Que dire à son enfant pour l'aider à surmonter l'angoisse de la rentrée ?

Publié le 27 août 2019 à 17h15, mis à jour le 28 août 2019 à 10h18

Source : JT 13h Semaine

TENSION - Boule au ventre, pleurs, insomnies… Votre enfant peut parfois être angoissé avant la rentrée des classes et on ne sait pas toujours quoi lui dire pour le rassurer. Alors que le 2 septembre arrive à grands pas, on a demandé à deux psychothérapeutes les bons mots à utiliser pour lui (re)donner l'envie d'aller à l'école.

L'échéance approche. A quelques jours de la rentrée scolaire, le cartable flambant neuf de votre rejeton trône dans sa chambre et les fournitures scolaires ont été achetées depuis belle lurette. Mais les premiers signes de nervosité commencent à se faire sentir, accompagnés du traditionnel mal de ventre, d'un peu de mélancolie et de quelques insomnies. Puis vient la phrase tant redoutée : "Je ne veux pas retourner à l'école !" 

Quel bambin, à part peut-être celui qui s'est ennuyé en vacances ou qui a trop fréquenté les centres de loisirs, ne l'a jamais prononcée ? Ce malaise ressaisit chaque année de nombreux enfants - et leurs parents aussi par la même occasion. Comment faire pour trouver les mots rassurants ? Et que dire aux tout-petits pour qui ça va être la valse des premières fois ? On a demandé conseil à la psychologue clinicienne et psychothérapeute Isabelle Filliozat, auteure notamment de "Mes peurs, amies ou ennemies ?" (Nathan), un cahier d'activités pour aider l'enfant à apprivoiser ses craintes inutiles, ainsi qu'au psychothérapeute Jean-Luc Aubert, fondateur de la chaîne Questions de psy

Pour ce dernier, tout repose sur la façon dont on va parler à son enfant, "car souvent le parent charge ses propos de ses propres angoisses. Or il faut s'exprimer avec lui de la manière la plus neutre et la plus simple possible. On ne théâtralise pas ses dires, on ne les enjolive pas et à l'inverse on ne les dramatise pas non plus", nous explique-t-il. Pas de terrorisme verbal, donc. D'autant que si l'enfant a envie de poser des questions, il le fera. Inutile, par ailleurs, de devancer ses interrogations en lui demandant, par exemple, s'il s'inquiète pour la rentrée. S'il semble bien, on le laisse tranquille".

De son côté, Isabelle Filliozat réfute le terme de "blues de la rentrée" : "Ça c'est une interprétation des parents, ce n'est pas forcément ce sentiment que l'enfant ressent. Le concernant, on va plutôt parler d'anxiété". Mais qu'on se rassure, selon notre spécialiste, cette émotion est tout à fait naturelle : "Elle permet de faire un travail d'anticipation. C'est encore plus important pour les petits, qui n'ont pas encore la capacité à se représenter ce qui va se passer dans le futur". 

"Je ne veux pas aller à l'école !"

Première règle : ne pas s'angoisser et se dire que son enfant n'aime pas l'école. Pour Jean-Luc Aubert, ces mots n'ont rien d'anormal. "Cela signifie juste que votre enfant n'aime pas cette situation de transition entre le principe de plaisir (les vacances) et le principe de réalité (l'école), avec toutes les contraintes que cela implique. La preuve, avez-vous envie spontanément de retourner au travail après votre pause estivale ?", interroge-t-il. Pas sûr...

"Le problème, c'est que les parents ne savent pas écouter les peurs de leurs enfants", renchérit Isabelle Filliozat. "Les plus petits vont dire : 'je ne veux pas y aller', ce qui revient à dire 'j'ai peur' et non 'je n'aime pas l'école'", décrypte-t-elle. Pour le calmer, une seule solution : prendre du temps avec lui. "Cela peut-être au travers d'un jeu, d'une balade en forêt...", répond la spécialiste. "On peut lui poser la question suivante : 'qu'est-ce que tu te dis à propos de l'école ?' Ce qui permet de voir les croyances qu'il a dans sa tête. En revanche, on ne dit pas : 'qu'est ce que tu t'imagines à propos de l'école ?', car cela reviendrait à lui montrer qu'on ne prend pas en compte ses peurs. Que ce sont des craintes dans sa tête, dans son imaginaire, qu'elles ne sont pas réelles", prévient la thérapeute.

De son côté, Jean-Luc Aubert recommande, pour les plus petits, de matérialiser les différentes phases de la journée sous la forme d'une frise chronologique réalisée avec son enfant sur une feuille de papier. "On peut même ajouter des petites illustrations, pour montrer l'heure du réveil ou le moment de partir à l'école. C'est en effet essentiel d'indiquer à l'enfant ce qui va se passer, parce que les plus jeunes ont une notion du temps complètement abstraite. Le fait de mettre ces informations sur du papier, ça va matérialiser les choses et du coup rassurer l'enfant", souligne-t-il.

