Cinq ans après l’Accord de Paris, la France à la traîne... mais que disent les chiffres ?

Publié le 11 décembre 2020 à 18h05, mis à jour le 13 décembre 2020 à 8h45

Source : TF1 Info

CLIMAT – Il y a cinq ans, la France signait l'Accord de Paris, s'engageant à réduire ses émissions de CO2. Aujourd’hui, elle se fait régulièrement rappeler à l’ordre pour son manque d’ambition.

Le 12 décembre 2015, se scellait à Paris un accord jugé historique pour le climat. Au terme d’âpres négociations dans le cadre de la COP21, 195 États signaient l’Accord de Paris où ils s’engageaient à maintenir la hausse de la température mondiale à 1,5°C d’ici 2100 "par rapport aux niveaux préindustriels" et à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Pour respecter de telles ambitions, il avait été convenu qu’il faudrait agir progressivement et que chaque pays devrait rehausser ses engagements tous les cinq ans, à l’occasion de la Conférence des parties (COP). Alors que la France a participé à l’accord européen, conclu ce vendredi matin pour diminuer de 55% les émissions d’ici dix ans, contre 40% jusqu’ici, où se situe-t-elle par rapport à ses premiers objectifs ? 

L'État contraint de démontrer l'efficacité de ses engagements

Dans le sillage de l’accord de 2015, elle s’est fixée des objectifs annuels pour mener la transition énergétique dans le cadre de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), et ainsi réduire de 40% ses émissions d’ici 2030 et jusqu’à 75% de ses émissions d’ici 2050. Pourtant, malgré une bonne volonté de façade, la France a du mal à convaincre. Pour preuve, elle arrive 18e au classement de l’Indice de Performance Climatique (IPC), en fonction de ses efforts fournis en matière de protection du climat. Le 19 novembre dernier, le Conseil d’Etat a jugé nécessaire de mettre l’État en demeure de prouver sous trois mois l’efficacité de ses politiques publiques dans l'optique de remplir ses engagements. Dans son dernier rapport datant de juillet, le Haut Conseil pour le Climat (HCC) pointe l'inadéquation entre l'action gouvernementale et ses ambitions déclarées. "En dépit de certains progrès comme le budget vert qui sera mis en œuvre sur le prochain projet de loi de finances, l’évaluation des lois et des politiques en regard du climat [] n’a pas progressé", constate l’organe indépendant, chargé de suivre la trajectoire française sur la transition bas-carbone. 

Il dresse un bilan de l’année dernière et déplore des efforts insuffisants : "Les émissions de la France ont diminué de 0,9% en 2019, ce qui est similaire aux années précédentes et loin des –3% attendus dès 2025. Les quatre grands secteurs émetteurs, le transport (30%) suivi de l’agriculture, le bâtiment et l’industrie, ont tous raté le premier budget carbone (2015-2018). La baisse temporaire des émissions lors du confinement est marginale par rapport aux efforts à accomplir".

Pas dans les clous sur le climat et l'énergie

Dans le détail, la France n'a pas atteint ses objectifs à la fois énergétiques et climatiques, selon l’Observatoire Climat-Énergie, un outil d’évaluation créé par plusieurs ONG en 2017. En 2019, l’empreinte carbone dans l'Hexagone a été de 419,9 millions de tonnes (Mt) de CO2 par rapport à un objectif de 404, soit un dérapage de 2,7%. La consommation finale d’énergie, elle, a été de 1.617,7 Kilowatt-heure (TWh) contre un objectif maximum de 1.607,4 TWh, soit un écart de 0,6%. 

Le Haut Conseil pour le Climat, dont le rôle est aussi de conseiller l’exécutif sur la meilleure stratégie à suivre, a identifié plusieurs leviers d’action pour parvenir aux objectifs climatiques. Parmi eux, on peut citer la rénovation énergétique des bâtiments, les investissements dans les transports publics et les infrastructures de mobilité douce, l’augmentation du stockage de carbone dans les sols, ou encore le déploiement des énergies renouvelables. Si la consommation des énergies renouvelables va progressant ces dernières années, elle n’atteint pas le temps de passage fixé. En 2019, elles ont représenté 17,2% de la consommation finale d’énergie, contre un objectif de 19,8%. En 2015, la France avait pris l’engagement de porter à 32% cette part dans le mix énergétique d’ici 2030.

Le HCC conclut son rapport en saluant l’exercice démocratique qu’a été la Convention citoyenne pour le climat, mais prévient : "Leurs propositions doivent être valorisées, mais l’État reste le garant de la mise en œuvre des politiques publiques climatiques et de leur équité, ainsi que de l’atteinte des objectifs climatiques de la France". Trouver comment réduire de 40% les émissions françaises de gaz à effet de serre d’ici 2030, et tout cela dans un "esprit de justice sociale", voilà la mission qui a été confiée en octobre 2019 à la  Convention pour le climat. Durant neuf mois, 150 citoyens tirés au sort ont alors travaillé à 149 propositions pour mettre la France dans les clous de l’Accord de Paris. 40% de ces mesures feront prochainement l’objet d’un projet de loi, dont les premiers arbitrages ont été rendus en début de semaine par le gouvernement... sans susciter un grand enthousiasme des auteurs des propositions.


Caroline QUEVRAIN

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