Le gouvernement prendra "dans les prochaines semaines" la décision d'arrêter "plusieurs" projets autoroutiers et routiers, a indiqué ce mardi Clément Beaune.Seul bémol, le tracé controversé de l'autoroute A69 entre Toulouse et Castres n'est pas concerné.Voici les autres projets en cours, dont certains font débat.
Mis à part, les projets déjà lancés, comme l'A69 entre Toulouse et Castres, le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, a expliqué ce mardi sur France-Inter qu'un "certain nombre de projets autoroutiers" seraient arrêtés. Des décisions fortes qu'il prendra "dans les prochaines semaines". "Il faut qu'on soit cohérent, à l'heure de la planification écologique, on ne peut pas faire comme avant", a-t-il indiqué, ajoutant : "On a déjà divisé par deux les kilomètres de routes qu'on construit dans le pays. Et on va continuer cet effort : plus de rails et moins de routes."
Pour les projets en cours, "on va réduire leur impact sur l'environnement" et pour "les projets qui ne sont pas encore lancés, on va en maintenir quelques-uns, puisqu'il y en a qui sont utiles, et on va en arrêter certains", a-t-il précisé.
De nombreux projets déjà passés à la trappe
Bruyamment contestés, les projets autoroutiers sont pourtant peu nombreux en France, les gouvernements successifs en ayant déjà abandonné beaucoup depuis Le Grenelle de l'environnement il y a une quinzaine d'années. De nombreux projets sont ainsi passés à la trappe comme l'A24 entre Amiens et Lille, le prolongement de l'A48 à l'est de Lyon, l'A51 dans les Alpes ou l'A831 en Charente-Maritime. "Il n'y a plus nécessité en France d'augmenter significativement la capacité du réseau routier", proclamait notamment le projet de Schéma national des infrastructures de transport (Snit) en 2010.
La doctrine n'a pas trop changé depuis et quelques opérations routières ont continué, cahin-caha, plutôt discrètement, pendant que grandissaient des oppositions locales aux chantiers. On a abandonné le projet d'A45 entre Lyon et Saint-Etienne, mais construit le très contesté contournement de Strasbourg. De son côté, Jean Castex a relancé quelques projets quand il était Premier ministre, mais les dossiers ont plutôt stagné depuis un an. Le gouvernement veut donc tous les réexaminer, prévenant que certaines liaisons ne seront pas réalisées.
Quels sont ceux qui pourraient être menacés ?
Le contournement de Rouen (A133 et A134), un très vieux projet visant à désengorger l'agglomération. La procédure d'appel d'offres a été lancé en 2022 et le contrat de concession devrait entrer en vigueur fin 2025. Le débat est vif sur place, le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol (PS) ayant notamment changé de camp depuis les dernières municipales pour s'y opposer. Ce projet vise à la création d'une liaison autoroutière de 41,5 kilomètres entre l'A28 nord et la RD18 et l’A13-A154. Elle doit permettre de "détourner du cœur d'agglomération une grande partie des trafics de transit et d’échanges, surtout de poids lourds, et ainsi décongestionner les voies", selon la préfecture de Seine-Maritime.
Autre projet qui fait débat, l'A154 : un tronçon de 97 kilomètres qui doit relier La Madeleine-de-Nonancourt (Eure), Trancrainville (Eure-et-Loir) et Vert-en-Drouais et l’est de Dreux. Il s'agit d'achever l'axe transversal Rouen-Orléans en reliant entre eux des morceaux de voie rapide déjà existants et en construisant des déviations à Chartres et Dreux (avec une antenne baptisée A120). Une pétition lancée en janvier a récolté plus de 3000 signatures.
On trouve également l'A412 : une courte liaison isolée qui doit relier Machilly à Thonon-les-Bains, en Haute-Savoie, rescapée après l'annulation de projets plus ambitieux. Elle connait des levées de boucliers de la part des associations locales qui dénoncent une "hérésie environnementale".
D'autres projets moins aboutis sont dans les cartons, faisant débat depuis des années, comme l'amélioration de l'axe Nancy-Metz-Luxembourg (A31bis), le contournement d'Arles (A54) ou l'élargissement de l'A63 au sud de Bordeaux.
Que reprochent les opposants ?
Plus ou moins fédérées - par exemple dans la coalition "La déroute des routes" -, les oppositions sont multiples, évoquant de nombreuses causes : sauvegarde des zones traversées et/ou des arbres, protection de la faune et de la flore, lutte contre la bétonisation et l'artificialisation des terres, craintes pour la pollution et, plus généralement, contestation de tout ce qui est routier.
Certaines oppositions relèvent par ailleurs du Nimby ("not in my backyard", pas dans ma cour) : des personnes contestent un projet parce qu'il doit passer chez eux, mais l'accepteraient s'il était réalisé ailleurs. On trouve même les associations de défense des trains qui sont contre tout projet qui pourrait être défavorable au ferroviaire, craignant notamment que les voies ferrées soient délaissées si des (auto)routes sont construites en parallèle.
Plus discrets, les partisans des projets parlent volontiers de désenclavement, d'achèvement d'itinéraires de transit, de développement économique et de sécurité routière.
Et chez nos voisins ? La Wallonie en Belgique et le Pays-de-Galles au Royaume-Uni ont décidé de stopper leurs projets routiers. Ailleurs, on construit à tout-va, notamment en Europe de l'Est – avec des fonds européens -, et on relance des projets en Allemagne, en Espagne et en Italie.