Et pour la fameuse rentrée en 6ème ? "Il faut être sincère et ne pas lui mentir", répond tout de go notre spécialiste. "Pas la peine de lui dire que tout va être merveilleux dès le premier jour. Pour ce faire, n'hésitez pas à lui raconter vos propres souvenirs de la rentrée. Plus il aura de détails sur ce qu'il va vivre, moins l'enfant aura peur de l'inconnu et de la nouveauté. On peut aussi se référer à ce qui s'est passé pour lui les années précédentes". 

"J'ai peur de me retrouver seul(e) dans ma classe sans mes copains"

Autre crainte, la perte du copain, "parce que c'est l'élément rassurant, une sorte de doudou humain en quelque sorte", analyse Jean-Luc Aubert. "Et c'est valable à tout âge. Mais là aussi, on va lui dire la vérité. Que ce sera un peu plus compliqué s'il ne le retrouve pas dans sa classe et qu'il lui faudra plusieurs jours pour s'adapter. Le problème, c'est que les enfants fonctionnent toujours dans le 'ici et maintenant' et pensent que ce qu'ils vivent va durer toujours. Il faut donc leur dire qu'ils ne s'inquiètent pas et qu'ils établiront petit à petit de nouvelles relations".

Isabelle Filliozat est plus catégorique. Pour elle, il ne faut surtout pas chercher à rassurer son enfant, "car si on fait cela, il va penser qu'il a vraiment de bonnes raisons d'être angoissé. Alors, à la question : 'vais-je retrouver mes copains ?', on ne répond pas : 'mais oui bien sûr, tu va les retrouver !'. A la place, il faut prendre le temps de l'écouter et de l'accompagner dans son anxiété. Ainsi, on va lui demander ce qui lui fait le plus peur. C'est une petite astuce de psy, dire 'le plus peur', ça signifie que j'accepte que tu aies peur, que cela est normal. Cela permet à l'enfant de nommer précisément ce qui l'angoisse", indique la psychothérapeute. 

"A chacune de ses réponses, on va le mettre face à ses peurs, poursuit-elle. Par exemple, devant son appréhension de perdre ses copains, on va lui répondre : 'Et si c'est le cas, qu'est-ce que tu vas faire ?'. Et à chacune de ses interrogations, on lui repose la même question commençant par 'et si...'. On va l'accompagner ainsi à penser à toutes les choses les plus terribles qui peuvent se passer. Ce qui va lui permettre de sentir monter petit à petit son pouvoir personnel. La clef est là, ne pas chercher à éviter l'anxiété mais plutôt à l'accompagner. Et surtout il ne faut pas attendre la veille de la rentrée pour le faire, on commence dès maintenant", conseille-t-elle. 

"Mon professeur sera-t-il gentil avec moi ?"

Pour répondre à cette question, Jean-Luc Aubert propose de se servir du vécu de l'enfant : "Il faut lui dire que de la même façon qu'il apprécie ses oncles ou ses grands-parents, qui sont toutes des personnes différentes, il en sera de même pour ses professeurs. Ce n'est pas parce qu'il va en changer chaque année que le dernier sera moins bien que le précédent".

Et pour l'entrée en 6ème ? "On lui dira que c'est certainement un peu plus compliqué pour la gestion de son emploi du temps. Mais il ne faut pas oublier non plus que le fait d'avoir plusieurs professeurs, c'est aussi une chance si par malheur ça ne se passe pas bien avec l'un d'entre eux", ironise-t-il. 

"Je ne veux pas quitter mes parents"

Pour les tout-petits, c'est la plus grande de leurs angoisses : devoir quitter le cocon familial. Fort heureusement, on accepte désormais le doudou en maternelle, ce fameux objet transitionnel qui va permettre d'assurer le relais, mais c'est loin d'être une fin en soi.  "Première des choses, on va aller visiter l'école avec son enfant. Pas question de découvrir le lieu le jour de la rentrée. Notamment parce qu'il va être confronté à un certain nombre d'inconnus. Donc si on peut apporter des réponses concernant certaines de ses inquiétudes, ce sera autant de sources d'anxiété supprimées", prévient Jean-Luc Aubert.

"Ensuite, on prend le temps de lui raconter comment ça va se passer et on fait le chemin de l'école avec lui. Parce qu'autrement, il peut fantasmer des tas de choses sur ce nouveau lieu, ce qui n 'est pas très rassurant. Ce qui est anxiogène pour les petits, comme les plus grands d'ailleurs, c'est l'inconnu. A partir du moment où on apporte un certain nombre de réponses, on diminue l'anxiété. Prenons un exemple, si vous avez peur du noir, vous serez terrifié dans une pièce que vous ne connaissez pas, mais si vous êtes chez vous, ça ira beaucoup mieux", conclut-il. 


Virginie FAUROUX

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