Des centrales à charbon allemandes polluent-elles la région parisienne ?

Publié le 4 janvier 2022 à 13h12
La centrale électrique au charbon Neurath du géant allemand de l'énergie RWE à Garzweiler, dans l'ouest de l'Allemagne, le 27 octobre 2021

La centrale électrique au charbon Neurath du géant allemand de l'énergie RWE à Garzweiler, dans l'ouest de l'Allemagne, le 27 octobre 2021

Source : INA FASSBENDER / AFP

AIR – Selon Jean-Luc Mélenchon, des émissions liées à une mine de charbon en Allemagne auraient été repérées jusqu’en région parisienne. Une affirmation qui n’est pas nouvelle, mais qui n'est pas vraie pour autant.

Le charbon brûlé en Allemagne viendrait-il encombrer l’air de Paris et sa banlieue ? C’est ce qu’a avancé Jean-Luc Mélenchon, invité ce lundi 3 janvier sur France Inter. Abordant son programme écologique et notamment sa ferme opposition au nucléaire, qu’il considère comme dangereux, le candidat La France Insoumise a aussi fustigé le charbon allemand, qui "est un problème" : "Et en particulier la mine à ciel ouvert que les Allemands continuent à faire fonctionner. Ils devraient la fermer puisqu'elle pollue la région parisienne". 

Des propos qui, à l’écoute, ont de quoi surprendre. La pollution parisienne serait-elle due en partie au charbon extrait des mines allemandes ? Mais avant de répondre à cette question, de quelle pollution parle-t-on exactement ? En réalité, c’est surtout la combustion du charbon, émanant des centrales thermiques, qui provoque une pollution en émettant des particules fines dans l'air. Son extraction des mines, elle, peut surtout endommager la faune et la flore en venant polluer les nappes phréatiques ou en entrainant l’érosion des sols. 

Une combustion qui émet des particules fines

Ici, Jean-Luc Mélenchon vise donc très probablement les centrales thermiques en marche en Allemagne, plus polluantes pour l’air que les mines d’où est extrait le charbon. Une hypothèse d’autant plus crédible puisque ce n’est pas la première fois que de telles accusations sont dirigées à l’endroit des centrales allemandes. En 2016, Nicolas Sarkozy avait été très critique lui aussi sur les répercussions du charbon allemand : "Quand je vois que les Allemands viennent de rouvrir toutes leurs centrales à charbon qui envoient leurs particules jusqu’à Paris, qui nous inondent". 

À cette époque, un fort épisode de pollution dans la capitale avait fait l’objet de plusieurs rumeurs sur les réseaux sociaux, qui ciblaient le charbon allemand. Mais ce n’est pas parce que le sujet a déjà occupé une place dans le débat public qu’il est sérieux pour autant. Nous avons interrogé l’association Airparif, qui se charge de surveiller quotidiennement la qualité de l’air en région parisienne. Différents polluants sont ainsi recherchés et mesurés quotidiennement : le dioxyde d’azote, l’ozone, les particules de 10 micro-millimètres de diamètre (PM10) et les particules fines, aussi appelées PM2,5. 

La pollution de l'air en Ile-de-France mesurée par Airparif, le 4 janvier 2021
La pollution de l'air en Ile-de-France mesurée par Airparif, le 4 janvier 2021 - Airparif

C’est en partant de la composition des polluants que l’on obtient des informations sur leur origine, éclaire Antoine Trouche, ingénieur à Airparif : "Nous avons des analyseurs permettant d’évaluer la composition chimique de ces particules. Les particules issues de la combustion de charbon dans centrales thermiques conduisent à l'émission de particules de soufre. Il n’y a quasiment que la combustion de ces centrales à charbon, du moins en Europe de l’Ouest, qui émet des particules de soufre". 

Autrement dit, plus ces particules de soufre sont présentes dans l’air, plus des émissions importées d’autres pays et liées à des centrales à charbon sont responsables. Or, leur présence est anecdotique en région parisienne depuis plus de cinq ans, selon Antoine Trouche : "On ne détecte quasiment pas de particules soufrées dans l’atmosphère. La dernière fois qu’on en a vues remonte à un épisode de pollution en 2016. Et encore, ce n’était pas du tout une source majoritaire".

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En réalité, les principaux polluants mesurés en Ile-de-France sont locaux. D’après Airparif, le principal contributeur est le secteur résidentiel avec 54% des émissions de particules fines, puis le transport routier avec 19% de ces émissions. Expliquer que la pollution observée en Ile-de-France est due au charbon allemand, qu'il s'agisse de son extraction dans les mines ou sa combustion dans les centrales, est donc simplement faux : les particules fines de soufre sont quasi inexistantes dans l'air parisien.

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Caroline QUEVRAIN

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