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La sortie du nucléaire était-elle basée sur la fausse idée que nos besoins en électricité allaient baisser ?

Publié le 2 septembre 2022 à 16h52

Source : TF1 Info

Face à la crise énergétique, l'opposition accuse le gouvernement d'avoir négligé le nucléaire.
Emmanuelle Wargon a défendu l'ancienne position de l'exécutif, affirmant que les scénarios prévoyaient une baisse des besoins en électricité.
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Il n'est pas important de reconnaître ses erreurs si l'on considère avoir été dupé. C'est, en substance, la position défendue par Emmanuelle Wargon ce mercredi 31 août sur LCI. Invitée en tant que nouvelle présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), l'ancienne ministre d'Emmanuel Macron a été interrogée sur la volonté passée du chef de l'État de réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique. Une position pour laquelle il est désormais vivement critiqué.

Sauf que pour l'ex-secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique, il ne s'agit pas d'une erreur de parcours. Simplement, en quelques années, "le monde a vraiment changé, et il a changé vite", a-t-elle lancé à notre micro. Et d'arguer : "À l'époque, on vivait avec des scenarii dans lesquels on pensait qu'on aurait besoin de moins d'électricité et de moins d'énergie." Une explication qui tient la route ? 

En 2019, une trajectoire "basse" ou "haute"

Pour le savoir, nous nous sommes tournés vers le rapport sur le sujet rendu par l'Ademe en janvier 2019. Dans cette étude sur les "trajectoires d'évolution du mix électrique de 2020 à 2060", l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie évalue plusieurs hypothèses, dont l'une prenait effectivement en compte une baisse de la demande en électricité. Appelé scénario "demande basse", il s'appuyait sur l'hypothèse d'une consommation annuelle qui "suit une trajectoire décroissante marquée jusqu'en 2030, puis reste constante". 

Ceci dit, il existait bien un autre scénario baptisé "demande haute". Or, celui-ci était, au contraire, basé sur une trajectoire en hausse jusqu'en 2040, dans l'optique où "la consommation électrique pour la chaleur dans le résidentiel continue de diminuer, mais est compensée principalement par la consommation des véhicules électriques, atteignant environ 16 millions dès 2035". Avec cette deuxième possibilité, la consommation française devait atteindre 494 TWh. 

Or, cette somme est peu ou prou égale aux chiffres actuels en France. Stable depuis 2010 (sauf pendant la crise sanitaire) compte tenu de certains facteurs, telle la modification du tissu industriel, la consommation d'électricité française a atteint 468 TWh en 2021.

En 2021, la baisse de la consommation n'est plus envisagée

Si l'ancienne ministre a tort d'affirmer que tous les scenarios prévoyaient une baisse des besoins en électricité, reste qu'elle a raison de souligner le changement radical de ces hypothèses. Un peu plus de deux ans après la publication du rapport de l'Ademe, c'est un tout autre panorama qu'a présenté le gestionnaire du Réseau de transport électrique (RTE). Dans ses prévisions rendues publiques le 25 octobre 2021, le scénario d'une baisse de la consommation électrique n'est en effet plus envisagé. Car pour le gestionnaire, "la consommation d'énergie va baisser, mais celle d'électricité va augmenter pour se substituer aux énergies fossiles". Et dans ses théories pour 2050, elle va bien plus loin que le scénario "demande haute" de 2019. Alors que l'Ademe prévoyait un pic à 494 TWh par an, RTE évalue plutôt la consommation à 645 TWh par an. Voire, à plus de 700 Twh dans le cas d'un tournant rapide vers le tout électrique.

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Felicia SIDERIS

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