MACRON-LA-DISCORDE - En mettant un homme de droite à Matignon, Emmanuel Macron a rempli un autre objectif : semer la zizanie à droite. Sur le cas Edouard Philippe, LCI a compté trois camps pas franchement d'accord les uns avec les autres.
Avec la nomination d'Edouard Philippe à Matignon, baron local Les Républicains mais visage peu connu sur le plan national, c'est peut-être le vieux monde qui est de retour, comme le dit Jean-Luc Mélenchon, mais c'est aussi la droite traditionnelle qui tremble sur ses fonds baptismaux. Les réactions qui se sont enchaînées depuis l'annonce d'Alexis Kohler l'attestent sans aucun doute.
Les Républicains qui ont la confiance
Dans ces dernières, on trouve deux lignes. D'abord, ceux qui, croyant dur comme fer à une victoire de Les Républicains aux élections législatives annoncent, bravache, que le séjour du Havrais à Matignon est temporaire et qu'il sera rapidement remplacé par François Baroin, chef de file du parti pour les élections législatives.
C'est évidemment le cas de la majorité du comité de campagne Les Républicains qui, dans un communiqué, a voulu rappeler que la décision d'Edouard Philippe ne concernait que lui, et lui seul : "Il ne s’agit en aucun cas d’une coalition gouvernementale mais bien d’une décision individuelle. Nous la regrettons." Coalition, nulle part ; cohabitation, partout.
Une position évidemment partagée par le sarkozyste Georges Fenech, qui, sur LCI (voir plus bas), à minimiser le transfert d'Edouard Philippe : "S'il peut y avoir quelques individualités [qui quittent LR, ndlr], ils ne représentent qu'eux mêmes, pas notre famille politique qui est très soudée." Pour lui, c'est évident : "Edouard Philippe fait fausse route. Il se retrouve à devoir appliquer un programme d'Emmanuel Macron qui n'est pas notre programme." Ce qui finira mal, puisque, estime-t-il, "le peuple [leur] donnera une grande majorité".
Rien de bien différent chez le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, qui a durement dénoncé le choix de son collègue de l'Assemblée et repris l'élément de langage de la "déstabilisation de la droite" pronée par Emmanuel Macron.
Je regrette qu’ @EPhilippe_LH troque ses convictions et participe à l’opération de déstabilisation de la droite et du centre menée par Macron — Eric Ciotti (@ECiotti) 15 mai 2017
Notre famille pol ne sacrifiera jamais ses convictions pour être dans l’air du temps. Cap sur les #legislatives2017 avec @francoisbaroin ! — Eric Ciotti (@ECiotti) 15 mai 2017
Chez l'autre parti centriste, l'UDI, on ne peut s'empêcher de qualifier la nomination de "curiosité". Si on observe qu'Emmanuel Macron "rééquilibre son camp à droite", on pointe du doigt, avec les mêmes éléments de langage que chez Les Républicains : "[Edouard Philippe] va être le chef d'une bataille législative avec des centaines de candidats qu'il n'a pa choisis."
Ceux qui sont au milieu
Curieusement, Edouard Philippe ne fait pas le plein d'assentiment chez ses proches juppéistes. Ainsi de son ami Gilles Boyer, ex-directeur de campagne d'Alain Juppé et candidat de la droite et du centre dans les Hauts-de-Seine. Pour ce dernier, il n'a pas été question de se rallier au sillage d'Emmanuel Macron. Ce qui n'a pas empêché celui avec qui il a commis deux romans de se réjouir de la nomination du Havrais à Matignon :
. @EPhilippe_LH est mon ami. En tant qu'homme et en tant que citoyen, je suis heureux qu'il soit à la tête du Gouvernement de la France. — Gilles Boyer (@GillesBoyer) 15 mai 2017
Nous avons fait un choix politique différent : je respecte celui d' @EPhilippe_LH comme je sais qu'il respecte le mien — Gilles Boyer (@GillesBoyer) 15 mai 2017
Comportement comparable pour Alain Juppé. Le maire de Bordeaux, parrain politique des deux hommes, a salué le choix d'Edouard Philippe, "un ami, un homme de grand talent [...] un député qui a toutes les qualités pour remplir la fonction", avant de lui souhaiter "bonne chance". Il y a toutefois un "mais" d'importance dans le discours du maire de l'ancien Premier ministre, qui prévient que, pendant la campagne législative, il soutiendra "les candidats LR et UDI". Voilà pour l'instant. En revanche, en cas de défaite aux législatives, Alain Juppé ouvre la porte : "Le pays ne comprendrait pas que nous nous engagions dans une opposition systématique ; il faudra trouver les voies et moyens d'un travail constructif dans l'intérêt de la France
Les Républicains en rupture de ban
Enfin, quelques heures après la nomination et la réaction officielle de leur camp, une bonne vingtaine d'élus LR, juppéistes et lemairistes pour l'essentiel, ont posté un communiqué où ils appelaient à leur "famille politique d'être à la hauteur de la situation de notre pays et de l'attende des Français". Le mot-clé de ces élus, parmi lesquels on trouve le maire de Reims Arnaud Robinet, le député Franck Riester, le maire de Tourcoing Gérald Darmanin, Christian Estrosi, Thierry Solère ou Dominique Busserau : "Répondre à la main tendue par le Président de la République". Pas d'exigence concrète, mais peut-être une source d'inspiration pour les ministres venus de la droite dans le futur gouvernement Macron qui doit être dévoilé ce mardi.
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