La maison résiliente : des pistes et des idées pour des habitats plus autonomes

Publié le 8 juillet 2022 à 14h57, mis à jour le 8 juillet 2022 à 15h07
La maison résiliente : des pistes et des idées pour des habitats plus autonomes
Source : DR / Terran

Panneaux solaires, réfrigérateurs naturels, récupérateurs d’eau de pluie, poules pondeuses...
De plus en plus de Français vivent dans une maison résiliente.
Objectif : éliminer les déchets, générer un minimum de pollution et se libérer des factures énergétiques.

100 000 Français consomment leur propre électricité. D’après le gestionnaire du réseau de distribution Enedis, ce chiffre pourrait doubler d’ici 1 à 2 ans. Ces particuliers installent pour l’essentiel des panneaux photovoltaïques aux performances accrues et aux prix en baisse. L’État, souvent dépassé par des objectifs climatiques ambitieux, encourage ce mouvement : depuis 2017, les pouvoirs publics autorisent les particuliers à autoconsommer leur production au lieu de la revendre, versent des primes en fonction des investissements, garantissent pendant 20 ans des tarifs de rachat en cas de surplus de production, etc.

D’après le ministère de l’Écologie, les Français consacraient 9 % de leur budget à l’énergie en 2019. Mais la guerre en Ukraine inquiète : les nations et certains gros producteurs de gaz parlent d’une pénurie cet hiver. En l’occurrence, le prix du kilowattheure flambe. Sans le bouclier tarifaire mis en place par les pouvoirs publics, prolongé jusqu’à la fin de l’année 2022, certaines factures auraient pu doubler. Partout en France, les associations telles que Picojoule, Tripalium, 3aPV, l’Atelier du Zéphyr, etc., formant à l’auto-construction ou l'auto-installation de panneaux solaires, de petites éoliennes, de méthaniseurs domestiques, de poêles de masse ou fours solaires, drainent de plus en plus d’intéressés.

En 2004, Rémi Richart quitte ses activités d’informaticien dans une banque pour réfléchir aux fragilités de notre société et à l’impact de notre mode de vie. Il en déduit que notre hyper consommation permanente ne tient pas et nous conduit à une "lente et longue descente". Il estime qu’il faut passer à l’action et rénover en urgence nos habitats : "Préparons-nous progressivement, matériellement, psychologiquement et socialement aux profondes futures mutations de notre société en diminuant notre impact écologique." Il s’installe avec sa compagne dans le Cantal et lance la rénovation écologique d'un vieux corps de ferme qu'il pense en "îlot éco résilient". Il a également lancé son entreprise de conseil et coécrit le précis "La maison résiliente" aux éditions Terran pour guider les particuliers à construire leur maison.

Optimisation maximum du bâti et du jardin

En premier lieu, il conseille de penser à la localisation du projet de maison autonome et résiliente. Certes, il n’existe pas de territoire parfait. Mais choisir un terrain situé dans l’estuaire de la Gironde, potentiellement sous l’océan en 2040, n’inspire pas Rémi Richart : "Préférez une zone un peu en hauteur et pas trop proche de l’eau. Éloignez-vous des zones urbaines trop denses, difficile d’y trouver des terres pas trop chères et suffisamment vastes pour développer un potager et élever des animaux." Avec leurs trois garçons, la famille Richart élève des poules (pour les œufs et manger les déchets alimentaires) et des moutons dont ils utilisent la laine pour pailler le jardin.

Désormais autosuffisante en légumes, fruits et eau, la famille s’est attelée à construire et isoler leur lieu de vie avec de l’argile, du chanvre et du liège. Elle installe 12 m² de panneaux solaires photovoltaïques et thermiques sur une grange et une petite éolienne. Elle pense à forer l’eau des puits du jardin et récupérer les goûtes qui tombent du ciel. Le formateur reconnaît qu’un tel projet requiert un certain savoir-faire : "On ne peut pas partir dans une démarche de résilience sans travailler ce plan-là. Quelqu’un complètement allergique aux outils de bricolage devient dépendant pour toute la technique et ne peut pas réparer une panne en irrigation dans le potager par exemple. Il faut utiliser ses mains et s’y connaître en électricité." Rémi Richart promet que tout le monde y arrive en se faisant accompagner, y compris les familles monoparentales. Pour chauffer l’espace et cuire des aliments, le bois complète les dispositifs.

Le formateur préconise d’élaborer des outils de cuisson et de conservation neutres en gaz à effet de serre. Il a monté lui-même un four solaire "très efficace et peu encombrant". Il cuit à basse température mais n’altère pas le goût. La famille se sert surtout de son réfrigérateur naturel, encastré dans le mur et ouvert sur l’extérieur, que l’air hivernal tient au frais. "Il s’agit d’un outil low tech, utilisé depuis l’antiquité, avec des ventilations et des sondes pour vérifier que la température ne dépasse pas 4° (si vous conservez de la viande), 7° (si vous n’en mangez pas). Dès que la température descend en dessous, je bouche les ventilations et dès qu’elle augmente, je puise de l’électricité produite par les panneaux solaires", commente Rémi Richart.

Adapter sa consommation en fonction de la météo

Dernière étape et non des moindres, les habitants de telles maisons doivent gagner en sobriété. Rémi Richart nous exhorte à nous reconnecter avec la nature et se servir de la météo. "J’insiste souvent là-dessus, mais une maison résiliente ne diminue pas notre confort de vie. Nous devons juste consommer en fonction des conditions météos : diminuer notre consommation l’hiver, utiliser le beau temps pour tronçonner, lancer une machine à laver le linge, cuisiner avec le four électrique, etc." Les enfants utilisent comme les autres des ordinateurs connectés à Internet et la famille ne se prive de rien : "En cas de beau temps et si nos réserves d’eau sont pleines, nous pouvons prolonger nos douches d’eau chaude puisque l’eau revient à la nature", s’enthousiasme le formateur.

Les confinements successifs suscitent des vocations et Rémi Richart sent que le vent tourne. "Même si ça demande beaucoup d’investissement au départ, on fait des économies sur la durée et surtout, on ne risque pas de se retrouver sans électricité. Plus on va vivre de périodes critiques, plus on risque d’être entendu. J’espère faire du lobbying auprès des élus et faire tache d’huile." Déjà, plusieurs cabinets d'architectes, promoteurs, constructeurs investissent ce marché de l'habitat autonome en énergie. Les maisons bioclimatiques, en bois ou en paille, aux matériaux recyclés et aux toitures solaires font florès partout en France.


Geoffrey LOPES

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