nationale de Singapour (NTU) et autrice principale de l'étude, ces résultats inspirent comme réflexion que les parents "devraient être conscients de ces implications potentielles et envisager des alternatives au mensonge". En d'autres termes, "parents, mentez moins, ou alors mentez différemment".
Peut-être aurait-il fallu demander aux parents incriminés des jeunes adultes, ceux qui ont menti par le passé, pourquoi ils ont fait montre de telles ruses à l'égard de leur progéniture. Reste que cette étude donne à mesurer l'ampleur des conséquences d'un mensonge chez un enfant, a fortiori quand il est angoissant comme le très fréquent "Si tu ne viens pas tout de suite, je te laisse seul au parc". Pour Dana Castro, psychologue clinicienne et auteure de "Petits silences, petits mensonges" (Albin Michel, 2012), répondant à la question du mensonge du parent pour le site MagicMaman : "Plus qu’un mensonge, il s’agit d’une menace, d’un chantage qui joue sur la peur. Or la peur n’est pas un bon outil éducatif. L’enfant va obéir parce qu’il a peur, non parce qu’il comprend l’enjeu."