L'Organisation météorologique mondiale a mis en garde, mercredi, sur un retour "très probable" du phénomène El Niño cette année.Il intervient dans le contexte du changement climatique dû aux activités humaines.Et pourrait faire grimper les températures jusqu'à battre de nouveaux records de chaleur.
Après trois ans de La Niña, puis une période neutre, celui que l'on surnomme "l'enfant terrible" du climat pourrait faire son retour. Évoqué depuis plusieurs semaines, l'Organisation météorologique mondiale a confirmé, ce mercredi 3 mai, un développement "probable" du phénomène El Niño cette année. Selon les chiffres de l'organisme de l'ONU, il existe désormais 60% de chances qu'il se développe entre mai et juin, et 80% de chances entre juillet et octobre.
Records de températures en vue ?
Le dernier El Niño sur la planète s'est produit en 2018-2019 et a laissé place à un épisode exceptionnellement long de la Niña, qui provoque habituellement les effets inverses, avec notamment une baisse des températures. Mais malgré cet épisode qui s'est étalé sur trois ans, les huit dernières années sur Terre ont été les plus chaudes jamais enregistrées, d'où la vigilance accrue sur El Niño qui pourrait se développer cette année.
Selon Petteri Taalas, le chef de l'OMM, "le développement de El Niño conduira très probablement à un nouveau pic du réchauffement climatique et augmentera les chances de battre des records de température". Un avertissement également lancé par Jérôme Vialard, directeur de recherche à l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD). "La Niña ramène des eaux froides du fond du Pacifique au contact de la surface, ce qui marche un peu comme un climatiseur planétaire. Ces eaux froides vont prendre de la chaleur à l'atmosphère et la température moyenne de la planète va baisser de quelques dixièmes de degrés - typiquement 0,2°C, parfois 0,3°C", explique-t-il à TF1Info.
There is about 60% chance for the onset of #ElNino during May-July, rising to 70-80% during July- Sept. #ElNiño affects weather and climate patterns in many parts of the world and is typically associated with higher global temperatures. 🔗 https://t.co/XfRP2CaH9C pic.twitter.com/5TCUrV0nkC — World Meteorological Organization (@WMO) May 3, 2023
"Là, il se trouve que pendant trois ans, on a eu un La Niña exceptionnellement long. Durant cette période, l'effet climatiseur planétaire a tourné à fond, ce qui a quelque peu amorti les effets de la hausse des gaz à effet de serre qui tirent la température de l'atmosphère vers le haut. Mais avec la fin de La Niña, cet effet climatiseur prend fin et une partie de la chaleur absorbée par les océans durant cet épisode, qui n'est pas absorbée définitivement, va être communiquée à l'atmosphère. Il est donc fort probable que l'année 2024 atteigne de nouveaux records de chaleur et batte celui de 2016", avance le chercheur.
De là à dépasser la barre symbolique des 1,5°C de réchauffement par rapport à l'ère pré-industrielle ? "Il est trop tôt pour le dire. Cela va dépendre. Il est fort probable qu'on ait un El Niño, mais nous n'en sommes pas certains. Ensuite, la question est de savoir si on va avoir un "Super El Niño", qui est un phénomène plus rare. S’il se développe, on pourra venir chatouiller cette barre symbolique. Mais je pense que ça n'arrivera que si nous avons un 'Super El Niño'", précise Jérôme Vialard.
"Double effet"
Car si le retour d'El Niño est "fort probable", une incertitude demeure quant à son intensité. Celui de 2018/2019 est considéré comme faible, mais celui qui s'est développé entre 2015 et 2016 a été particulièrement puissant, avec des conséquences désastreuses : l'année 2016 est la plus chaude jamais enregistrée sur la planète en raison du "double effet" combinant un El Niño très puissant et le réchauffement de la planète provoqué par les émissions de gaz à effet de serre liés à l'activité humaine.
D’autant que l’an passé, la température moyenne de la planète a été supérieure de 1,15°C par rapport à la moyenne pré-industrielle, "on pourrait facilement arriver à +1,4 ou 1,5°C en raison du fait qu'El Niño vient se rajouter au changement climatique", détaillait déjà en février à TF1info Juliette Mignot, chercheuse à l'Institut Pierre Simon Laplace. Et si "l’enfant terrible du climat" n'a pas d'effet direct sur le continent européen, la hausse globale des températures pourrait amener des vagues de chaleur importantes à l'été 2024 sur le Vieux continent, avant un potentiel retour de La Niña, l'OMM précisant que ses effets dépendent en partie de la période de l'année où il se développe.
Par ailleurs, à la différence de sa petite sœur, El Niño ne dure normalement qu'entre neuf et douze mois. S'il "n'existe pas deux El Niño pareils", le phénomène qui se développe au printemps "atteint son pic en fin d'année et disparaît généralement ensuite assez vite", détaille le directeur de recherche. Sauf en cas de "Super El Niño". "Dans ce cas, il a tendance à faire de la résistance. Ça veut dire qu'il y a un réchauffement de l'est du bassin Pacifique qui se prolonge durant environ six mois supplémentaires".
El Niño provoque en général une hausse des précipitations dans certaines parties basses de l'Amérique du Sud, du sud des États-Unis, de la Corne de l'Afrique et de l'Asie centrale, tandis qu'il peut provoquer de graves sécheresses en Australie, en Indonésie et dans certaines parties de l'Asie du Sud, entraînant d’importants incendies. Il peut également avoir un effet sur l’activité cyclonique à l’échelle planétaire.
Sur le
même thème
Tout
TF1 Info
- Police, justice et faits diversColère et émoi après le suicide de Lindsay, harcelée à l'école
- InternationalGuerre en Ukraine : les attaques en Russie se multiplient
- Police, justice et faits diversMeurtre d'Iris dans le Morbihan
- SportsMohamed Haouas, international français de rugby, dans la tourmente judiciaire
- Police, justice et faits diversKarine Pialle : mystère autour de la disparition de la mère de famille