Climat : pourquoi l'Europe se réchauffe-t-elle plus vite que le reste du monde ?

Publié le 6 juillet 2023 à 20h48

Source : JT 20h Semaine

Le continent européen subit un réchauffement deux fois plus intense que la moyenne planétaire.
Pour en savoir plus sur ce phénomène, TF1info a contacté la climatologue Françoise Vimeux.

L'été 2023 se dessine progressivement comme un été hors norme, avec la confirmation ce jeudi 5 juillet par l'observatoire européen Copernicus du mois de juin le plus chaud jamais enregistré, avec l'effet combiné du changement climatique et du retour du phénomène El Niño. Les températures ont notamment battu des records dans le nord-ouest de l'Europe. 

Comme le soulignait un rapport de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) publié en novembre dernier, le Vieux continent est l'une des régions du monde qui subit le plus les effets du changement climatique. Pour en savoir plus, TF1info a contacté la climatologue François Vimeux, directrice de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD). 

Aucun autre continent au monde ne s'est réchauffé plus vite au cours des trente dernières années. Pour quelles raisons l’Europe subit-elle un réchauffement deux fois plus rapide que la moyenne planétaire ? 

Françoise Vimeux : On constate en effet que l’Europe se réchauffe plus de deux fois plus vite que la moyenne mondiale, qui est de 1,15 °C en plus qu’au début du XXe siècle. Pour l’Europe, c'est un peu plus de 2°C. Il y a trois raisons. La première, c’est que l’Europe est un continent et les continents se réchauffent plus vite que les océans. C’est lié au fait que les océans absorbent la chaleur sur toute leur profondeur. Mais, surtout, quand l’océan se réchauffe, sa surface s'évapore. Comme l’évaporation de l’eau demande beaucoup d’énergie, moins de chaleur est absorbée. Si l'on distingue les continents des océans avec les mêmes références temporelles, sur la dernière décennie 2013-2022 par rapport au début du XXe siècle, le réchauffement sur les continents monte à 1,6 °C, alors qu’il est à un peu plus 0,9 °C dans les océans.

La deuxième explication, c’est la position géographique de l’Europe. On sait que les régions tropicales se réchauffent moins que les régions des hautes latitudes. En Europe, les pays du sud se situent à moyenne latitude. Quand le service européen d’observation Copernicus parle de l’Europe, il prend en compte l’Islande, le Groenland, les terres émergées au-delà de la Suède et de la Norvège. On est au niveau du cercle arctique. Or, les régions arctiques se réchauffent trois à quatre fois plus intensément que la moyenne mondiale. Le surplus de chaleur fait fondre la glace sur le continent et la banquise. Vous enlevez une surface blanche pour la remplacer par une surface sombre, c’est ce que l'on appelle l’effet d’Albédo. Les surfaces blanches reflètent l’énergie solaire et absorbent donc moins de chaleur que les surfaces sombre comme de la roche.

La troisième raison, c’est que le changement climatique vient affecter les courants atmosphériques à la fois de basse et de haute altitude, qui impactent l’Europe, en particulier les régions qui sont situées à l’Ouest, sur le pourtour atlantique. La recherche est en cours pour comprendre comment ces courants atmosphériques sont affectés par le changement climatique et quelles en sont les conséquences sur la température.

D’autres pays sont beaucoup plus exposés et beaucoup plus vulnérables. Je pense notamment aux pays en développement.
Françoise Vimeux

Doit-on en déduire que l’Europe doit mettre les bouchées doubles pour réduire ses émissions de gaz à effet, car elle est davantage impactée que les autres régions du Globe ?

 Je ne dirais pas que l’Europe doit s’adapter plus que les autres. Chaque pays doit s’adapter en fonction de quels seront les impacts du changement climatique sur son territoire. L'Europe va devoir faire face à des degrés de réchauffement importants. En France métropolitaine, c’est + 3 degrés Celsius à l’horizon 2050 et + 4 degrés Celsius à l’horizon 2100 selon les politiques environnementales actuelles. Ça veut dire une augmentation de l'intensité et de la fréquence d’événements extrêmes. L'été 2022 sera un été normal en 2050 et froid en 2100 ! Ça veut dire des conséquences en termes d’intensité et de fréquence d’événements extrêmes. Mais, d'autres pays sont beaucoup plus exposés et beaucoup plus vulnérables. Je pense notamment aux pays en développement qui doivent absolument pouvoir s’adapter aux conséquences du réchauffement climatique. 

Les conséquences de ce réchauffement, déjà bien visibles, sont brutales. Pouvez-vous nous les rappeler ?

Ce que l'on observe, c’est une augmentation de l’intensité et de la fréquence des événements extrêmes, comme les vagues de chaleur, les pluies torrentielles ainsi que la sécheresse agricole. En France, beaucoup de nos littoraux sont touchés par l’élévation du niveau de la mer. Cela vient accentuer l’érosion, qui est un phénomène naturel, les risques de submersion marine lors des tempêtes et provoquer des inondations chroniques à marée haute.  


Matthieu DELACHARLERY

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