Elections législatives 2017

Législatives : les candidats-chômeurs de Macron sont-ils vraiment tous sans emploi ?

Publié le 6 juin 2017 à 16h01, mis à jour le 6 juin 2017 à 17h18
Cette vidéo n'est plus disponible

Source : Sujet JT LCI

CHÔMAGE – En présentant sa première liste de candidats investis pour les législatives, La République en marche s’était targuée de présenter "2%" de personnes en "recherche d’emploi". À deux semaines du premier tour, nous avons décidé de nous intéresser à ces aspirants députés au chômage… qui se révèlent finalement moins nombreux qu’annoncé, et avec un profil bien éloigné de la majorité des inscrits à Pôle Emploi.

Le 11 mai dernier, Richard Ferrand, alors responsable des investitures pour les législatives pour La République en Marche !, présentait une première liste de 428 candidats et se félicitait de leur diversité : engagement "tenu" sur les plans de la parité ou du renouvellement, vantait-il. Et parmi les plus de 50% d’heureux et heureuses élu(e)s issus de la société civile, soulignait-il notamment, "2% sont en recherche d’emploi".

Les 3 millions de chômeurs français bientôt représentés au Palais Bourbon ? La promesse était forte. Reste à voir si elle est et sera effectivement tenue.

Des chiffres pas tout à fait exacts

À présent que la liste définitive des 529 candidats de la République en Marche ! est connue, LCI s’est penché sur ces aspirants députés au profil apparemment inattendu. Et une constatation s’impose d’emblée : les chômeurs sont moins représentés qu’initialement annoncé. En réponse à nos sollicitations, le mouvement d’Emmanuel Macron nous a affirmé que neuf candidats-chômeurs se présentaient sous ses couleurs. Un chiffre qui, si l’on se montre scrupuleux, ne représente que 1.7% du total des 529 investis. Mais surtout, après vérification, ces candidats ne sont en réalité pas neuf mais... huit. 

Par exemple, Emmanuel Marcadet, candidat dans la 4ème circonscription de Seine-et-Marne, est considéré comme chômeur mais pourtant, ce n'est pas tout à fait le cas. Maire de Bray-sur-Seine (Seine-et-Marne) et vice-président de la communauté de communes de Bassée-Montois, il nous confie avoir fait le choix de se consacrer totalement à ses mandats, et donc de "cesser toutes activités professionnelles". Difficile, dans ces conditions, de le considérer comme demandeur d’emploi…

Considérée comme en recherche d’emploi sur les listings de LREM, Madeleine Ngombet-Bitoo, candidate dans la 3ème circonscription de Charente, indique en effet sur son profil Linkedin et son compte Facebook être chirurgienne-dentiste depuis 1996. La candidate LREM nous a contacté pour nous affirmer que contrairement à ce qui était indiqué sur ses profils Linkedin et Facebook, elle était au chômage depuis la fin de l'année 2014. "Je fais parfois des remplacements", nous a-t-elle affirmé.

Interrogé par LCI.fr, le mouvement du nouveau président de la République se défend d'avoir voulu gonfler artificiellement le nombre de chômeurs parmi ses candidats. Lorsqu’ils ont rempli leur dossier, les postulants "donnaient eux-mêmes leur statut professionnel", nous explique le service de presse. Des informations qui semblent ne pas avoir ensuite été vérifiées…

Quoi qu’il en soit au final, il y a donc 1.5% de chômeurs chez les candidats de la République en Marche et non pas 2% comme précédemment annoncé.

Richard Ferrand fait le détail des candidatures de la REMSource : Sujet JT LCI
Cette vidéo n'est plus disponible

Huit "vrais" chômeurs

Restent les huit "vrais" candidats-chômeurs. Mais en étudiant leur profil, on semble loin de celui de la majorité des inscrits à Pôle Emploi. Frédérique Lardet, candidate dans la 2ème circonscription de la Haute-Savoie, a par exemple travaillé pendant 7 ans comme vice-présidente du secteur aliment et boisson du groupe hôtelier AccorHotels. Christine Hennion, candidate dans la 3ème circonscription des Hauts-de-Seine, a quant à elle été cadre 7 ans chez Alcatel-Lucent, avant de devenir consultante indépendante et bénévole pour des start-ups et des associations. Depuis son licenciement en janvier 2016, elle cherche activement à se reconvertir. "Je souhaite insister sur cette idée fausse que chômage rimerait avec inactivité ; en effet, je travaille activement à ma reconversion professionnelle."J'enseigne auprès des étudiants en Mastère et j'accompagne des start-ups et des associations en tant que consultante indépendante", explique-t-elle. Le fait qu’elle n’enseigne que ponctuellement explique pourquoi elle est toujours considérée comme chômeuse par Pôle Emploi.

De son côté, Sophie Beaudoin-Hubière a démissionné de son poste de chargée de développement RH à la Caisse d’Épargne. Contactée par LCI.fr, elle explique qu’en cas de défaite aux législatives, elle souhaite se tourner "vers la formation et le coaching" pour de plus petites structures qu’un gros groupe bancaire. C’est pourquoi elle est inscrite VAE (Validation des acquis de l’expérience) à Pôle Emploi. 

Cadres, auto-entrepreneurs, ingénieurs, les candidats demandeurs d’emploi de La République en Marche ne sont pas réellement représentatifs de la population actuellement au chômage en France. Aucun ne fait partie des catégories socioprofessionnelles ouvrières ou employées. Pourtant, le chômage dans ces catégories oscille entre 10% et 15% selon les chiffres de l’INSEE.

À noter, cependant, que même si 5 des 8 candidats au chômage ont quitté leur emploi à la fin de l’année 2016, trois sont au chômage de longue durée, c’est-à-dire de plus d’un an. C’est le cas de Christine Hennion, de Madeleine Ngombet-Bitoo et de Jean-Pierre Morali, licencié de son côté il y a 3 ans.

"L'item demandeur d'emploi n'existait pas"

Jean-Pierre Morali, ancien directeur commercial, a décidé de se présenter aux élections législatives dans la 1ère circonscription des Ardennes pour La République en Marche !. Le candidat est convaincu qu’il n’a pas été choisi par le mouvement à cause de son statut de demandeur d'emploi. Mais au début de sa campagne, il a pu constater combien le statut de chômeur et celui de candidat n’allaient pas de soi. "Lorsque j'ai déposé ma candidature en préfecture, j'ai rempli un questionnaire et devait renseigner ma situation professionnelle. Or, l'item demandeur d'emploi n'existait pas". Un épisode qui  a débouché sur "un mini débat de société avec un agent des services de l'Etat que cette situation ne laissait pas indiffèrent". Les électeurs y seront-ils eux aussi sensibles ? 


Antoine LLORCA

Tout
TF1 Info