"Rien ne sert de planter un an après le feu" : comment faire renaître la forêt après les incendies ?

Propos recueillis par Aurélie Loek
Publié le 12 août 2022 à 18h57, mis à jour le 12 août 2022 à 22h21
JT Perso
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Source : JT 20h Semaine

Depuis janvier, 60.558 hectares ont brûlé en France, dévastant notamment la forêt landaise.
Face à des espaces décimés, certains appellent à ce que l’on replante tout de suite.
Mais pour Laurence Le Legard-Moreau, responsable des services Forêts-Bois à l'ONF, la nature peut aussi se régénérer seule.

Les nombreux incendies qui se déclarent cet été en France menacent une grande partie de la biodiversité et notamment ses forêts. Après les premiers feux du mois de juillet, la répétition des événements en août interroge sur la manière dont ces espaces doivent s’adapter face au dérèglement climatique. 

Une question qui se pose alors que de nombreux acteurs appellent à replanter les espaces décimés. Laurence Le Legard-Moreau, chef des services techniques en Bouches-du-Rhône/ Vaucluse, revient sur la politique de l'Office national des Forêts en la matière et les choix qu'il faut faire.

Des essences adaptées au changement climatique

Suite à un incendie, faut-il systématiquement mettre en place une politique de replantations ? 

La stratégie que l'Office national des Forêts mène en forêts publiques est de favoriser leur renouvellement naturel, sans forcément passer par des plantations. Les stratégies seront différentes si c'est une forêt de résineux ou si une forêt de feuillus, mais ces deux types d'arbres sont adaptés pour assurer leur renouvellement. Quand on a des forêts incendiés, on va réhabiliter l’espace, couper les arbres brûlés, faire de la place et laisser les essences présentes donner. On ne va pas avoir 100% de renouvellement naturel dès la première année. Des fois, cela s'étale sur 10 ans. Mais c'est la nature, le processus prend du temps et globalement, le renouvellement se fait, même dans la durée.

Pourquoi ne pas aider la nature en replantant directement ?

Tout acte de plantation est un acte hyper fort. Dans les Bouches-du-Rhône, on a des retours d’expériences de plantations post-incendie qui ont été faites dans les années 1980. On avait alors tout de suite replanté parce qu’on avait peur que rien ne vienne. Aujourd’hui, 40 ans après, les plants qu’on a plantés se font supplanter par toute la régénération qui est arrivée, cinq ans ou dix ans après. Les plants qu’on a plantés sont quatre fois plus petits que la régénération naturelle qui a poussé bien après l’incendie. La forêt a sa propre dynamique et il lui faut du temps pour qu’elle se remette en place. 

Cela ne sert donc à rien de planter un an après le feu, parce qu’on craint de ne pas avoir de semis. D'autant plus que planter, cela coûte. On en a à peu près pour 15.000 euros l'hectare. Même si c’est moins rapide, il est plus simple de travailler et d’accompagner ce que nous donne la nature plutôt que de planter.

On n'aura certainement pas les mêmes forêts qu'on a aujourd'hui

Laurence Le-legard-Moreau

Quand jugez-vous qu'il faut replanter, et dans ce cas, faut-il replanter à l'identique ?

On ne plante vraiment que quand on a la certitude que le peuplement qui est en place ne pourra pas se régénérer naturellement ou ne sera pas adapté au milieu dans 100-150 ans. Depuis les années 2000, avec le réchauffement climatique, des cartes de vigilances qui intègrent les différents scénarios du Giec, indiquent quelles essences pourront être limitées. Il faut le prendre en compte parce qu’on sait que ce qu’on plante aujourd’hui ne sera adulte que dans 100 ans. 

Par exemple, dans le sud de la France, on est à la limite sud d’une essence qu’on trouve principalement dans le nord : le pin sylvestre. Or, depuis une vingtaine d’années, ces pins sylvestres sont tous en train de mourir avec le réchauffement climatique. Donc effectivement, sur des pinèdes sylvestres qui, aujourd’hui, dépérissent, le forestier ne va pas favoriser son renouvellement naturel parce qu'on sait que les semis, quand ils vont grandir, vont être en limite écologique vis-à-vis de leur milieu. Replanter amène de l'adaptation. On n'aura certainement pas les mêmes forêts qu'on a aujourd'hui. Mais ce n'est pas grave. L'important, c'est qu'on ait toujours de la forêt et des milieux écologiques et naturels préservés.

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Comment choisir les essences à replanter ?

Aujourd’hui, on va vraiment essayer de travailler avec les matériaux naturels. C’est la nature, l’écologie du milieu, les sols, le climat local, la topographie, qui vont donner le panel d'essences possibles. Quand on plante aussi, on ne va jamais replanter de mono-essence. Aujourd’hui, nos peuplements adultes sont mélangés, on a des résineux, des feuillus, des arbustes, donc on ne va jamais planter des quantités astronomiques d’arbres qui sont tous de la même essence. 

La diversité, c'est ce qui va permettre à la forêt d'être résiliente. S'il arrive un gros dépérissement sur une sorte d'arbre, une forêt avec différents types d'essences pourra voir au moins les autres prendre le relai. Mais dans certaines zones, comme dans les Landes, qui sont peu riches en termes écologiques, le forestier n’a pas non plus une large marge de manœuvre. Parfois, il ne pourra pas avoir un mélange de plus de deux ou trois essences parce qu’écologiquement, les autres essences forestières ne vivront pas. Tout dépend du milieu.


Propos recueillis par Aurélie Loek

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