Fuites de gazoducs Nord Stream : un nuage de méthane traverse la France, est-ce dangereux ?

Publié le 6 octobre 2022 à 17h13

Source : Le CLUB

À la suite des fuites observées sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2, un nuage de méthane s'est formé dans l'atmosphère.
Un phénomène qui a touché la France.
Que sait-on de ce nuage et représente-t-il un risque pour la santé ?

Les conséquences des incidents qui ont touché les gazoducs russes Nord Stream 1 et 2, le 26 septembre dernier, continuent d'inquiéter. Alors que l'enquête se poursuit autour des quatre fuites observées en mer Baltique - les premières observations semblant confirmer un "acte de sabotage" -  les interrogations autour des émanations de gaz qu'elles provoquent se multiplient. 

Car depuis le 26 septembre, les gazoducs ont relâché dans l'atmosphère des milliers de tonnes de méthane, principal composant du gaz naturel. La quantité est telle qu'un nuage de méthane, invisible à l'oeil nu, s'est formé juste après l'apparition des fuites en mer Baltique et a traversé l'Europe, et notamment la France.

"Nous n'avons jamais vu ça"

Un nuage détecté par les satellites de l'Agence spatiale européenne (ESA) et de la société Icos (Integrated Carbon Observation System), chargée d'observer les flux de gaz à effet de serre en Europe. Selon les modèles publiés, il s'est créé dès le 26 septembre, a traversé la Suède, la Norvège et la Finlande, avant d'arriver sur le Royaume-Uni aux alentours du 28 septembre, puis de survoler la France entre le 29 et le 30 septembre dernier. "Nous pensons que le vent dans la zone de la fuite a poussé les émissions de méthane vers le nord jusqu'à la Finlande avant de s'orienter vers la Suède et la Norvège" puis vers le sud de l'Europe, explique le professeur Stephen Platt, chercheur à l'Institut norvégien de recherche sur l'air (NILU). 

Le 27 septembre dernier, l'observatoire norvégien de Birkenes, à Agder, ainsi que plusieurs villes suédoises ont enregistré d'importantes concentrations de méthane dans l'air. "Nous n'avons jamais vu ça", s'est inquiété la scientifique Cathrine Lund Myhre, également chercheuse au NILU. Un phénomène qui semble toutefois être sans danger pour la santé, le méthane n'étant pas toxique en dessous d'une concentration de 50.000 parties par million (ppm), ce qui est largement le cas pour ce nuage de méthane qui circule à une haute altitude.

Si le gaz ne présente pas de danger immédiat pour la santé, il est particulièrement nocif pour le climat. Le méthane est ainsi "80 fois plus générateur de réchauffement que le CO2" et "responsable d'un quart du réchauffement climatique", selon les scientifiques du Giec. D'autant plus inquiétant que le NILU estime que plus de 80.000 tonnes de ce gaz ont été rejetées dans l'atmosphère depuis le début des fuites, soit l'équivalent de ce que produit chaque année une ville comme Paris ou un pays comme le Danemark. Un chiffre qui pourrait encore augmenter, alors que l'ESA estime que les gazoducs ont libéré 79.000 kg de méthane par heure sur les cinq premiers jours, ce qui fait de ces fuites les plus importantes jamais détectées sur une infrastructure gazière ou pétrolière.

S'ils sont impressionnants, les rejets de méthane observés restent toutefois loin de ceux émis chaque année par l'industrie pétrolière et gazière à travers le monde. L'Agence spatiale européenne précise ainsi que "le rejet de Nord Stream fait pâle figure en comparaison des 80 millions de tonnes émises" annuellement par ce secteur. Les dernières mesures montrent ainsi que le total du méthane rejeté dans l'atmosphère par les Nord Stream correspond à peine à un jour et demi d'émissions globales à travers le monde.

Mais ces émanations vont contribuer à la dégradation de la situation à travers la planète et amplifier le réchauffement climatique alors que, dans son dernier rapport sur l'état du climat, le Giec a pointé qu'en 2019, "les concentrations de CH4 n'ont jamais été aussi élevées depuis au moins 800.000 ans".


Annick BERGER

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