Merah, Madrid, Nanterre... Toutes ces fois où des attaques ont pesé sur une élection présidentielle

par Matthieu JUBLIN
Publié le 21 avril 2017 à 14h38
Merah, Madrid, Nanterre... Toutes ces fois où des attaques ont pesé sur une élection présidentielle
Source : PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP

HISTOIRE - Pour la première fois, un attentat terroriste fait irruption dans une campagne présidentielle en France à seulement quelques jours du scrutin. Mais ce n’est pas la première fois que la violence émaille la fin d’une campagne. Le scrutin peut-il basculer ? Retour sur plusieurs faits majeurs des 40 dernières années.

À deux jours du premier tour de l'élection présidentielle, l'assassinat d'un policier sur les Champs Élysées a refaçonné les dernières heures de la campagne électorale, réorientant les débats sur le thème de la sécurité sans que, pour autant, il soit possible d'en conclure une quelconque influence sur l'issue du scrutin. D'autres campagnes électorales ont, par le passé, été marquées par un contexte violent. Ces événements, qui ne sont évidemment pas comparables, sont tous survenus alors que les candidats tentaient de convaincre les électeurs. Que s’est il passé ensuite ?

2012 : la cavale meurtrière de Mohammed Merah n'a pas "bénéficié" à Nicolas Sarkozy

Le 11 mars 2012, à Toulouse, Mohammed Merah tue d'une balle dans la tête Imad Ibn Ziaten, un soldat français. Quatre jours plus tard, à Montauban, deux autres soldats sont tués par ce même homme casqué, équipé d'une caméra Go-pro et circulant à scooter. Quatre jours passent encore, avant que Mohammed Merah se rende devant une école juive de Toulouse et tue un rabbin, ses deux enfants de 3 et 6 ans, ainsi qu'une autre fillette de 8 ans.

Trois des principaux candidats à l'élection présidentielle, dont le premier tour a lieu un mois plus tard, se rendent sur place : le président sortant Nicolas Sarkozy, François Hollande et François Bayrou. Si l'ambiance est d'abord à la trêve électorale, les hostilités reprennent rapidement. 

François Bayrou évoque d'abord le "climat" favorisant la violence, visant ainsi Nicolas Sarkozy. Plusieurs éditorialistes avaient conclu à la faute politique, qui aurait pu accélérer sa chute dans les intentions de vote. À droite, c'est Jean-François Copé, une fois l'identité du tueur connue, qui avait pointé "l'ambiguïté permanente" des socialistes sur l'islam. François Hollande et Nicolas Sarkozy seront finalement qualifiés pour le second tour, malgré une poussée de Marine Le Pen dans les sondages, pendant les semaines qui suivaient les tueries de Toulouse et Montauban.En revanche, il n'est pas possible de conclure le candidat de l'UMP a "bénéficié" de l'affaire Merah contrairement à ce qui avait été prédit,  rappelle Adélaïde  Zulfikarpasic, directrice de l'Institut de sondages BVA citée par l'AFP.

2004 : à Madrid, quelques jours après l'attentat de la gare d'Atocha, la victoire surprise des socialistes

Le 11 mars 2004, au matin, plusieurs explosions dans des trains de banlieue de la capitale espagnole font près de 200 morts. Les autorités accusent d'abord l'organisation séparatiste basque ETA . "Il est absolument clair que la formation séparatiste ETA cherchait à faire une attaque avec de vastes répercussions", avait alors déclaré le ministre espagnol de l'Intérieur, Ángel Acebes. Mais, les jours avançant, la piste du terrorisme islamiste se précise. 

Alors que le gouvernement conservateur campe sur sa position initiale, des manifestations commencent à avoir lieu, réclamant la "vérité" sur l'attentat du "11-M". Trois jours plus tard, contre toute attente, le Parti socialiste espagnol sort vainqueur des élections générales. 

2002 : Un mois avant le premier tour, la tuerie de Nanterre

Le 27 mars 2002, un homme ouvre le feu lors d'un conseil municipal de Nanterre, tuant 8 personnes et en blessant 19. Le tireur, Richard Durn, est interpellé. Il se suicidera le lendemain en se défénestrant des locaux de la brigade criminelle de Paris.  

Le 29 mars, le chef de l'État et candidat Jacques Chirac, déclare que "L'insécurité, ça va de l'incivilité ordinaire au drame que nous avons connu cette nuit". À gauche, les réactions indignées pleuvent. Noël Mamère, également candidat à la présidentielle, dénonce les mots du président : "Entretenir ce sentiment de peur, de fragilité, d'insécurité, c'est à la fois irresponsable et obscène. Et franchement qu'un président de la République soit capable de faire ça... je suis écoeuré."

Un certain François Hollande, alors Premier secrétaire du PS, critique également la sortie de Chirac : "On n'est jamais à l'abri de la folie. Est-ce que certains voudront déplacer le sujet sur le thème de l’insécurité en général ? Cette histoire est tragique, horrible. Et malheur à ceux qui en feraient un élément de campagne."

Nicolas Dupont-Aignan : "Il faudra aller chercher les fichés S un par un dans les cages d'escalier"Source : Sujet JT LCI
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1988 : Trois jours avant le second tour, l'assaut contre les indépendantistes kanaks

Le 5 mai 1988, à deux jours du second tour de la présidentielle qui oppose le président sortant François Mitterrand à son Premier ministre Jacques Chirac, des indépendantistes kanaks prennent d'assaut la gendarmerie de Fayaoué, en Nouvelle-Calédonie, tuant quatre gendarmes. Seize autres sont pris en otage et emmenés dans une grotte. À la crise sécuritaire s'ajoute une crise politique, qui voit s'affronter l'Élysée et Matignon sur la réponse à apporter. 

Jacques Chirac, partisan d'une intervention, ordonne l'envoi de troupes d'élite sur l'île d'Ouvéa, où a lieu la prise d'otage. François Mitterrand, d'abord favorable à une négociation, finit par autoriser l'assaut des forces de sécurité. L'intervention causera la mort de 19 indépendantistes kanaks et 2 militaires. 

La lumière n'est toujours pas faite sur les responsabilités respectives de Matignon et de l'Élysée dans cet assaut sanglant, entaché d'accusation d'exécutions sommaires de la part des militaires. Trois jours plus tard, François Mitterrand est facilement réélu.


Matthieu JUBLIN

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