Verif'

Gaz à effet de serre : le gouvernement a-t-il vraiment atteint ses objectifs ?

Publié le 5 juin 2023 à 20h21, mis à jour le 6 juin 2023 à 11h26

Source : JT 20h Semaine

Le ministre de la Transition écologique s’est réjoui d’une baisse des émissions de gaz à effet de serre l’an dernier.
Tout comme la Première ministre, qui a souligné à plusieurs reprises le respect des objectifs climatiques par le gouvernement.
Derrière ces engagements, on trouve néanmoins l'impact de la pandémie ou encore un plafond revu à la hausse.

Les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 2,7% en France l’année dernière, d’après des chiffres provisoires publiés le 5 juin. Une baisse plus importante que prévu et dont se satisfait le gouvernement. "Derrière cette baisse de nos émissions, il y a l’action de tous et la territorialisation des actions dont nous avons besoin : c’est tout l’enjeu de la planification écologique", s’est félicité Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, dans un communiqué. 

"Nous sommes en avance sur nos objectifs"

Avant le ministre de la Transition écologique, la cheffe du gouvernement avait aussi mis en avant le respect des engagements climatiques, fruits des efforts déployés au niveau de l’État. "Depuis 2017 et l'élection du président de la République, nous avons redressé la barre. Depuis 2019, nos émissions réelles ont été systématiquement inférieures aux objectifs fixés. Nous sommes en avance sur nos objectifs", avait souligné Elisabeth Borne, au moment de présenter les contours d’un plan pour réduire les émissions françaises de moitié d’ici à 2030, par rapport à 1990. Cette dernière avait aussi rappelé la nécessité de "doubler le rythme" actuel pour tenir cet objectif.

Pour respecter la neutralité carbone, promise à l’horizon 2050, la France s’est fixé des plafonds d’émissions de GES à ne pas dépasser. Ces budgets, nommés des stratégies nationales bas-carbone (SNBC), sont révisés tous les cinq ans. Mais quelle réalité y a-t-il derrière les engagements honorés par l’exécutif ? 

Des budgets revus et une pandémie inédite

2019 et la révision du budget-carbone. Avec 1,7% d’émissions de GES en moins par rapport à 2018, la France a bien rempli les objectifs qu’elle s’était fixés pour 2019. Mais cela n’est pas seulement dû à une volonté politique. En effet, le fameux plafond a été rehaussé dans le nouveau budget carbone, adopté début 2020. Concrètement, au lieu de devoir respecter une limite de 416,2 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2e) à émettre cette année-là, la France s’est finalement autorisé un budget de 442 Mt CO2e. Les 434,5 Mt CO2e émis en 2019 lui ont donc permis de rester dans les clous. 

2020 et une planète mise à l’arrêt. Avec 392,3 Mt CO2e émis en 2020, la France a là aussi rempli ses objectifs climatiques. Une forte réduction, de l’ordre de 9% en un an, réalisée grâce à la pandémie. À l’époque, des associations environnementales, comme le Réseau Action Climat, s’était désolé d'une baisse des émissions "en trompe-l’œil", qui ne serait "pas du tout le reflet des politiques actuelles". L’arrêt quasi-total des transports et de l’industrie avait joué pour beaucoup dans cette baisse historique, mais aussi un "hiver peu rigoureux", selon le Citepa, le Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique.

Entre 2019 et 2022, on constate une baisse moyenne de 2,1% des émissions de gaz à effet de serre par an
Entre 2019 et 2022, on constate une baisse moyenne de 2,1% des émissions de gaz à effet de serre par an - CITEPA

2021 et le rebond post-Covid. Comme le prédisaient de nombreux spécialistes du climat, l’année 2021 a connu une forte reprise de l’activité économique, une fois le pire de la pandémie passé. Et avec elle, une reprise des émissions de GES, qui ont bondi de 5,7% en un an. Mais la France a tout de même respecté ses engagements, avec une limite à ne pas franchir de 422 Mt CO2e (contre 398 fixés par l’ancien budget, devenu obsolète). "Le niveau estimé pour 2021 est de 414,8 Mt CO2e, ce qui reste inférieur au niveau d’avant crise sanitaire (431,1 Mt CO2e en 2019)", constate ainsi le Citepa dans des chiffres consolidés.

2022 et la "sobriété énergétique". Les émissions de GES ont donc baissé de nouveau en 2022, avec une première estimation de 403,8 Mt CO2e pour l’an dernier. Le plafond, lui, était fixé à 409 Mt CO2e. Cette réduction résulte là aussi de facteurs conjoncturels, reprend le Citepa dans son analyse des chiffres. "Cela s’explique notamment par une forte réduction de la consommation d’énergie fossile dans un contexte de crise énergétique avec une hausse des prix du gaz et d’autres produits pétroliers, des appels à la sobriété énergétique auprès des ménages et des entreprises, un recours accru au bois, et un hiver doux."

Depuis 2019, les émissions de GES baissent en moyenne de 2,1% chaque année. Mais comme le rappelait le Haut conseil pour le climat (HCC) en 2021, cette tendance a été amorcée "principalement du fait de l’impact des mesures prises pour lutter contre la Covid-19, ainsi que du relèvement du deuxième budget carbone lors de la révision de la SNBC faite en 2020". Elle est aussi due à des effets structurels, selon le Citepa, comme l’"inertie du parc automobile", et à "la mise en œuvre de politiques" destinées à la transition écologique, comme la décarbonation de l’industrie. 

Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N'hésitez pas à nous écrire à l'adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur Twitter : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.


Caroline QUEVRAIN

Tout
TF1 Info